L'impact de la récession mondiale sur l'industrie du recyclage se fait sentir en Chine, première plateforme mondiale de transformation de déchets pour la réexportation : Nine Dragons Paper, premier producteur d'Asie (Japon inclus) de carton d'emballage, cotée à Hong- kong, a vécu une année 2008 épouvantable. L'action a plongé en Bourse, et les analystes ont commencé à s'inquiéter du surendettement du groupe fondé et dirigé par Zhang Yin, connue pour être, bon an mal an, la femme la plus riche de Chine.
Dans un domaine où il faut de très gros volumes pour être rentable, les ventes ont baissé de 5,3 % au second semestre 2008 par rapport à l'année précédente, ce qui a conduit à un effondrement des profits de près de 50 %.
Partie s'installer aux Etats-Unis dans les années 1980, Zhang Yin y a fondé America Chung Nam, qui récupère des papiers usagés pour les exporter vers la Chine, qui, à l'époque, avait besoin de matériaux bon marché pour ses industries naissantes. En 2001, la société est devenue le premier exportateur américain de papier.
DOUTES ÉCOLOGIQUES
En 1995, Zhang Yin se rend compte que les besoins en emballages de l'atelier du monde sont massifs : elle fonde en Chine Nine Dragons Paper, qui va transformer les cartons usagés en emballages et produits de conditionnement pour les industries exportatrices présentes en Chine, mais aussi, grâce à des prix imbattables, pour les usines du monde entier. Aujourd'hui, la récession a fait drastiquement chuter ses ventes : " Nous affrontons de fortes difficultés sur les marchés internationaux, et les exportations vont continuer de baisser ", a-t-elle déclaré à Hong-kong lors de la publication des résultats du groupe.
La reine du carton estime toutefois que le pire est passé : les ventes ont légèrement rebondi au premier trimestre 2009. Récemment, la ville de Toronto, qui a envoyé près de 20 000 tonnes de déchets de papier à Nine Dragons Paper en 2007 et 2008 (et la moitié à un autre transformateur en Corée du Sud), a annoncé que le groupe chinois souhaitait, depuis janvier, importer davantage de déchets, signale le Toronto Star. Mais la crise suscite dans cette ville canadienne de nouvelles interrogations sur la pertinence du modèle actuel de recyclage, complètement externalisé : " La plupart des résidents acceptent de recycler, car ils sont persuadés que c'est bon pour l'environnement. Mais ils n'ont pas conscience que les municipalités envoient toutes ces marchandises en Chine et en Corée du Sud, ce qui génère une très grosse empreinte carbone ", signale le journal.
Ne serait-il pas plus avantageux d'un point de vue écologique mais aussi économique, s'interrogent certains experts canadiens, de doter le pays de capacités de recyclage ? Une alternative à laquelle Zhang Yin devra trouver une parade...
Brice Pedroletti
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