mercredi 6 mai 2009

Nouvelle étape dans la réconciliation entre Pékin et Taipei - Tristan de Bourbon

Le Temps - International, jeudi, 7 mai 2009

Pour la première fois depuis 1971, Taïwan participera à une réunion d'envergure de l'ONU, en l'occurrence l'Assemblée mondiale de la santé du 18 au 27 mai. La Chine a levé son veto

En invitant fin avril Taïwan à assister du 18 au 27 mai à la 62e assemblée mondiale de la santé «en tant qu'observateur», la directrice générale de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), Margaret Chan, a marqué une étape majeure dans la position internationale de l'île et simultanément dans les relations entre celle-ci et la Chine. Pour la première fois depuis la perte en 1971 de son siège à l'ONU au profit de Pékin, Taipei participera en effet à une réunion officielle de l'un des organismes liés à l'institution internationale, même si le pays ne pourra pas utiliser son nom officiel pour ne pas froisser son voisin. Depuis lors, le régime de Pékin a en effet toujours bloqué toute contribution de ce type, assurant qu'une province chinoise ne pouvait se présenter à des réunions ouvertes aux seuls Etats souverains et qu'une telle volonté dissimulait son désir d'indépendance.

Ce geste, dont l'importance est renforcée par la nationalité chinoise de Margaret Chan, a bien évidemment été décidé après l'accord de Pékin. Elle entend ainsi récompenser et encourager le président de la république taïwanaise Ma Ying-jeou, au pouvoir depuis sa victoire il y a un an à la tête du Guomintang, le parti favorable à un rapprochement avec la Chine.

«Je ne pense pas que cette décision reflète le moindre changement dans la position de Pékin sur l'indépendance de Taïwan, mais c'est un clair signal que le Parti communiste est prêt à être flexible et pragmatique sur les questions politiques en réponse à des mouvements pragmatiques similaires de Taipei», analyse Andy Rothman, l'analyste macroéconomique d'une société financière. «Tant que Taipei ne demande pas l'indépendance de jure, presque tout est donc possible.»

A ce propos, Pékin a depuis quelques années fait évoluer sa définition de l'expression «une Chine». De «Taïwan est une partie inaliénable de la Chine et le siège du gouvernement central de la Chine est Pékin», celle-ci s'est transformée en «le Continent et Taïwan appartiennent à la Chine». Une différence sémantique importante puisqu'elle autorise une indépendance d'action certaine à l'île rebelle.

Cette politique s'est rapidement prolongée vers le champ économique. Le 28 avril, China Mobile a concrétisé l'achat de 12% de l'opérateur taïwanais Far EasTone. Le 30 avril, Taipei a autorisé les investisseurs institutionnels chinois à acheter les actions d'entreprises cotées à la bourse de Taipei. L'indice de celle-ci explosait de 6,74% dans la journée, devant la possibilité de voir affluer à court terme au moins 22 milliards de dollars taïwanais (497 millions d'euros). Enfin, mardi, Pékin a entériné la création d'une nouvelle zone économique dans la province du Fujian, située en face de Taïwan. Cette entité administrative, pensée pour la première fois en 2004, facilitera les investissements des entreprises taïwanaises sur le territoire chinois. Un moyen supplémentaire de renforcer le lien entre les deux pays.

PHOTO - Touristes de Chine à Taiwan après une croisière sur le paquebot "Legends of the Sea". C'est le plus important groupe de touristes sur l'île depuis le rapprochement entre les deux gouvermenents. Port de Keelung, 16 mars 2009 / REUTERS

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