Le dollar a dû céder beaucoup de terrain devant l'euro la semaine du 4 mai. L'optimisme des investisseurs y a contribué. Ils se sont sentis suffisamment ragaillardis pour s'aventurer hors du douillet refuge qu'était censé offrir le billet vert. Mais les craintes de la Chine y sont aussi pour quelque chose. En milieu de semaine, la banque centrale chinoise s'est alarmée de « l'erreur de jugement » commise par certaines de ses homologues occidentales.
Les Chinois redoutent que les Etats-Unis et le Royaume-Uni ne déclenchent un véritable désastre en choisissant de s'accrocher à la planche à billets pour éviter le naufrage économique. Un excès d'indulgence pourrait finir par mettre dollar et livre sterling au tapis, et provoquer une poussée généralisée d'inflation.
Pékin exprime sa désapprobation quelque temps après avoir déclaré que l'économie mondiale pourrait très bien adopter comme monnaie de réserve une autre devise que le dollar. Difficile d'ignorer les remarques du pays qui est devenu le plus gros créancier des Etats-Unis. La Chine détient 744 milliards de dollars (547 milliards d'euros) en bons du Trésor américain, dont 257 milliards ont été acquis au cours de la seule année qui vient de s'écouler.
La République populaire de Chine souhaitait apparemment envoyer un message clair aux Etats-Unis : défendez votre monnaie. Si le dollar s'effondre, l'inflation s'abattra sur les Etats-Unis, les taux d'intérêt remonteront en flèche et l'économie mondiale s'enfoncera davantage dans la récession.
Pour le Royaume-Uni et sa livre sterling, l'avertissement chinois est tout aussi perturbant. Si la Réserve fédérale américaine (Fed) a acheté pour 300 milliards de dollars de bons du Trésor, ce n'est là qu'une mesure de soulagement parmi d'autres. En revanche, il y a de fortes chances pour que l'intégralité des 125 milliards de livres (139 milliards d'euros) émis par la Banque d'Angleterre serve à souscrire aux emprunts d'Etat britanniques. N'ayant pas la chance d'être une monnaie de réserve, la livre serait très vulnérable.
RÉCESSION ET ENDETTEMENT
L'optimisme tout frais des marchés et l'inquiétude de Pékin procèdent de la même cause. Si les flots de monnaie déversés par les banques centrales anglo-saxonnes n'ont pas vraiment permis de maîtriser la dette publique, ils ont en revanche rendu vigueur aux indices boursiers ainsi qu'au prix de certains autres actifs risqués.
Mais attention : si ces marchés se retournent, tout le bénéfice de l'émission monétaire massive sera anéanti, une fois que la bulle ainsi créée aura éclaté. Tout ce qui nous resterait alors, ce serait la récession et l'endettement. On ne peut pas dire que les Chinois aient tort de se faire du souci.
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