L'accord stratégique entre Rio Tinto et Chinalco est de plus en plus critiqué en Australie. Le redressement de l'action Rio fragilise les termes de la transaction censée recapitaliser ce dernier à hauteur de 19,5 milliards de dollars.
L'alliance stratégique entre Rio Tinto, troisième groupe minier diversifié mondial en termes de capitalisation boursière, et le holding public chinois Chinalco doit encore franchir des sérieux obstacles, notamment en Australie, siège de la plupart de ses actifs centraux. Les critiques émises par le chef libéral de l'opposition Malcom Turnbull se font plus pressantes. Et elles rencontrent les faveurs d'une partie non négligeable de l'opinion publique dans le pays.
Le 1er mai, le leader libéral a déploré qu'en prenant 18 % du capital de Rio Tinto par l'intermédiaire de Chinalco, Pékin acquerra une pleine visibilité sur les informations sensibles du groupe anglo-australien (production, coûts, politique des prix et de commercialisation). Il a évoqué l'existence d'un conflit d'intérêts. « L'architecte de cette opération est Xiao Yaqing, actuellement vice-ministre du gouvernement », a souligné Malcom Turnbull.
« Les assurances que Chinalco agisse comme une entreprise privée ne sont pas convaincantes », a-t-il poursuivi. Conclusion : « Le trésorier ne devrait pas approuver la transaction dans sa forme actuelle. »
Requête de certains actionnaires
Interpellé, le ministre fédéral du Trésor a réagi dimanche en dénonçant « une campagne de peur qui voit les Rouges sous les lits ». Il a qualifié d'« irresponsables » les propos de l'opposant en rappelant que les relations commerciales avec la Chine sont les plus importantes pour l'Australie.
Préoccupé par la tournure que prend le débat, Chinalco craint désormais que les termes de l'entente avec Rio Tinto soient modifiés à son détriment. Répondant au « Financial Times », Wang Wenfu, président des opérations à l'étranger du holding chinois, a réaffirmé avec vigueur son attachement à la transaction telle qu'elle a été conçue. En particulier, Chinalco ferme la porte à la requête de certains actionnaires de pouvoir souscrire à l'émission d'obligations convertibles de 7,2 milliards de dollars qui lui est réservée.
Pour la direction de Rio Tinto convaincre les autres actionnaires d'accepter l'accord avec le Chinois n'est pas non plus chose aisée. Depuis le 12 février, date de l'annonce de l'accord, l'action Rio Tinto a rebondi à Sydney de près de 30 %, rendant nettement moins attrayante la proposition de Chinalco.
Toutefois, en dépit de ces difficultés, il reste peu probable que toute l'opération capote. En revanche, malgré la réticence chinoise, des ajustements sont de plus en plus d'actualité. « Jugeant faible la probabilité d'un veto de l'Etat australien, nous estimons en revanche très probable le scénario d'une refonte de la structure de la transaction, qualifiée de «flexible» par le management depuis lors », commente Luc Pez, analyste chez Oddo Securities.
MASSIMO PRANDI
PHOTO - Xiao Yaqing, le président de Chinalco / Reuters
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