François Fillon est rentré de Chine, en cette fin d'année, avec plus de 6 milliards d'euros de contrats dans ses bagages. Il a surtout laissé auprès des dirigeants de ce pays, paraît-il, une excellente impression, précieux crédit à ce niveau. On y a apprécié sa réserve, sa bonne éducation et la mesure de ses propos. Cet art du contournement apparent, qui est une arme dans la négociation et parfois même dans la guerre, ne lui a au reste pas interdit d'évoquer des sujets périlleux, mais dans les termes appropriés : des « malentendus » à propos du Tibet, la « très vieille démocratie française que le gouvernement chinois doit accepter » (droits de l'homme), le souhait que « le système monétaire devienne plus flexible » (allusion à la fixité du yuan, dommageable à ses partenaires). Les dirigeants chinois, dit-on, ont d'autant plus apprécié le ton qu'il contraste avec l'attitude parfois provocatrice ou excessivement familière de Nicolas Sarkozy.
Ce n'est pas la première fois que le Premier ministre arrange ou recolle les morceaux dispersés par son président. On se souvient de son intervention courageuse et tirée au cordeau devant le Congrès des maires de France. Remontés jusqu'à l'apoplexie contre la suppression de la taxe professionnelle, ils l'y accueillirent sous les sifflets. Il en repartit salué par quelques applaudissements. Qu'on ne s'y trompe pas, cet art de calibrer ses propos ne trahit en rien la soumission. Il suffit de voir comment, à l'Assemblée nationale, il monte vigoureusement au créneau contre les attaques de l'opposition_ Mais dans cette arène, c'est une des règles du genre. Ne pas confondre entre les interlocuteurs est d'abord une question de goût.
Autant Sarkozy s'entend à monter des coups, autant Fillon excelle à les arranger. Quand l'un choque parfois, l'autre apaise le plus souvent. Certains y trouvent matière à regretter que ce Premier ministre soit trop lisse, mais beaucoup d'autres déplorent que ce président soit trop mal élevé. Ce dernier, qui a d'autres qualités, a été bien inspiré de s'adjoindre quelqu'un possédant celles dont il manque. Ce dérangeur est, semble-t-il, disposé à prolonger le couple avec son arrangeur. Il ne s'en trouvera que mieux, au bout du compte.
© 2009 Les Echos. Tous droits réservés.
0 commentaires:
Enregistrer un commentaire