Vingt Chinois de l'ethnie ouïgoure, arrivés depuis deux semaines à Phnom Penh, ont été expulsés samedi 19 décembre au soir par le gouvernement cambodgien pour " immigration illégale " après avoir demandé le statut de réfugié aux Nations unies.
Fuyant la répression dans leur province du grand ouest chinois, le Xinjiang, ces Ouïgours musulmans affirmaient être en danger en Chine depuis les sanglantes émeutes intercommunautaires de juillet, où leur minorité ethnique a été impliquée. Dix-sept personnes ont déjà été condamnées à mort pour leur rôle dans ces violences, qui avaient éclaté à Urumqi, capitale du Xinjiang, et auraient fait officiellement près de 200 morts.
Le porte-parole du ministère cambodgien des affaires étrangères, Koy Kuong, a déclaré que ces réfugiés, parmi lesquels se trouvent deux enfants, " sont des immigrants illégaux, et, selon les lois de l'immigration au Cambodge, ils doivent être expulsés du pays ". Arrivés il y a une quinzaine de jours dans la capitale khmère grâce à des réseaux de missionnaires chrétiens engagés dans l'aide aux réfugiés de Corée du Nord en Chine, les Ouïgours ont été mis, samedi soir, dans un avion pour la Chine.
La décision du gouvernement du premier ministre cambodgien Hun Sen a déclenché la fureur des organisations de défense des droits de l'homme, et suscité une vive protestation américaine.
Le président du Centre cambodgien pour les droits de l'homme, Ou Virak, a déclaré à l'AFP que " le gouvernement cambodgien a violé les responsabilités qui lui incombent en tant que signataire de la convention de 1951 des Nations unies sur - le statut - des réfugiés. Ce qui est le plus inquiétant, c'est la possibilité que ces vingt Ouïgours puissent être torturés ou discrètement exécutés une fois qu'ils sont de retour en Chine. "
Pékin avait prévenu mi-décembre que les bureaux de l'ONU à l'étranger ne devraient pas devenir des " havres pour criminels ", et précisé que le groupe de ces demandeurs d'asile a été impliqué dans des " activités criminelles ".
" Par la force "
A Washington, le porte-parole du département d'Etat américain, Gordon Duguid, a déclaré dimanche que les Etats-Unis sont " préoccupés " par la décision cambodgienne de renvoyer ces demandeurs d'asile qui avaient demandé " protection selon les lois internationales ". Il a ajouté que les Etats-Unis regrettent que le " gouvernement cambodgien ait choisi d'expulser ce groupe par la force sans avoir permis le recours à un processus crédible de vérification du bien-fondé de la demande de statut de réfugié, et sans permettre la participation du haut-commissaire des Nations unies pour les réfugiés ".
La décision de Phnom Penh a coïncidé avec l'arrivée, dimanche, au Cambodge du vice-président chinois Xi Jinping, probable successeur de l'actuel président Hu Jintao à la tête de la République populaire. M. Xi devrait signer à Phnom Penh, au cours de cette visite de trois jours, 14 contrats relatifs à des projets d'infrastructure. La Chine est le plus gros investisseur au Cambodge, où le montant de ses investissements directs s'élève à 4 milliards de dollars (2,8 milliards d'euros).
Le premier ministre Hun Sen a consolidé son emprise sur le pays en s'appuyant sur des hommes d'affaires sino-khmers qui ont leurs entrées en Chine. Le vice-premier ministre, Sok An, est d'origine chinoise, tout comme l'épouse du chef du gouvernement. Il est considéré comme l'un des relais sûrs de Pékin au Cambodge.
Bruno Philip
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1 commentaires:
Pour plus d'un million de dollars tout est possible..
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