En dévoilant sa stratégie politique en cinq points, le président chinois Hu Jintao a signalé que son administration était prête à jouer un rôle plus important - et peut-être plus constructif - sur la scène mondiale. Présentée par le magazine officiel Liaowang Xinwen Zhoukan comme "les points de vue sur notre époque" de Hu Jintao, cette vaste initiative se fonde sur cinq théories, concernant, respectivement, "les profonds changements [de la situation mondiale], la recherche d'un monde harmonieux, le développement conjoint, le partage des responsabilités et la participation active [aux affaires du monde]." Dans un récent magazine de l'agence officielle Xinhua, l'idéologue Zhang Xiaotong a estimé que les "points de vue" du chef du Parti communiste chinois représentaient une "innovation théorique majeure" fondée sur une "compréhension scientifique du développement et des changements actuels".
Selon le Pr Wang Yukai, du Collège national d'administration, la diplomatie nouveau style de Hu Jintao marque un tournant. C'est la première fois qu'un dirigeant chinois moderne présente un ensemble complet de théories doté d'une perspective internationale. Il estime que les "points de vue" pourraient "offrir un cadre théorique pour la participation future de la Chine aux affaires internationales". Pour le président chinois, dont les discours ont été analysés par Zhang Xiaotong, le monde moderne a connu des "changements historiques" et l'on peut en dire autant des relations de la Chine avec le reste du monde. Les Chinois vivent désormais dans une ère d'opportunités et de défis, mais "les opportunités sont plus nombreuses". Le "miracle économique" de la Chine a permis à la quatrième génération de dirigeants chinois, sous la direction de Hu Jintao, de rompre avec le célèbre credo diplomatique du patriarche Deng Xiaoping, selon lequel il valait mieux "adopter un profil bas et ne jamais se poser en leader" dans les affaires internationales.
Les "points de vue" du président ne sont pas tous nouveaux. Des cinq éléments de la vision du monde originale de Hu Jintao, les théories jumelles de la "responsabilité partagée" et de la "participation active" sont peut-être les plus significatives. Pour satisfaire l'impératif de "participation active", la manière dont Pékin s'acquitte de ses responsabilités internationales devra être en phase avec son statut de quasi-superpuissance. M. Zhang cite des passages saillants du discours que le président Hu a prononcé en décembre 2008 pour célébrer le 30e anniversaire de la réforme et de l'ouverture de la Chine. "L'avenir et le destin de la Chine contemporaine sont de plus en plus étroitement liés à ceux du reste du monde", avait-il alors déclaré. Le chef suprême avait ensuite exhorté les responsables du Parti et du gouvernement à adapter l'objectif de "maintien de l'indépendance et de la souveraineté" au contexte de la mondialisation afin que le pays puisse "contribuer à la paix et au développement de l'humanité".
Le Modèle de développement chinois n'est pas affecté
Bien entendu, il y a des limites à ce qu'un pays de 1,3 milliard d'habitants possédant des réserves de change de 2 200 milliards de dollars peut faire pour promouvoir l'harmonie et le développement. Selon l'une des cinq théories des "points de vue du président", "les diverses parties doivent respecter le principe de responsabilité partagée". Pékin insiste en effet pour que sa contribution soit en proportion de ce que les autres pays, en particulier les pays industrialisés et des ensembles régionaux comme l'Union européenne et les Etats-Unis, peuvent apporter à la richesse mondiale. Dans les discours cités par l'idéologue Zhang ou ses allocutions des dernières années, le président a insisté sur le fait que la participation de la Chine dans les affaires internationales n'affecterait pas son modèle de développement unique. Hu Jintao aime en effet rappeler que, dans le contexte de la mondialisation, les pays doivent se respecter et apprendre les uns des autres afin de "protéger le pluralisme mondial et la multiplicité des modèles de développement".
Le président chinois rappelle aussi à ceux qui le critiquent - aux Etats-Unis ou en Europe - que, malgré l'ouverture au monde de la Chine, le PCC ne se pliera jamais aux normes "occidentales" telles que la liberté d'expression ou le multipartisme. Par ailleurs, les relations de la Chine avec des Etats parias comme la Corée du Nord et l'Iran ont éveillé le soupçon qu'elle pourrait avoir tendance à placer ses intérêts nationaux au-dessus de la paix et du développement du reste du monde. Il incombe à Hu Jintao et à ses collègues de convaincre le monde que, même si la Chine veille avant tout à préserver ses "intérêts premiers" et ses engagements, sa "participation active" sera du moins en phase avec les idéaux de l'ONU.
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