PHOTO - Des hommes d'affaires prient pour la reprise de la croissance au temple Kanda de Tokyo, le 4 février 2010 / Getty Images.
Un malheur n'arrive jamais seul. Il y a quinze jours à peine, Japan Airlines déposait son bilan et annonçait la suppression d'un tiers de ses effectifs pour tenter d'éviter la faillite. C'est désormais Toyota, autre symbole d'une économie japonaise conquérante, qui est brutalement plongé dans la tourmente.
Numéro un mondial du secteur depuis 2008, champion de la qualité, de la sécurité et de l'innovation, le constructeur automobile nippon n'est pas seulement contraint de rappeler plus de 8 millions de véhicules dans le monde pour des problèmes de tapis de sol mal fixés et de pédales d'accélérateur imprécises; il fait en outre l'objet de plaintes, notamment aux Etats-Unis, sur la qualité du freinage de sa nouvelle Prius, modèle hybride et joyau technologique. Dès à présent, la réputation et les ventes de l'entreprise sont touchées; demain, ce seront ses marges.
Le coup est rude, tant les difficultés de Toyota, comme celles de Japan Airlines, sont symptomatiques des fragilités de l'économie japonaise et des doutes qui taraudent le pays en profondeur. En vingt ans, le Japon est passé du statut de nation hyperdynamique à celui d'un pays vieillissant, replié sur lui-même et timoré. Il devrait perdre, cette année, son rang de deuxième économie mondiale, au profit de la Chine.
Jamais vraiment remis du krach immobilier et financier qui l'avait ébranlé il y a vingt ans, l'archipel paraît condamné à une croissance anémique, une déflation endémique, un endettement public record, des inégalités et une précarité lancinantes. Et voilà que ses fleurons industriels, déjà confrontés à une concurrence de plus en plus féroce - sud-coréenne et chinoise notamment - se montrent défaillants sur ce qui faisait leur force.
De là à donner raison à ceux qui délaissent le Japon pour d'autres cieux asiatiques jugés plus prometteurs, il y a un pas qu'il serait pourtant imprudent de franchir trop vite. En dépit de ses difficultés, l'Archipel reste un leader technologique dans bien des domaines d'avenir, comme l'environnement et la robotique. Il demeure un creuset d'innovations unique au monde. En outre, la victoire du Parti démocrate du Japon aux élections de 2009 a mis un terme à un demi-siècle quasi ininterrompu de règne du Parti libéral-démocrate et témoigné d'une réelle volonté de renouvellement. Si la crise actuelle des fleurons de l'économie japonaise n'est pas nécessairement synonyme de déclin, elle appelle, en tout cas, de sérieuses mutations.
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