lundi 15 février 2010

Menacée de surchauffe, la Chine resserre sa politique monétaire

Les Echos, no. 20615 - International, lundi, 15 février 2010, p. 8

Inquiètes des risques de surchauffe et de bulles spéculatives, notamment immobilière, les autorités chinoises ont resserré, pour la deuxième fois depuis le début de l'année, leur politique monétaire.

Le nouveau resserrement de la politique monétaire chinoise opéré vendredi était attendu. Mais pas si tôt. La banque centrale de Chine a en effet annoncé un nouveau relèvement du taux de réserves obligatoires des banques, près d'un mois après la dernière hausse. Cette hausse de 0,5 point, qui prendra effet après la semaine fériée du nouvel an chinois, intervient alors que les autorités, inquiètes des risques de surchauffe et de bulles, cherchent à renforcer le contrôle du crédit.

Il est vrai que les nouveaux prêts accordés en janvier ont totalisé 1.390 milliards de yuans, un niveau équivalent à ceux délivrés pendant les trois derniers mois de l'année 2009. Consciente de ce dérapage, la banque centrale chinoise a opté pour un resserrement de sa politique monétaire dès la mi-janvier, alors que près de 1.000 milliards de yuans de prêts avaient déjà été émis en quinze jours. Cette dernière hausse, également de 50 points de base, a porté le montant des fonds que les banques doivent garder dans leurs coffres à 16 % de leurs dépôts pour les grandes et 14 % pour les plus petites. Il s'agit de réduire le montant des liquidités pouvant entrer dans le circuit du crédit.

« La Chine est confrontée à une accumulation extrêmement élevée et inquiétante des niveaux de liquidités dans l'économie », explique Hervé Liévore, stratégiste chez AXA IM. Les dernières statistiques publiées montrent en effet une très forte augmentation - 39 % -de la part la plus liquide de la monnaie en circulation. Or, du fait de la politique monétaire très accommodante menée par les autorités chinoises pour soutenir l'économie pendant la crise, les taux d'intérêt sont bas. Et, à cause d'une inflation qui pourrait atteindre 2 à 3 % d'ici à la fin du premier trimestre, les taux d'intérêt réels pourraient se révéler négatifs. Or, « quand le taux d'intérêt réel des dépôts est négatif, les ménages et les entreprises se tournent vers des actifs plus rémunérateurs tel que les actions et l'immobilier », explique Hervé Liévore. Et ils sont d'autant plus incités à le faire que l'argent liquide en circulation est en forte hausse.

Bulle immobilière à craindre

L'inquiétude se porte maintenant sur l'évolution des prix immobiliers. Ceux-ci ont augmenté de 9,5 % en janvier sur un an, faisant craindre l'éclatement d'une bulle. Toutefois « ces bulles reflètent une dynamique de rattrapage économique et doivent être relativisées par le fait que les revenus augmentent aussi très rapidement », temporise Hervé Liévore. Il relève quand même « un consensus assez large en Chine sur l'idée que l'économie est sortie de l'ornière et que cette politique qui consiste à favoriser l'investissement à tout prix devrait être remise en cause en 2010 ». Le gouvernement veut limiter à environ 7.500 milliards de yuans les nouveaux prêts pour 2010, soit une réduction de 20 % par rapport à ceux émis en 2009 mais une augmentation de 50 % par rapport à 2008.

JESSICA BERTHEREAU

Lire également l'éditorial de Jean-Marc Vittori

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