Arrêté il y a un an puis disparu, Gao Zhisheng « travaille à Urumqi », dans le Xinjiang.
Le 4 février 2009, l'avocat Gao Zhisheng avait été emmené par des policiers au cours d'une « descente » surprise à minuit dans son village natal de la province du Shaanxi, au sud-ouest de Pékin. Depuis, on n'avait plus entendu parler de lui. Coup de théâtre dimanche 14 février : l'ambassade chinoise à Washington a révélé à l'organisation des droits de l'homme américaine Dui Hua, spécialisée sur la Chine, que Me Gao « travaille à Urumqi », capitale de la province du Xinjiang, dans le nord-ouest chinois. C'est la première fois qu'une déclaration officielle lève le voile sur le mystère de la disparition de cet ancien membre du Parti communiste devenu défenseur des droits de ses concitoyens.
Aucune déclaration n'est encore venue étayer et préciser cette information depuis Pékin, le terme « travailler » pouvant laisser entendre que M. Gao est en camp de travail. Milieu janvier, le porte-parole du ministère des affaires étrangères chinois, Mao Zhaoxu, avait eu cette remarque sybilline : Gao Zhisheng « est là où il doit être ». Avant d'ajouter le 26 janvier, lors d'un autre briefing devant la presse : « Il y a 1,3 milliard de Chinois et je ne peux pas savoir ce qu'ils font tous »...
Me Gao est connu pour avoir défendu un large panel de personnes persécutées par le régime ou victimes des injustices du système : mineurs de fonds exploités, chrétiens des Eglises clandestines ou membres de la secte du Falun Gong, l'une des bêtes noires du régime. En 2006, il avait été une première fois arrêté et condamné à trois ans de prison avec sursis. A la suite de cette sentence, il avait été placé en résidence surveillée.
Cinq ans plus tôt, il avait cependant été distingué par le ministère de la justice comme l'un des dix meilleurs avocats de Chine pour son combat contre les abus frappant les paysans expropriés par des projets immobiliers, une pratique croissante qui inquiète les autorités et provoque souvent de violentes manifestations. Mais Me Gao avait fini par oser franchir la fameuse ligne rouge qu'il faut veiller à respecter en Chine : pas question de défendre des ennemis patentés du régime.
Licence supprimée
En 2005, son cabinet fut fermé manu militari et la licence de ses vingt avocats, supprimée. M. Goa répliqua en rendant sa carte du Parti communiste et en écrivant aux plus hautes autorités, demandant que soit mis fin à la répression contre les adeptes du Falun Gong. L'avocat a raconté que, durant les cinquante-quatre jours de sa détention, il avait été torturé - ses parties génitales ont été soumises à des chocs électriques - et battu quotidiennement par ses gardiens.
Interrogé en début du mois par le New York Times, le directeur de la Fondation Dui Hua, John Kamm, qui s'est fait connaître en négociant par le passé la libération de prisonniers politiques, a déclaré : « Désormais, la Chine estime qu'elle n'a de compte à rendre à personne en matière de droits de l'homme. »
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