Réfléchissons à la création d'un véritable Trésor de la zone euro
« Prenons garde aux fausses pistes »
Dans le remue-ménage d'idées qui accompagne le déroulement de la crise grecque, la pensée unique européenne a entrevu la possibilité d'une solution miracle : celle de la création d'un Fonds monétaire européen. C'est une fausse piste, qui va susciter des débats interminables et stériles. Voici pourquoi.
D'abord, la proposition initiale avancée par le ministre allemand des Finances a été vidée de la moitié de son contenu. En contrepartie des facilités de crédit que permettrait l'institution de ce fonds, des pénalités financières draconiennes seraient imposées aux Etats qui auraient laissé se dégrader leurs finances publiques. Or il ne semble pas qu'un accord des Vingt-Sept puisse être obtenu sur ces pénalités.
Ensuite, l'analogie verbale entre le Fonds monétaire international (FMI) et le Fonds monétaire européen (FME) repose sur une fausse similarité. Le FMI, institué dans l'immédiat après-guerre, est un instrument monétaire. Il est destiné à faire face aux difficultés que rencontrent les Etats pour assurer leurs paiements extérieurs lorsque leur balance des paiements se dégrade et menace leur monnaie. On leur prête alors à court terme les devises qui leur permettent de financer leurs achats, en contrepartie de mesures qui comportent généralement la dévaluation de la monnaie et une politique d'austérité financière et sociale.
Or la crise grecque n'est pas une crise monétaire, c'est une crise budgétaire intérieure, dans laquelle le risque pour l'Etat hellène est de ne plus pouvoir payer ses fonctionnaires, ses retraités et ses fournisseurs. Un fonds monétaire est évidemment hors du sujet. Sa création aurait pour conséquence d'affaiblir l'incitation à la bonne gestion des finances publiques et d'éloigner davantage l'Europe de son objectif de politique économique commune.
Ce qu'il y a lieu de faire, après les décisions courageuses prises par le gouvernement grec, auquel on ne peut pas demander d'aller plus loin, c'est de faciliter le placement des emprunts que devra faire la Grèce pour payer ses dépenses publiques et servir sa dette. C'est un problème de technique financière qui doit être traité avec sobriété et détermination par les Etats de la zone euro, dont, évidemment, la France et l'Allemagne, qui disposent des établissements publics appropriés pour le faire. Il suffit d'ailleurs qu'ils l'affirment clairement pour régler une partie du problème, car la spéculation internationale, qui harcèle la Grèce, battra alors prudemment en retraite, comme l'attestent les indicateurs du marché.
A plus long terme, la véritable initiative consisterait non dans l'institution d'un fonds monétaire, mais dans la création d'une agence de gestion de la dette souveraine de la zone euro, qui serait l'amorce d'un véritable Trésor de la zone euro. Nous en sommes évidemment encore loin, mais rien n'interdit de réfléchir à ce qui sera un jour le complément naturel de la monnaie unique.
Le festival mondial de la pollution
J'ai été flashé à 120 km/h sur l'autoroute A75, à hauteur du village de Vieillespesse, dans le Cantal. Bien que l'autoroute ne traverse à cet endroit aucune agglomération, la vitesse y est limitée pour des raisons mystérieuses à 110 km/h. J'ai donc été pénalisé de deux points sur mon permis pour avoir contribué au réchauffement de la planète. En reprenant mon parcours, j'ai écouté la radio. Au milieu d'un vrombissement assourdissant, le journaliste décrivait, sur un ton exalté, les péripéties de la course de formule 1. Il frémissait de joie à la pensée que le record de vitesse du tour venait d'être battu à plus de 280 km/h ! J'imaginais les nuages de fumée bleue qui s'élevaient au-dessus du circuit.
Les téléspectateurs installés dans leur fauteuil, les organisateurs coiffés d'une casquette de base-ball, les financiers du système au portefeuille arrondi suivaient avec délice le déroulement de ce festival mondial de la pollution, contre lequel je n'ai entendu aucune voix vertueuse s'élever.
Et, demain matin, la jeune femme qui conduira ses enfants à l'école, sur une route de campagne, en roulant à 95 km/h se verra infliger une amende.
C'est bien normal : elle contribue au réchauffement de la planète !
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