mercredi 14 avril 2010

Pékin souffle le chaud et le froid avec les États-Unis - Arnaud Rodier

Le Figaro, no. 20435 - Le Figaro Économie, mercredi, 14 avril 2010, p. 22

La Chine impose des droits de douane sur l'acier alors même qu'elle discute avec Washington.

Deux pas en avant, un pas en arrière. Pendant qu'à Washington le président Hu Jintao plaidait pour que la Chine et les États-Unis résolvent leurs « frictions économiques et commerciales par des consultations sur un pied d'égalité », à Pékin le ministère du Commerce annonçait hier avoir imposé des droits de douane sur un type particulier d'acier électrique produit par les États-Unis et la Russie en réponse aux restrictions imposées sur les tuyaux chinois. Les importateurs devront payer des droits antidumping allant jusqu'à 64,8 % pour les produits américains. La décision est entrée en vigueur dimanche dernier.

En façade, les deux pays font assaut d'amabilité, mais en coulisses le bras de fer continue. Quand le président Barack Obama demande à la Chine de mettre en place un taux de change « plus respectueux du marché » et de réévaluer le yuan, Hu Jintao feint de ne pas l'entendre. Or même la Banque asiatique de développement (BAD), qui vient de publier son rapport sur l'Asie en développement pour laquelle elle prévoit une croissance de 7,5 % cette année, l'enjoint de le faire.

« Maintenant que l'économie mondiale reprend, cela serait dans l'intérêt de la Chine, mais aussi dans celui des économies de la région de passer progressivement à une plus grande flexibilité du taux de change », écrit la banque. Et d'ajouter que la Chine doit aussi réformer son système social pour permettre aux ménages de dépenser plus. « Mettre plus l'accent sur la consommation privée devrait promouvoir la croissance économique et élever le niveau de vie », précise-t-elle en soulignant que la part de la consommation des ménages dans le produit intérieur brut (PIB) a baissé de 15,8 % au cours des vingt dernières années.

Réévaluation fin juin

La Chine sait qu'elle est sous pression, non seulement de la part des États-Unis et de l'Europe mais encore des autres pays d'Asie. Elle tire la croissance de ces derniers en même temps qu'elle leur fait peur. Elle est également confrontée à une flambée des prix de l'immobilier dans les grandes villes et à un retour galopant de l'inflation qu'elle doit absolument endiguer.

Hu Jintao devra trancher un jour ou l'autre. Probablement plus rapidement qu'on ne le croit. Une douzaine d'analystes financiers sur dix-neuf, interrogés hier par l'agence Bloomberg, se disent persuadés que la Chine réévaluera le yuan au plus tard le 30 juin prochain.

Mais le président chinois a, malgré cela, répété à Barack Obama que son pays prendrait sa décision seul. « Tout infléchissement de la politique monétaire chinoise devra être fondé sur ses propres besoins en matière de développement économique et social, et rien d'autre », insistait hier l'agence officielle Xinhua.

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