Les investisseurs étrangers redoutent de voir les autorités favoriser les groupes domestiques. Près de Pékin, une PME française se bat contre une société tentant d'usurper son identité.
Non loin de la ville de Tianjin, Guillaume Bernard, le directeur général du groupe français L Bernard en Chine, a découvert, il y a quelques mois, au milieu de la campagne, une usine portant son nom et proposant des copies des servomoteurs électriques produits par sa PME familiale dans leurs usines de Gonesse et de Pékin. Si elle est habituée depuis des années à voir des concurrents tenter de copier ses produits utilisés dans des centrales électriques, des raffineries ou encore des usines de traitement des eaux, l'entreprise se retrouve pour la première fois confrontée à un homme d'affaires osant affirmer qu'il est le vrai représentant du groupe français. « Lors des appels d'offres, il va voir les clients et leur explique que nous ne sommes que des contrefacteurs », souffle le responsable, qui se voit régulièrement subtiliser des commandes pour l'équipement de centrales thermiques. « Il n'ose pas aller dans le nucléaire où les clients réalisent des audits et exigent des qualifications très pointues mais il peut abuser des sociétés de moindre ampleur », détaille-t-il. Sur son propre site Internet, le patron chinois met ainsi en scène son supposé réseau international et s'attarde sur l'histoire de sa société qui serait née d'un partenariat avec un mystérieux industriel hexagonal « Bernard France ». Il exhibe même une véritable licence de coentreprise sino-étrangère. « Les clients n'ont dès lors aucune raison de se méfier », constate Guillaume Bernard, qui a saisi, il y a tout juste un an, un tribunal de Tianjin pour tenter de mettre fin à ces activités qui portent préjudice à l'image de sa marque. Préparant il y a quelques jours la visite d'Etat de Nicolas Sarkozy, qui commence aujourd'hui à Pékin, Anne-Marie Idrac, la secrétaire d'Etat au Commerce extérieur, avait évoqué le dossier avec les autorités de Tianjin qui ont, depuis, « encouragé » le juge à accélérer ses investigations.
Protection des marques
Touchant des dizaines de groupes français dans le pays, ces affaires de contrefaçon pèsent sur l'optimisme des investisseurs qui ont vu, l'an dernier, les géants Danone et Schneider abdiquer dans des affaires rocambolesques où leur bonne foi avait pourtant été reconnue par des experts indépendants. « Avec la crise, le pays a pris confiance en lui et a eu tendance à plus favoriser encore ses propres sociétés », explique un entrepreneur français, qui vient de se voir imposer des hausses de charges sociales rétroactives, non appliquées à ses concurrents domestiques.
Malgré ces difficultés, les groupes étrangers continuent tous de parier massivement sur la Chine. Sur les trois premiers mois de l'année, les investissements directs étrangers ont encore progressé, en glissement annuel, de 7,7 %. « Il y a des problèmes isolés, c'est vrai. Mais il ne faut pas en faire une généralité. La grande majorité de nos interlocuteurs respectent les droits de propriété intellectuelle », modère Guillaume Bernard, qui a depuis considérablement renforcé la protection de ses marques et brevets dans le pays. « En Chine, il faut être irréprochable car ici tous vos défauts ressortent très vite. »
0 commentaires:
Enregistrer un commentaire