jeudi 6 mai 2010

Des tueries dans des écoles terrorisent la Chine - Philippe Grangereau

Libération, no. 9012 - Monde Expresso, mercredi, 5 mai 2010, p. 7

Psychose . En un mois et demi, quatre établissements scolaires ont été attaqués par des deséquilibrés. Treize enfants sont morts.

Une véritable psychose s'est emparée des jardins d'enfants et des écoles maternelles et primaires chinoises. En l'espace d'un mois, au moins quatre de ces établissements ont été le théâtre de carnages, perpétrés par des individus attaquant à l'arme blanche des bambins parfois à peine âgés de 4 ans. Au moins treize enfants ont été assassinés et des dizaines d'autres blessés, parfois grièvement, ainsi que quelques enseignants qui tentaient de les défendre.

Depuis hier, la police de plusieurs villes a ordre d'ouvrir le feu sur quiconque tenterait de s'en prendre à des écoliers. A Pékin, les policiers ont même équipé 200 écoles de barres métalliques en forme de fourche conçues pour tenir en respect un éventuel agresseur.

Tout a commencé le matin du 23 mars, à 7 h 30 : Zheng Minsheng, un ex-chirurgien de 41 ans, pénètre dans une salle de classe de l'école primaire de Nanping, dans la province du Fujian. A l'aide d'un «couteau à pastèque», il tue en peu de temps et de manière presque professionnelle quatre fillettes et quatre garçons, et en blesse cinq autres. Il déclare aux juges que son geste, «intentionnel», avait été motivé par ses déboires et «parce que la vie n'a pas de sens». Pour l'agence Chine nouvelle, cet homme sans passé psychiatrique est un «paumé arrivé à la quarantaine sans emploi ni femme». Il sera fusillé le 28 avril. Le jour même, un homme de 33 ans souffrant de problèmes psychiatriques blesse au couteau quinze élèves d'une école de Leizhou, au Guangdong, puis tente de se défenestrer.

Le lendemain, un agent d'assurance au chômage, âgé de 47 ans, se livre à un carnage dans un jardin d'enfants de Taixing, dans la province du Jiangsu. Il blesse au couteau de cuisine 25 enfants et adultes et en tue quatre. L'établissement est fréquenté par les familles aisées. «Je voulais me venger de la société», confiera l'agresseur à la police.

Vendredi, c'est un fermier de 45 ans qui frappe au marteau des enfants d'une école à Weifang, dans la province du Shandong. Il en tue un et en blesse cinq avant de s'immoler par le feu avec de l'essence. Il venait d'être expulsé de sa maison par la municipalité.

Comment expliquer cette épouvantable série de massacres dans des villes très éloignées les unes des autres ? Pour les autorités, la place accordée à ces «incidents» par les médias joue un rôle incitateur pour des «déséquilibrés». Mais, relève le China Daily, Dans certaines provinces, seuls 3% des malades mentaux sont médicalement suivis. Et en Chine, où les pressions sociales sont immenses, le suicide-meurtre est un phénomène connu. Dans les années 80, lorsque la dynamite était facile à acheter, il ne se passait guère de mois sans qu'un individu se fasse exploser dans une gare ou un lieu public, tuant autour de lui de nombreuses personnes. Plus de 63% des Chinois, selon un sondage publié dans Le Quotidien des lois, Attribuent ces actes au «fossé grandissant entre les riches et les pauvres». Ni Jianping, directeur d'un institut de recherche, évoque quant à lui «une forme de terrorisme social».

PHOTO - A Chinese police officer demonstrate the use of a "police restraint stick" long-handled poles with a hook on the end, to subdue a man playing the role of an attacker at a middle school in Beijing Thursday, April 29, 2010. Security measures have been stepped up after a spate of attacks on schools over the past three days. (AP Photo) ** CHINA OUT.

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