Les États-Unis tentent de rallier Pékin aux manoeuvres en cours contre Pyongyang.
Une fois de plus, le trublion nord-coréen aura réussi à bousculer le calendrier des puissants. Venue à Pékin pour discuter rééquilibrage économique et nucléaire iranien, Hillary Clinton s'est vue hier dans l'obligation de concentrer son énergie sur la nouvelle crise ouverte par Pyongyang, avec le torpillage de la corvette sud-coréenne Cheonan. Au premier jour du deuxième dialogue stratégique et économique avec la Chine, elle a tenté de rallier Pékin aux grandes manoeuvres en cours pour punir la Corée du Nord. Avec un résultat qui semble pour l'heure mesuré.
La secrétaire d'État américaine, qui doit se rendre mercredi à Séoul, a affirmé « travailler dur pour éviter l'escalade ». Des propos tenus après le discours musclé du président sud-coréen Lee Myung-bak, qui a annoncé son intention de « faire payer le prix » de son agression à son voisin nordiste. Il a suspendu les relations commerciales et exigé des « excuses immédiates » de Pyongyang, qui nie toujours son implication dans le drame qui a coûté la vie à 46 marins sud-coréens. Lee Myung-bak a aussi prévenu que Séoul invoquerait le droit à l'autodéfense si jamais les Nord-Coréens l'attaquaient à nouveau. Comme on s'y attendait, il a aussi annoncé que le dossier serait porté devant le Conseil de sécurité de l'ONU, dans l'espoir de faire adopter de nouvelles sanctions. Une démarche que Washington et Tokyo ont déjà affirmé soutenir. De son côté, avec sa rhétorique traditionnelle, la Corée du Nord a menacé d'une « guerre totale » en cas de représailles.
Une 4e étoile pour le général
À Pékin, Hillary Clinton a assuré que les Chinois reconnaissent « la gravité de la situation » et « notre responsabilité unique envers la paix et stabilité de la péninsule nord-coréenne ». Pour l'heure, la Chine s'est démarquée de la communauté internationale, refusant de condamner l'agression, se contentant de déplorer la mort des marins sud-coréens et appelant « à la retenue » toutes les parties. Elle n'a pas endossé les conclusions de l'enquête sud-coréenne - à laquelle ont participé des experts américains et britanniques - et déclaré qu'elle ferait sa propre « évaluation ». Pékin doit pourtant avoir quelques idées sur la question, et le président Hu Jintao a eu le loisir de parler les yeux dans les yeux de l'affaire à Kim Jong-il lors de sa visite en Chine au début du mois. En 2009, les dirigeants chinois avaient permis l'adoption de résolutions de l'ONU condamnant un essai nucléaire nord-coréen.
Cette « responsabilité » des États-Unis, le président américain a fait savoir par un communiqué très ferme diffusé au milieu de la nuit qu'il entendait pleinement l'exercer. De manière solennelle, Barack Obama a ordonné aux généraux de l'armée américaine de « travailler étroitement » avec les Sud-Coréens pour « dissuader toute nouvelle agression » de la part de Pyongyang. Et demandé une « révision » de la politique américaine vis-à-vis de la Corée du Nord. Dans le même temps, à Washington, la presse faisait état d'un nouveau rapport du renseignement américain mettant directement en cause le leader nord-coréen. Une certitude plus fondée sur une « analyse » que sur des « preuves ». La responsabilité du « cher leader » serait attestée par sa visite, le 25 avril, de l'« unité 586 », qui serait responsable de l'attaque. À la même période, le général Kim Myong-guk, qui aurait joué un rôle clé dans l'affaire, aurait reçu une quatrième étoile.
Selon le document américain, Kim Jong-il aurait ordonné l'attaque pour réaffirmer son pouvoir, après avoir été affaibli par son accident cérébral de l'été 2008, et asseoir la légitimité de son fils et héritier politique Kim Jong-un. Dans un premier temps, sa grande réussite aura été d'éclipser l'Iran, dossier sur lequel Hillary Clinton aurait pourtant bien voulu faire avancer les choses à Pékin.
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