La glissade de l'euro va-t-elle se poursuivre ?
Pas à court terme. Des facteurs techniques devraient favoriser un rebond de la devise européenne dans les prochaines semaines. La crise grecque est à l'origine de la chute de l'euro. Elle fait douter de la solidité de la devise européenne et de la cohésion de la zone euro. Les atermoiements pour aider la Grèce amènent à s'interroger sur la volonté même des Etats de poursuivre la construction européenne. Les déclarations maladroites de responsables allemands évoquant la possibilité d'exclure ce pays de la zone euro ont jeté un froid. Dans ce contexte, beaucoup d'investisseurs se sont réfugiés sur le dollar. Mais la décision prise en avril d'enclencher le mécanisme de soutien de l'union économique et monétaire et du Fonds monétaire international (FMI) va progressivement apaiser les inquiétudes et l'euro en profitera.
Dans quelle mesure le plan de sauvetage de 110 milliards d'euros annoncé par l'Europe et le FMI change-t-il la donne ?
Il devrait favoriser un rebond de la devise européenne. Certes, les premières réactions des marchés montrent que les investisseurs ne sont pas complètement rassurés par les mesures annoncées. Le consensus semble toujours tabler sur une inévitable restructuration de la dette publique grecque en 2011 ou en 2012. Les investisseurs semblent aussi attendre de voir la Grèce rembourser son obligation arrivant à échéance le 19 mai.
Ils vont ensuite rester particulièrement vigilants sur la mise en oeuvre de son programme de réduction des déficits publics. Toutefois, en l'absence de mauvaises nouvelles supplémentaires, l'aversion au risque devrait diminuer progressivement. Le dollar perdrait alors son statut de refuge et l'euro retrouverait des couleurs.
L'euro est-il aussi victime de la vigueur retrouvée du dollar ?
Le rebond de l'activité a été sensible au quatrième trimestre 2009 aux Etats-Unis. Cette tendance devrait se confirmer au premier trimestre 2010. La reprise économique est plus rapide et plus vigoureuse outre-Atlantique qu'en Europe, ce qui rend les actifs américains libellés en dollars plus attractifs pour les investisseurs. Cette perspective est favorable au billet vert, même si le poids des déficits budgétaires et commerciaux reste considérable aux Etats-Unis.
Comme la Réserve fédérale américaine (Fed) relèvera ses taux directeurs avant la BCE, l'écart de taux entre la zone euro et les Etats-Unis va se réduire. A moyen terme, cela plaide en faveur d'une poursuite de l'affaiblissement de la devise européenne face au dollar.
Jusqu'où peut tomber l'euro ?
A court terme, un point bas a sans doute été atteint. L'euro devrait remonter vers 1,35 - 1,37 dollar à horizon de trois mois. Au-delà, en revanche, les investisseurs vont revenir vers des déterminants plus " traditionnels " des mouvements de taux de change. La devise européenne va recommencer à se déprécier, en particulier face au dollar. D'ici un an, l'euro pourrait revenir à 1,20 dollar.
Où faut-il investir ?
Pour les investisseurs de la zone euro, la baisse de la devise européenne sera neutre, bien sûr. Mais l'endettement massif d'un grand nombre de pays va peser sur la croissance mondiale dans les prochaines années. Dans ce contexte, les pays émergents, la Chine en tête, cherchent à stimuler leur demande domestique pour compenser le ralentissement de leurs exportations. Mais il faudra du temps pour que le consommateur chinois se substitue au consommateur américain comme moteur de l'économie mondiale.
Propos recueillis par J. Po.
Jean-Louis Mourier, économiste chez Aurel BCG
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