La division horlogerie-joaillerie du numéro un mondial a connu un fort redressement de ses ventes au premier semestre de cette année (+28%). Décryptage avec le directeur général de cette entité, Philippe Pascal
Philippe Pascal, directeur général du pôle horlogerie-joaillerie du groupe français LVMH, livre son analyse sur la santé du secteur. Après avoir essuyé un fort déclin l'an passé, la rédemption de la branche semble confirmée. Cette division du numéro un mondial du luxe, comprenant parmi d'autres les marques suisses Zenith, Tag Heuer et Hublot, a affiché des ventes en hausse de 28% sur le premier semestre, à 443 millions d'euros (soit 605 millions de francs).
Le Temps: Comment expliquer ce fort rebond?
Philippe Pascal: Toutes nos marques horlogères et joaillières enregistrent une progression du chiffre d'affaires à deux chiffres. Nous bénéficions du double effet de la hausse de nos ventes au client final et d'une reconstitution de stock chez les détaillants horlogers qui avaient fortement déstocké en 2009. Sur notre croissance horlogère semestrielle, ces deux effets sont à peu près comparables, mais celui du restockage est plus réduit sur le deuxième trimestre.
- L'optimisme du client est-il vraiment de retour ou est-ce un simple effet de base par rapport à un premier semestre 2009 cacochyme?
- Il y a en fait quatre effets dans ces chiffres: la reprise de la demande des clients finaux, la reconstitution de stocks des détaillants, un comparatif facilité par un premier semestre 2009 très difficile (ndlr, -17% pour cette division) et aussi un effet devises plus favorable. Nous restons très prudents sur la reprise de confiance des consommateurs, en Europe et en Amérique du Nord notamment, et sur la volatilité des marchés financiers.
- Quels ont été les principaux marchés de croissance?
- Tous nos marchés sont en croissance, même le Japon qui progresse de 5% en yen. En monnaies locales, les Etats-Unis ont augmenté de 34%, l'Asie de 45% et la Chine de 90%, l'Europe de 12% et le Moyen-Orient de 23%.
- Les Etats-Unis se redressent-ils vraiment?
- Dans ce pays, nous avons clairement un effet de restockage de la distribution, notamment très confiante sur Tag Heuer, ainsi que la reprise de la demande des clients. Par ailleurs, une marque comme Hublot y connaît une très forte accélération et est encore souvent en rupture de stocks. Mais la lecture du marché global reste délicate avec les faillites de certaines chaînes de distribution. Par ailleurs, des phénomènes de discount important sont encore observables soit du fait de détaillants en difficulté, soit du fait de la fermeture de points de vente par certaines marques qui ne reprennent pas leur stock et s'exposent ainsi au bradage.
- La Chine confirme-t-elle son statut d'eldorado du luxe?
- Oui, la Chine continue à progresser. Pour nous, qui y sommes encore peu développés, c'est une opportunité de croissance que nous préparons avec des investissements marketing et humains accrus. Aujourd'hui, ce pays ne représente que 3% de notre activité. Nous y aurons en fin d'année environ dix boutiques pour Tag Heuer, six pour Chaumet, deux pour Hublot et deux pour Zenith, en plus des points de vente multimarques. Ce parc sera au moins doublé en trois ans. Il faut rester sélectif et méthodique en Chine.
- Comment se présente le deuxième semestre?
- Je ne livre pas de prévision, sachant que l'effet restockage de la distribution est probablement terminé pour notre industrie.
- Quels sont vos objectifs de marge pour cette année, alors que votre bénéfice opérationnel a progressé de 145% sur un an?
- Notre marge opérationnelle est passée de 6 à 11% sur le premier semestre, grâce notamment au redressement de Zenith. La progression sur le second semestre sera moindre, car nous poursuivons nos investissements sur le plan industriel, marketing et commercial. Notre marge devrait néanmoins rester au même niveau sur le second semestre.
- Par rapport à des groupes comme Swatch Group ou Richemont, votre portefeuille de marques n'est pas aussi étoffé. Des projets d'acquisition?
- Même si j'avais une réponse à vous donner, je pourrais difficilement la partager. Mais je rappelle que notre priorité reste la croissance organique de nos marques et que ce n'est pas leur nombre qui fait la force d'un groupe. Hublot nous a rejoints en 2008 et poursuit son accélération, Tag Heuer a repris sa croissance et poursuit sa montée en gamme, Zenith s'est recentré énergiquement et croît fortement, alors que nos marques joaillières améliorent significativement leurs résultats. Tout ceci doit être consolidé et dispose d'un fort potentiel de croissance organique.
Propos recueillis par Bastien Buss
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