Il plane en ce moment une atmosphère de protectionnisme un peu partout dans le monde. Mais une chose est sûre, les investisseurs, eux, ne peuvent être soupçonnés de ce mauvais réflexe.
Peu soucieux du " Buy America " (achetez américain) ou de la défense du " made in France " en Bourse, les Européens comme les Américains préfèrent acheter chinois. " Ajouter "Chine" à côté du nom de n'importe quelle entreprise et vous verrez son cours de Bourse s'envoler ", notent les analystes de l'agence Bloomberg. L'effet Chine est presque magique, comparable selon eux à l'impact d'une déclaration positive de Warren Buffett, le gourou des marchés, ou au mot " sexe " : " Cela fait vendre ", observe Bloomberg.
La preuve ? La Bourse chinoise d'Hongkong, plus ouverte aux investisseurs étrangers que celle de Shanghaï, a dépassé vendredi 8 octobre en séance le seuil des 23 000 points, un plus haut depuis deux ans, engrangeant un gain de 2,62 % sur la semaine. Et c'est à Hongkong et non à Milan, que le groupe italien de luxe Prada envisage de faire son entrée en Bourse, comme l'a déclaré mercredi 6 octobre, un porte-parole de la marque. " Prada est susceptible de lever plus de capitaux si elle choisit Hongkong plutôt que Milan ", a glissé un proche du dossier.
L'attirance des investisseurs pour la République populaire est d'autant plus vive que les craintes d'un ralentissement brutal de la croissance du pays, jusqu'ici explosive, s'estompent. Certes les autorités mettent un coup de frein à la spéculation immobilière et à la distribution de crédits, mais les experts sont moins nombreux à penser que ces mesures se traduiront par un coup d'arrêt porté à économie.
Le Fonds monétaire international (FMI) n'a-t-il pas annoncé cette semaine que la croissance chinoise resterait supérieure à 10 % en 2010 et autour de 9,6 % en 2011 ? Ce chiffre, comparé à celui de la croissance languissante de l'Europe et des Etats-Unis, explique à lui seul que les investisseurs soient peu excités par les marchés occidentaux.
Sur la semaine écoulée entre le lundi 4 et le vendredi 8 octobre les places de Paris, Londres et New York ont ainsi évolué sans grande conviction parvenant toutefois à gagner quelques points : 1,93 % pour le CAC 40, 1,16 % pour le Footsie de Londres et 1,63 % pour le Dow Jones à New York.
Mais la situation ne s'améliore pas franchement. Ni en Europe, où la croissance déjà molle pourrait encore faiblir du fait de la montée de l'euro. Ni outre-Atlantique, où les destructions d'emplois se poursuivent (- 95 000 en septembre).
Toutefois, les multinationales cotées à Paris, Londres et New York, savent tirer profit de l'engouement pour la Chine. Trimestre après trimestre lors de la présentation de leurs résultats, leur discours se rode. En résumé, " la situation n'est pas terrible sur leur marché domestique, mais qu'est-ce que ça va bien en Chine où elles ont ou vont investir ", observe Jean-Louis Mourier, analyste chez Aurel BGC.
A Wall Street, Yum ! Brands, la maison mère de Pizza Hut, Taco Bell et KFC, a été explicite à ce sujet. Alors que ses résultats trimestriels ont été stables aux Etats-Unis et en forte hausse en Chine, le groupe a annoncé que les ouvertures de fast-foods, se passeraient avant tout en Chine. " Le marché chinois explose de tous les cotés ", a expliqué Jonathan Blum le porte parole de Yum ! Brands.
Mais les champions de la communication pro-Chine sont sans doute les constructeurs automobiles. De fait, le pays est devenu le premier marché mondial du secteur. Ceux qui sont présents dans cette zone ne le regrettent pas : en septembre, les ventes de Mercedes se sont envolées (+ 98 %), comme celles de BMW (+ 89 %) et d'Audi (+ 45 %).
Quant à ceux qui ne sont pas encore implantés en République populaire, ils promettent d'y aller. " Nous irons un jour en Chine avec Renault ", a ainsi déclaré Carlos Ghosn, PDG du groupe dans un entretien au Monde du 30 septembre.
Claire Gatinois
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