mardi 9 novembre 2010

Accès aux terres rares : le patronat tire la sonnette d'alarme - Laurence Boisseau

Les Echos, no. 20801 - Marchés, mardi, 9 novembre 2010, p. 31

Des fédérations patronales des pays développés appellent le G20 à sécuriser l'approvisionnement. La Chine contrôle 97 % de la production mais seulement la moitié des réserves. D'autres sources d'approvisionnement sont donc possibles.

Alerte rouge. « Sans libre accès aux terres rares, les efforts mondiaux contre le réchauffement climatique, pour l'innovation et la croissance mondiale seront fortement compromis. » A quatre jours du G20, les industriels, qui tirent régulièrement la sonnette d'alarme sur le sujet ont décidé de rappeler aux gouvernements à quel point l'approvisionnement en terres rares était vital pour les économies occidentales.

D'abord, parce que ce groupe de 17 métaux possèdent des propriétés uniques, notamment en électromagnétisme, qui les rendent utiles dans de nombreuses applications (fabrication de missiles, de produits électroniques de grande consommation, conception de produits issus de la technologie verte, comme les batteries pour les voitures électriques). Ensuite, parce que dépendre d'un fournisseur unique, la Chine, qui contrôle 97 % de la production et décide, selon son bon vouloir et selon sa propre consommation, combien de kilogrammes de ces métaux seront livrés ou non aux pays tiers n'a rien de confortable. D'autant qu'au cours des trois dernières années, la Chine n'a cessé d'abaisser ses quotas d'exportation et a même bloqué en septembre dernier ses ventes vers le Japon, gros consommateur pour l'électronique. Ce qui a provoqué une véritable flambée des prix : entre janvier et août 2010, le samarium s'est envolé de 700 % par exemple.

Parvenir à discipliner l'empire du Milieu relève de la mission impossible. En revanche, diversifier les sources d'approvisionnement est plus qu'envisageable. Le terme de « rares » est usurpé. Ces minerais existent un peu partout mais leur degré de concentration dans la croûte terrestre est très inégal. « Il y a vingt ans, les Etats-Unis étaient le premier producteur de terres rares grâce à la mine de Mountain Pass en Californie. Progressivement, l'exploration de cette dernière a été abandonnée dans les années 1990. La Chine arrivait à produire à des coûts plus compétitifs et le monde occidental n'avait pas pris conscience de leur intérêt stratégique », rappelle Dominique Casaï, cofondateur d'Uram, société de gestion spécialisée dans les matières premières à Genève qui gère un fonds dédié aux métaux nécessaires aux technologies vertes.

Gisements américains, australiens

« Si la Chine détient la moitié des réserves en terres rares, ces métaux sont également présents en Amérique du Nord, dans les ex-pays de l'Union soviétique, en Australie et au Brésil. A brève échéance, au moins deux sociétés devraient faire leur entrée en scène : l'américain Molycorp Minerals, qui a racheté la mine de Mountain Pass et qui souhaite la rouvrir prochainement, et Lynas Corp. qui a prévu d'exploiter le Mount Weld, un gisement de terres rares dans l'Ouest australien », ajoute-t-il. Ces sociétés ne sont pas les seules à être actives. Avalon Rare Metals devrait aussi exploiter un gisement très important au Canada, dans les Territoires du Nord-Ouest. D'ici à 2015, la production de terres rares pourrait avoir un tout autre profil. D'autant que consommateurs et politiques ont tous deux envie que de tels projets se développent et prospèrent.

LAURENCE BOISSEAU

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