lundi 29 novembre 2010

La Chine, locomotive de la croissance de Cartier - Valérie Leboucq


Les Echos, no. 20814 - Industrie, lundi, 29 novembre 2010, p. 21

Quarante ans après l'ouverture de sa première boutique à Hong Kong, le joaillier fleuron du groupe Richemont est en passe de faire de la Chine son premier marché.

L'inauguration avec feu d'artifice de son nouveau navire amiral à Hong Kong, symbolise bien les perspectives de croissance de Cartier en Chine. Etablie à Shanghai dès 1992, la marque compte 34 boutiques sur le continent à ce jour. Plus qu'au Japon ou aux Etats-Unis.

A ces boutiques en propre s'ajoutent, pour l'horlogerie, un réseau de 117 points de vente, dont 60 revendeurs agréés. Le rythme des ouvertures suit la hausse du nombre des milliardaires et celle du niveau de vie d'une classe moyenne estimée à plus de 200 millions de personnes. Après les métropoles côtières, c'est au tour des villes de l'intérieur de découvrir les joies de la consommation. Nigel Luk, le patron de Cartier Asie Pacifique compare la situation de son pays à celle des Etats-Unis au début du XXe siècle : « Le critère démographique n'est pas le seul pour décider d'une implantation. Nous tenons compte aussi de l'évolution du prix au mètre carré, de l'existence d'un aéroport susceptible de drainer des touristes ainsi que de la qualité de la distribution. » Ainsi Chonging, la métropole la plus peuplée du pays avec pas loin de 40 millions d'habitants n'a-t-elle qu'une seule boutique Cartier contre 12 à Pékin. Il faut dire que 80 % de ses habitants sont encore des paysans avec peu de moyens.

Amateurs de bijoux et de belles mécaniques horlogères, les clients chinois ont des attentes de plus en plus sophistiquées, relève encore Nigel Luk. « Ils veulent tout savoir de l'histoire de la marque et de ses créations les plus emblématiques comme la bague Trinity, le bracelet Love ou la montre Pasha. » Cartier a frappé un grand coup l'an dernier en exposant ses créations au musée de la Cité interdite.

Maîtriser la distribution

A Hong Kong, la marque a joué les pionniers en ouvrant sa première boutique en 1970. Elle en a neuf aujourd'hui. L'assouplissement des règles de circulation entre le continent et l'ancienne colonie britannique a beaucoup contribué à développer les échanges entre les deux. Les touristes continentaux représentent de 45 % à 50 % du nombre total des visiteurs de l'île contre de 8 % à 15 % il y a cinq ans. « L'Asie, hors Japon et Inde, représente 32 % du chiffre d'affaires de Richemont. Hong Kong, dont la population a doublé en trois ans, est devenue notre premier client », explique Alain Li, responsable de la zone Asie-Pacifique du groupe. Ses 17 marques y totalisent une soixantaine de boutiques. L'objectif de Richemont est de consolider sa distribution en réduisant le nombre des revendeurs. Pour Cartier, il devrait passer de 17 à 12 d'ici à deux ou trois ans à Hong Kong. Son PDG, Bernard Fornas, rappelle que la maîtrise de la distribution est le seul moyen pour les marques de contrebalancer les effets déstabilisants des variations monétaires. « Nous ajustons nos prix mondiaux plusieurs fois par an, mais cela ne suffit pas à nous prémunir de la baisse brutale des devises poussant les clients à se déplacer pour acheter ailleurs à meilleur compte », constate -t-il. De même dans un pays en crise, certains distributeurs sont tentés de vendre à des circuits parallèles « avec le risque de voir ses produits vendus n'importe où et n'importe comment. C'est très mauvais pour l'image et la désirabilité de la marque », dit-il.

Valérie Leboucq

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