mercredi 17 novembre 2010

L'Irlande et la Chine font chuter les marchés - Laurence Boisseau

Les Echos, no. 20806 - Marchés, mercredi, 17 novembre 2010, p. 34

Les tensions sur les dettes souveraines et les mesures annoncées par Pékin pour contrôler l'inflation ont pesé sur tous les grands indices boursiers, de Shanghai à New York où l'indice Dow Jones a perdu 1,59 % en clôture.

Sauvetage de l'Irlande en suspens, crainte d'un nouveau tour de vis monétaire en Chine. L'environnement n'était guère favorable aux marchés boursiers hier. De fait, les places de Paris, Londres et Francfort ont perdu respectivement 2,63 %, 2,38 %, et 1,87 %. New York a suivi le même chemin : l'indice Dow Jones a terminé sur un recul de 1,59 %. La journée avait très mal débuté, avec un plongeon de 3,98 % à Shanghai.

Les marchés étaient condamnés à attendre les solutions proposées par les ministres des Finances européens, qui devaient se réunir dans la soirée pour éviter une diffusion de la crise des dettes souveraines aux « maillons faibles » de la zone euro. En Irlande, la situation des banques et l'ampleur du déficit public suscitent des inquiétudes grandissantes, faisant craindre un effet de contagion au reste de l'union monétaire. Les tensions restent vives sur les primes de risque irlandaises, portugaises et grecques. De quoi inciter les investisseurs à rester sur la défensive.

Un autre « événement risqué »

Les grands indices boursiers s'étaient nettement repris en septembre et en octobre. Début novembre, au moment où la Réserve fédérale américaine annonçait ses nouvelles mesures dites d'« assouplissement quantitatif » pour relancer la croissance, les Bourses de New York et de Francfort effaçaient symboliquement deux ans de pertes, revenant aux niveaux qui prévalaient avant la faillite de Lehman Brothers. Mais l'ambiance pourrait changer. Le sondage réalisé par Bank of America Merrill Lynch auprès de plus de 200 gérants dans le monde montre que les investisseurs s'attendent à une correction du marché. « Il est possible que le traditionnel "rally" de fin d'année ait déjà eu lieu, laissant les marchés vulnérables à divers événements risqués comme une intensification de la crise des dettes souveraines européennes ou une hausse du dollar », selon Michael Hartnett, le responsable de la stratégie actions de BofA Merrill Lynch.

Un autre « événement risqué » est à l'origine des turbulences boursières : les tensions inflationnistes en Asie qui conduisent les autorités à prendre diverses mesures pour réguler l'afflux de capitaux. La Chine prépare ainsi un train de mesures pour contrôler les prix alimentaires. Certains parient sur une prochaine hausse des taux d'intérêt, après celle annoncée en octobre, qui avait déjà provoqué des remous sur les marchés. La banque centrale de Corée du Sud, également préoccupée par les tensions inflationnistes, est, elle, passée à l'acte : elle a relevé son principal taux d'intérêt à 2,5 % et d'autres hausses sont attendues.

Les économies émergentes, notamment d'Asie, sont sorties de la crise en meilleure position que les économies développées. Elles attirent donc des capitaux en quête de rendement, ce qui augmente l'offre de monnaie et renforce les pressions inflationnistes. D'où l'instauration de mesures visant à limiter et contrôler - souvent à la marge -la libre circulation des capitaux. « C'est surtout la perte d'autonomie des politiques monétaires qui est porteuse de risques, souligne Hervé Lievore, chez AXA IM. Après avoir été retardée par la crise de la dette européenne au premier semestre, la normalisation des politiques monétaires en Asie est désormais freinée par l'assouplissement quantitatif américain, maintenant les taux réels à des niveaux trop faibles, voire négatifs, et alimentant les bulles sur les marchés d'actifs. » Des bulles qui peuvent se fissurer brusquement. L'indice des marchés émergents a subi hier sa cinquième baisse consécutive, en reculant de 1,2 %.

GUILLAUME MAUJEAN

© 2010 Les Echos. Tous droits réservés.

0 commentaires: