mercredi 10 novembre 2010

Monnaies, relance américaine : les chefs d'Etat du G20 arrivent divisés à Séoul

Les Echos, no. 20802 - Spécial g20, mercredi, 10 novembre 2010, p. 10

Le sommet du G20 de Séoul s'annonce houleux entre les Etats-Unis et leurs partenaires au sujet de la politique monétaire de la Réserve fédérale. Les chefs d'Etat vont tenter de trouver un accord pour remettre de l'ordre dans le système monétaire international.

C'est un sommet des chefs d'Etat et de gouvernement du G20 qui sera mené au pas de charge, coincé entre un dîner, jeudi soir, et cinq sessions de travail dans la matinée de vendredi avant la conclusion du sommet en milieu d'après-midi. Si tout est minuté selon des « horaires à la coréenne » stricts, la rencontre risque d'être des plus tendues. Malgré le discours des diplomates s'efforçant d'aplanir la réalité du fossé qui sépare les principaux acteurs. En cause : le désordre des monnaies qui s'est accentué ces derniers mois où chaque pays privilégie ses propres intérêts. La délégation américaine, emmenée par un Barack Obama affaibli par son revers électoral, sera sur les charbons ardents. La décision de la Réserve fédérale (Fed), mercredi dernier, d'injecter 600 milliards de dollars pour raviver l'économie américaine provoque un tollé quasi général. Une politique jugée désastreuse pour le monde puisque ces liquidités en dollars vont s'investir massivement sur les marchés émergents, provoquant des tensions à la hausse sur les devises des dits pays au risque de saper leurs exportations. Hier, la Chine et la Russie se sont unies pour dénoncer la politique américaine. « Il y a un besoin urgent pour le G20 [...] d'instituer un nouveau mécanisme qui surveille véritablement l'organisme émetteur d'une monnaie de réserve internationale, particulièrement lorsque celui-ci se révèle incapable de mener une politique monétaire responsable », a ainsi estimé l'agence officielle Chine nouvelle. La Russie plaidera pour que la Fed consulte ses partenaires avant toute décision majeure.

Désordre ambiant

L'administration américaine, de son côté, ne se privera pas de dénoncer la sous-évaluation de la monnaie chinoise, responsable selon eux de leur important déficit commercial. Dans ce désordre ambiant, il sera difficile de trouver un terrain d'entente. Une chose est sûre, fait-on remarquer à l'Elysée : « L'idée, encore saugrenue il y a quelque temps, de réformer le système monétaire international est au coeur de l'actualité. Le projet du président Sarkozy est plus que validé ». Hier, lors d'une conférence sur la gouvernance internationale organisée à Lyon, la ministre des Finances française, Christine Lagarde qui représentera Nicolas Sarkozy au dîner du G20 de jeudi soir, a, en effet, estimé que le système monétaire international ne fonctionnait « pas de manière satisfaisante » et a prôné des actions concertées pour y mettre bon ordre lors de la présidence française du G20. « Il faut trouver une plate-forme de concertation des politiques monétaires », a-t-elle ajouté. L'ouverture du chantier de la réforme du système monétaire international devrait, en toute logique, être adopté lors de ce sommet de Séoul. A charge pour la France, qui présidera cette instance dès la fin de la réunion, de l'ouvrir. Cependant, fait valoir l'Elysée, la réforme ne se fera pas du jour au lendemain. C'est une oeuvre de longue haleine et le président français prendra le temps de la concertation. Un séminaire avec de nombreux experts est déjà prévu en Chine sur la question début 2011. Un deuxième aura lieu en Europe plus un troisième aux Etats-Unis probablement. Si la question des changes sera essentielle lors du sommet, sans qu'elle soit réglée pour autant, les leaders du G20 pourront toutefois se satisfaire de la réforme de la gouvernance du FMI et de l'accord renforçant les règles de constitution des fonds propres des banques dans le cadre de Bâle III.

RICHARD HIAULT


les rendez-vous français

Le prochain sommet du G8 devrait avoir lieu en juin à Deauville et celui du G20 prévu à la fin de l'an prochain à Cannes, a indiqué hier le chef de la diplomatie française, Bernard Kouchner. « Le choix est urgent. On dira au G20 de Séoul quelle est la date. Le lieu, ce n'est pas complètement sûr. Mais je pense que c'est Deauville, en juin, pour le G8 et que c'est Cannes, fin 2011, pour le G20 », a-t-il indiqué à l'Assemblée nationale. Le G20 des ministres des Finances de février aura bien lieu à Bercy. « Toutes les réunions ministérielles et de préparation se tiendront à Paris », a précisé Bernard Kouchner.

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