Le Trésor chinois a lancé une nouvelle émission obligataire en yuans à Hong Kong. Un type d'emprunt qui connaît un franc succès et illustre la stratégie du pays en matière monétaire.
Le gouvernement chinois a annoncé hier qu'il allait émettre à Hong Kong, à partir de la fin du mois, des obligations pour un montant de 8 milliards de yuans (890 millions d'euros). Ce sera la deuxième émission obligataire de Pékin sur le territoire de Hong Kong, après celle de septembre 2009. L'ampleur de l'opération est en légère hausse, puisque le Trésor chinois avait alors levé 6 milliards de yuans. Un signe de plus que Pékin cherche actuellement, par une approche graduelle mais déterminée, à internationaliser peu à peu sa monnaie. L'émission de dette libellée en yuans sur le territoire de Hong Kong -dont la monnaie est le dollar hongkongais -est une nouveauté qui rencontre un franc succès, notamment auprès des entreprises internationales. D'après RBS, 50 milliards de yuans auraient ainsi été empruntés à Hong Kong depuis l'année dernière. Certes, cela constitue une goutte d'eau par rapport à la dette émise sur le territoire continental de la Chine (environ 1 %) mais la dynamique est porteuse : on parle d'un doublement cette année par rapport à l'année dernière.
De fait, les entreprises internationales trouvent là un moyen d'obtenir des yuans à des taux intéressants, car les investisseurs du monde entier sont attirés par une monnaie dont ils pensent qu'elle est appelée à s'apprécier. Comme ils peuvent détenir des yuans à Hong Kong, ils n'hésitent pas à les prêter sur ce territoire à des taux plus que raisonnables. Plusieurs grandes entreprises ont eu recours à ce type d'émission de dette, à l'image de McDonald's, qui a ainsi levé 200 millions de yuans pour financer ses projets d'expansion sur le territoire chinois. Rusal, le plus gros producteur mondial d'aluminium, est actuellement en discussion pour lever l'équivalent de 100 millions de dollars par les mêmes moyens.
Objectif de long terme
Ces nouveautés sur le plan financier sont la suite logique de celles engagées par Pékin en matière commerciale. Au cours de l'été 2009, la Chine a autorisé, dans cinq villes, l'utilisation du renminbi (la désignation officielle de la devise chinoise) pour le règlement de transactions commerciales internationales. Cette pratique s'étend peu à peu et concerne désormais 20 territoires, provinces ou villes. En septembre, elle a aussi été autorisée pour les entreprises étrangères basées en Chine. Les opérateurs y ont de plus en plus recours. Au cours du troisième trimestre 2010, le montant des transactions commerciales réglées en yuans a bondi de 160 % par rapport aux trois mois précédents, pour s'établir à 126,5 milliards de renminbis (19 milliards de dollars). D'après HSBC, qui s'est singularisé en étant la première banque étrangère à émettre des obligations en yuans à Hong Kong, 30 % du commerce extérieur de la Chine pourrait être réglé en monnaie chinoise d'ici à cinq ans. Parallèlement, le nombre de devises avec lesquelles la « monnaie du peuple » peut être échangée augmente : hier, la première transaction avec le rouble a été enregistrée.
Mais de l'avis des analystes, l'objectif de Pékin, qui est de s'affranchir de la tutelle du dollar en mettant sa monnaie en conformité avec son statut de deuxième puissance économique mondiale, reste une perspective à long terme. Tant que le yuan sera échangé et emprunté dans des circuits très encadrés par Pékin et que la règle générale restera celle d'une devise non convertible, il ne pourra pas prétendre au rôle de monnaie de réserve internationale. Or Pékin ne laissera pas sa monnaie s'échanger librement tant que son objectif sera de conserver une monnaie sous-évaluée.
Gabriel Grésillon
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