mardi 23 novembre 2010

Renaissance du nucléaire : la Chine mène la danse et accélère le tempo

Les Echos, no. 20810 - Industrie, mardi, 23 novembre 2010, p. 21

L'empire du Milieu a lancé hier la construction d'un nouveau réacteur de 650 mégawatts dans le sud du pays. La Chine construit 24 tranches nucléaires en parallèle. Soit plus du tiers des chantiers de la planète.

En Chine, un nouveau chantier nucléaire est lancé toutes les six semaines. Hier, le pays a maintenu le rythme, en démarrant la construction d'un réacteur de 650 mégawatts sur l'île de Hainan, dans le sud du pays. Mené par le plus grand opérateur nucléaire du pays, China National Nuclear Corp., cette nouvelle construction va s'ajouter aux 23 chantiers nucléaires en cours dans le pays.

La Chine s'érige ainsi en maître d'oeuvre de la renaissance du nucléaire. Depuis le début de l'année, le pays a lancé huit des douze nouveaux chantiers comptabilisés par l'Agence internationale de l'énergie atomique, loin devant la Russie (2), le Japon (1) et le Brésil (1). Même constat en termes de capacité. Sur les 52 gigawatts (GW) de capacité nucléaire en construction dans le monde d'ici à 2020, environ 27 GW sont destinés à l'empire du Milieu.

La Chine dispose actuellement de 13 réacteurs d'une puissance installée de 10,8 gigawatts. Mais elle affiche d'immenses ambitions. Elle vise les 40 gigawatts à l'horizon de 2020 et envisage même de relever cet objectif à 80 gigawatts afin de limiter le poids des énergies fossiles.

Cette montée en puissance a toutes les chances de tirer les prix de l'uranium à la hausse. Elle devrait aussi pousser les acteurs chinois à prendre des participations dans des mines afin de sécuriser leurs approvisionnements. Pour l'instant, le pays multiplie les partenariats à long terme avec les producteurs d'uranium. Voilà quelques semaines, l'électricien CGNPC a ainsi signé un contrat de 3 milliards de dollars avec Areva pour une durée de dix ans.

Grande rivale de la Chine, l'Inde affiche également de solides ambitions dans le nucléaire. Le pays souhaite produire 10 % de son électricité à partir de l'atome d'ici à 2030 et porter sa capacité installée de 4,5 à 60 gigawatts d'ici là.

En comparaison, les pays de l'OCDE font pâle figure. Ils ont 16 gigawatts de capacité nucléaire en cours de construction d'ici à 2020, principalement en France, en Corée du Sud, en Finlande et au Japon. En Suisse, aux Pays-Bas, l'heure n'est plus à la sortie du nucléaire, mais les projets vont demander des années pour se concrétiser (lire ci-dessous).

Problèmes de financement

« Si beaucoup de pays de l'OCDE ont exprimé leur intérêt pour le nucléaire et pris des mesures pour assurer sa relance, les nouvelles constructions sont pour l'instant très peu nombreuses, du fait des problèmes de financement et des incertitudes pesant sur les coûts », souligne l'Agence internationale de l'énergie.

Aux Etats-Unis, la renaissance du nucléaire semblait imminente en 2007. Mais elle a pâti de la crise du crédit et de la baisse du prix du gaz et de l'électricité sur les marchés. Le développement du gaz non conventionnel a rendu les centrales nucléaires moins compétitives alors même qu'il ne coûte rien d'émettre du carbone et qu'il est difficile d'obtenir une garantie de prêt de l'Etat pour bâtir une centrale.

EMMANUEL GRASLAND

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