"Il est temps d'être sérieux à propos de la Corée du Nord", estime Joel Wit, expert américain de la Corée, dans le magazine Foreign Policy. Certes, les tirs d'artillerie nord-coréens sur le Sud demandent une réponse ferme de la part des Etats-Unis, de la Corée du Sud et du Japon, du moins aussi ferme que possible sans précipiter une nouvelle guerre de Corée. Début décembre, les Etats-Unis et leurs alliés se sont rencontrés à Washington et ont appelé au renforcementde leur coopération vis-à-vis de Pyongyang, tandis que Séoul et Washington menaient des manoeuvres navales en mer Jaune, au grand dam de Pékin. Le 14 décembre, James Steinberg, sous-secrétaire d'Etat américain, était attendu à Pékin pour discuter de la situation.
Une intense activité diplomatique s'est en effet déployée depuis les tirs nord-coréens du 23 novembre 2010. La Chine ne les a pas condamnés, mais elle multiplie les contacts avec Séoul comme avec Pyongyang et continue à appeler à la reprise des pourparlers à six (qui rassemblent Etats-Unis, Japon, Russie, Chine et les deux Corées). De son côté, la Corée du Sud a envoyé le 14 décembre un émissaire à Moscou pour discuter des tirs nord-coréens et de la menace nucléaire dans la péninsule depuis la révélation par le Nord qu'il détenait une capacité considérable d'enrichissement d'uranium. La veille, le ministre des Affaires étrangères de Russie Sergei Lavrov avait fait part à son homologue nord-coréen de sa "profonde préoccupation" concernant ce programme, rapporte le quotidien britannique The Guardian. Il a appelé à la reprise des pourparlers à six.
Toute la question est de savoir quelle méthode peut amener Pyongyang à la modération. "Cinquante ans d'histoire, si ce n'est la logique, disent à Kim Jong-il que les Etats-Unis et la Corée du Sud ne risqueront pas l'escalade. Il est également peu crédible de penser que la Chine va amener la Corée du Nord à plier. La Chine travaille sans doute en coulisses à encourager Pyongyang à la modération. Mais il est faux de penser que la Chine n'a qu'à claquer des doigts pour mettre la Corée du Nord au pas. Aucun dirigeant nord-coréen digne de ce nom ne va faire allégeance à Pékin", affirme Joel Wit.
"Une plus grande pression sur la Chine n'est pas non plus efficace. Les dirigeants chinois ne vont pas abandonner la stabilité nord-coréenne qui est d'un intérêt vital pour leur pays et jeter Pyongyang par-dessus bord parce que les Américains disent qu'ils le devraient. Ces derniers ont pour leur part peu de moyens d'agir. La menace d'un renforcement de la coopération avec le Japon et la Corée du Sud ne va pas faire bouger Pékin. Elle peut même être contre-productive et renforcer les arguments des tenants chinois de la ligne dure, selon lesquels le but de Washington n'est pas simplement de traiter fermement avec Pyongyang, mais aussi d'encercler et d'endiguer la Chine", poursuit l'expert.
Les signes de l'échec de la politique américaine dite de "patience stratégique", consistant à refuser de parler à Pyongyang en se contentant de l'endiguer, sont patents, ajoute-t-il. La pression seule n'est pas efficace. "A moins que les Etats-Unis ne changent de position, les menaces contre leurs intérêts et ceux de leurs alliés vont augmenter dans les mois qui viennent."
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