lundi 20 décembre 2010

Les pays émergents luttent contre les capitaux spéculatifs - Arnaud Rodier

Le Figaro, no. 20648 - Le Figaro Économie, lundi, 20 décembre 2010, p. 24

La Corée du Sud imposera dès l'an prochain une taxe sur les emprunts des banques à l'étranger.

Depuis l'été dernier, nombreux sont les pays qui, comme la Thaïlande, l'Indonésie ou même Taïwan, mais aussi, à l'autre bout du monde, le Brésil, prennent des mesures visant à limiter le trop grand afflux de capitaux étrangers sur leur sol.

Hier, la Corée du Sud a franchi un pas supplémentaire en annonçant qu'elle imposerait à ses banques une taxe sur leurs emprunts en devises étrangères à partir du second semestre 2011. La mesure s'appliquera dans un premier temps aux établissements nationaux et aux filiales sud-coréennes des banques étrangères, mais elle sera « étendue à toutes les institutions financières si le besoin s'en fait sentir », précise le ministère des Finances.

Le produit de cette taxe, qui devra être payée en devises étrangères, servira à fournir rapidement des liquidités en cas de choc économique, expliquent les pouvoirs publics. Mais la mesure, qui sera présentée au Parlement en février prochain, est d'abord destinée à protéger l'économie sud-coréenne de l'arrivée massive de capitaux spéculatifs qui provoquent une hausse brutale des devises des pays émergents et pèsent lourdement sur les exportations de ces derniers.

Source de déséquilibre

La Corée n'échappe pas à la règle. Au lendemain de la décision de la Réserve fédérale américaine, début novembre, d'injecter 600 milliards de dollars dans l'économie, elle avait été l'un des premiers à soulever les dangers de cette opération pour tous les pays d'Asie.

Selon l'institut International Finance, les pays émergents devraient en effet recevoir quelque 825 milliards de dollars de capitaux extérieurs cette année, contre 581 milliards l'an dernier, dont 343 milliards pour la seule Asie.

Ces flux de capitaux sont certes des marques de confiance de la part des investisseurs étrangers dans l'économie des pays visés, mais ils sont aussi la source de profonds déséquilibres potentiels. Et, surtout, ils peuvent les ruiner du jour au lendemain si ces fonds sont brutalement retirés.

Tous les pays de l'Asean (Association des nations de l'Asie du Sud-Est) se sentent aujourd'hui menacés. Et la Banque asiatique de développement leur demande impérativement de « gérer avec la plus grande prudence » l'arrivée de ces capitaux étrangers dans l'ensemble de la région. Mais ils ne sont pas les seuls. La Chine a vu exploser en octobre dernier de près de 80 % en un mois les entrées de devises étrangères (77,6 milliards de dollars). Autant de fonds spéculatifs attirés par les rendements chinois qui sont meilleurs que dans les pays développés.

Du coup, les responsables de la banque centrale ne cessent de mettre les autorités en garde et la Chine a décidé un resserrement de sa politique monétaire pour l'an prochain qui passera notamment par de nouvelles hausses des taux d'intérêt.

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