France 2 - jeudi 3 février, 22h50
Des petits patrons qui cherchent avec difficulté des employés pour travailler dans une usine de confection de chaussettes : c'est une situation quotidienne dans la petite ville de Datang, en Chine, une de ces cités de 300 000 habitants, qui se sont spécialisées dans une mono industrie. Car Datang, forte d'un millier de centres de production, produit aujourd'hui un tiers des chaussettes vendues dans le monde... Payés à la pièce, les ouvriers, qui viennent le plus souvent du centre de la Chine, gagnent entre 150 et 200 euros par mois. Ils sont logés par leur employeur, parfois au-dessus de la teinturerie de l'usine.
Ce documentaire décortique la puissance économique de la Chine en partant d'un constat simple : aujourd'hui, 90 % des produits manufacturés d'une valeur de moins de 20 euros en France proviennent de l'empire du Milieu. Il y a trente ans, ce pourcentage n'excédait pas 2 %. Les conditions de travail ne sont toujours pas une préoccupation majeure, comme en témoigne la visite à Canton d'un fabricant de canapés. Sans masques ni gants, les pieds nus parfois dans des dépôts dont le sol est jonché de clous, les ouvriers doivent essentiellement produire vite, pour vendre rapidement.
UNE ÉCONOMIE CHINOISE EN TRANSFORMATION
Pour rester l'usine du monde, la Chine s'est organisée en facilitant notamment le " sourcing ", les achats les plus variés, aussi bien de textiles que de jouets, bijoux ou même sculptures d'art africain... Ce qui passe notamment par un site Internet, baptisé Alibaba, un sésame qui permet à des acheteurs du monde entier de trouver leur bonheur grâce aux 37 millions d'usines adhérentes à ce site.
Les dirigeants de PME chinoises doivent faire face à la pression des acheteurs occidentaux pour obtenir les prix les plus bas possible. Le film montre d'ailleurs de nombreux locaux d'usines textiles ou d'ameublement vides, en raison de multiples faillites. Leurs principaux clients ayant préféré à la Chine des pays où la main-d'oeuvre est devenue bien moins chère, comme le Vietnam ou le Bangladesh.
Le futur de l'économie chinoise passera-t-il par une dépendance moins grande à l'égard des exportations vers les Etats-Unis ou l'Europe ? Sans aucun doute. De plus en plus, l'usine du monde se métamorphose en usine de la Chine et travaille pour son propre marché intérieur. Une métamorphose qui ne va pas sans quelques réticences. Comme en témoigne l'attachement de la ville de Nanjie au passé, elle est toujours entièrement basée sur l'économie collectiviste. En uniformes vert et rouge, les salariés chantent la gloire de leur employeur, ne sont payés qu'à 30 % en salaire - le reste en nature -, occupent tous le même tout petit appartement avec les mêmes meubles et la même télévision que leurs voisins... Une effrayante plongée dans un mode de vie maoïste.
Nicole Vulser
Alain Lasfargues
(France, 2011, 90 minutes).
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