Selon une étude menée par Offre & Demande Agricole sur le blé entre janvier 2007 et janvier 2011, le lien est très faible entre la variation des fonds spéculatifs et la variation du prix du blé.
« Il y a dix ans, les acteurs de la filière agricole pleuraient parce qu'il n'y avait pas de liquidité sur les marchés à terme. Aujourd'hui, alors que ces derniers se sont financiarisés, les politiques accusent les spéculateurs, qui assurent en partie cette liquidité, d'être responsables de la volatilité des matières premières agricoles », regrette Renaud de Kerpoisson, le président d'Offre & Demande Agricole.
Alors que la polémique fait rage sur le rôle des spéculateurs dans la volatilité des matières premières, la société de conseil en gestion aux agriculteurs a voulu apporter des éclairages sur l'évolution des prix des céréales. Elle a tenté de voir s'il existait un lien entre les positions des fonds spéculatifs (ceux qui sont qualifiés de non commerciaux) et l'évolution des prix. Pour ce faire, elle s'est appuyée sur les données hebdomadaires du régulateur américain, la Commodity Futures Trading Commission (CFTC), entre janvier 2007 et janvier 2011. La période englobe ainsi deux vagues de fortes hausses des prix, en 2008 d'abord, puis dans la seconde moitié de 2010.
Résultat ? Selon Offre & Demande Agricole, si les positions à l'achat des spéculateurs augmentent, il y a 70 % de chance que le prix de la céréale augmente. Mais le lien est faible, car la corrélation n'est que de 42 % entre la variation de la position de ces fonds et celle du prix du blé. En revanche, la société ne voit aucun lien entre les cours de la céréale et les positions des fonds indiciels, ces fonds qui ont investi dans un panier de matières premières agricoles.
« Ce que les non-professionnels ne comprennent pas, c'est que les Russes ont eu du mal à semer en raison des terres très sèches, que les plaines du Kansas, premières zones de production de blé aux Etats-Unis, ont également été victimes de la sécheresse, que la situation est catastrophique en Chine pour les mêmes raisons et que les inondations en Australie ne vont pas permettre aux agriculteurs de produire du blé de première qualité », explique Renaud de Kerpoisson.
Paradoxe
Ce sont donc les aléas climatiques qui, en pesant sur l'offre viennent bouleverser le marché dans un contexte où la demande est de plus en plus forte. « Toutefois, même en admettant que les spéculateurs aient un impact haussier sur le marché, le paradoxe, c'est qu'ils inciteront les agriculteurs à produire davantage pour profiter de ces prix très élevés ; ce qui, à terme, aura un effet négatif sur le prix », ajoute-t-il. Ce serait là le paradoxe de la spéculation.
LAURENCE BOISSEAU
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