Répression . Deux personnes ont été tuées et 300 lamas arrêtés lors de l'attaque contre le monastère tibétain.
La répression continue de s'abattre sur le monastère tibétain rebelle de Kirti, situé dans le comté d'Aba, dans la province du Sichuan. Cette ville-temple, peuplée de 2 500 moines, est assiégée depuis le 9 avril par des milliers de militaires et policiers chinois.
Environ 200 villageois campent aux abords du monastère pour empêcher les forces de l'ordre de procéder à des arrestations. Jeudi, selon des sources locales, des forces spéciales et des policiers ont roué de coups ces villageois tibétains afin de se frayer un passage. Au moins deux d'entre eux, des personnes âgées, ont succombé à ce passage à tabac en règle. Plus de 300 lamas considérés comme des «meneurs» ont, peu après, été emmenés en «rééducation politique» dans des autobus sous la menace armée. Plusieurs moines de Kirti, récemment revenus de «rééducation», ont expliqué à des sources tibétaines qu'ils avaient été systématiquement torturés à l'électricité.
Brûlures. La lamaserie de Kirti, connue pour son militantisme en faveur de l'indépendance du «Pays des neiges» et le retour du dalaï-lama, le chef spirituel du peuple tibétain, est un casse-tête pour les autorités chinoises. Lors des dernières grandes émeutes qui ont secoué l'ensemble du Tibet, en mars 2008, l'armée chinoise a tué par balles au moins huit Tibétains qui manifestaient pour l'indépendance à Aba. Plusieurs moines de Kirti faisaient partie des victimes.
Le 16 mars, lors de l'anniversaire de cette journée sanglante, un jeune lama de Kirti nommé Phuntsog s'est immolé par le feu devant le siège du gouvernement local. Des policiers chinois auraient éteint les flammes avant de le rouer de coups. De nombreux Tibétains se sont alors précipités pour le protéger. Amené à l'hôpital, il aurait succombé à ses brûlures et aux coups administrés par la police. Plusieurs centaines de Tibétains d'Aba avaient alors manifesté et des centaines d'entre eux auraient été arrêtés.
Officiellement, il ne se passe rien à Aba. «Les bonzes de Kirti profitent d'une vie normale et mènent normalement leurs activités bouddhistes», assurait, il y a quelques jours encore, un porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères. Dans un même souffle, cet officiel accusait les Etats-Unis de mentir sur les faits, après qu'un porte-parole américain eut souligné, depuis Washington, que l'intervention militaire chinoise à Kirti était «en contradiction avec les principes, reconnus internationalement, de la liberté religieuse et des droits de l'homme».
Messe. Pékin fait tout pour qu'il n'y ait pas de témoin. La région d'Aba est, dans les faits, interdite aux étrangers depuis plusieurs semaines (Libération du 8 avril). Mais ce n'est qu'hier que Pékin a annoncé, sans explication, que les touristes étrangers n'étaient plus les bienvenus dans cette zone où règne une forme de loi martiale.
La spirale de la répression engendrant des réactions de défi n'est pas le seul apanage du Tibet. Hier, à Pékin, pour la troisième semaine consécutive, les fidèles d'une Eglise protestante indépendante, Shouwang, ont tenté d'organiser une messe en plein air. Les autorités chinoises, qui ne reconnaissent que les congrégations soumises au Parti communiste, ont arrêté entre 20 et 30 fidèles qui s'étaient présentés pour l'office. Près de 170 membres de cette Eglise avaient déjà été arrêtés le dimanche 10 avril, et une cinquantaine d'autres une semaine plus tard. Certains ont ensuite été libérés, mais les responsables de la communauté ont été assignés à résidence.
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