mercredi 4 mai 2011

ENQUÊTE - PSA part à la reconquête de la Chine - Cyrille Pluyette

Le Figaro, no. 20762 - Le Figaro Économie, mercredi 4 mai 2011, p. 18

Pionnier de l'automobile dans le pays, Peugeot Citroën a vu sa part de marché fondre. Le constructeur se relance avec plus d'usines et des nouveaux modèles.

Une dizaine de concessionnaires se succèdent dans cette large avenue de Wuhan. Pour la plupart, ils représentent des marques occidentales, mais l'on aperçoit quelques logos chinois. Tout en blanc et rouge, le point de vente Citroën est le plus important de cette ville industrielle de près de 10 millions d'habitants, située dans le centre de la Chine, où PSA a installé son siège et ses usines.

En cet après-midi d'avril, Kun Wu, 27 ans, vient de participer à la cérémonie de remise des clés de sa première voiture, une C4 en version chinoise, avec un grand coffre. Il a défait lui-même le gros noeud du ruban rouge qui entourait le pare-brise, a retiré les films adhésifs de protection sur le toit et le capot, puis s'est fait prendre en photo aux côtés du patron de l'établissement. « C'est un moment important, j'ai ressenti beaucoup de fierté », raconte ce manager dans le tourisme. Il a découvert son futur véhicule « par des amis qui l'avaient acheté », et a conforté son choix « sur Internet, puis lors d'un voyage en France », appréciant « le coffre, les lignes et le bon rapport qualité/prix ». Le jeune homme utilisera sa Citroën, payée 12 000 euros « cash », pour « aller au travail et voyager le week-end ». Comme lui, 376 000 de ses compatriotes ont acquis l'an dernier un modèle de PSA, un chiffre en hausse de 38 % en un an. Mais le groupe reste insignifiant en Chine, avec 3,3 % de part de marché sur les voitures particulières. Pionnier dans ce pays en 1985, il s'est fait dépasser par ses rivaux arrivés après lui.

Troisième usine

Le français met cependant les bouchées doubles pour rattraper son retard. À quelques kilomètres du siège, des bulldozers s'activent sur un immense champ de terre, en face d'une fabrique de radiateurs et d'autocuiseurs. Le groupe construit une troisième usine à Wuhan, avec son partenaire chinois Dongfeng, de façon à porter la capacité de production annuelle à 750 000 voitures en 2013, puis, en théorie, à 950 000 en 2015. Parallèlement, il a signé une deuxième coentreprise, avec Chang'An, à Shenzhen. D'ici à 2018-2019, le groupe disposera au total d'un potentiel de production de 1,2 million de voitures, qui pourra être augmenté. Très ambitieux, PSA cible 8 % de part de marché en Chine en 2020. Soit plus de 2 millions de ventes si le marché dépasse 30 millions de véhicules, ce qui en ferait de loin le premier débouché du groupe.

Pendant des années, « PSA n'a pas assez lancé de produits en Chine. Le groupe était plus focalisé sur l'Europe, ce qui se passait loin du siège était moins prioritaire », reconnaît Philippe Varin, le président du directoire.

Longtemps, il s'est appuyé sur un seul modèle, la Citroën Fukang, dérivée de la ZX. Plus d'un million d'exemplaires de cette voiture robuste mais basique ont été écoulés depuis 1992, notamment auprès de flottes de taxis. Les autres voitures, comme la Xsara Picasso, trop européenne, ont fait un flop. Résultat, une image « moyenne » que PSA cherche à corriger en montant en gamme, grâce à des produits mieux adaptés à une clientèle chinoise, car développés ou modifiés dans son centre technique de Shanghaï. Après la Citroën C5 et la Peugeot 408, l'an passé, le français sortira sa 508 cet été et sa DS5 en 2012. Trois autres DS, conçues pour la Chine, sont dans les cartons. Par ailleurs, le groupe se prépare à lancer des marques chinoises pour toucher les clients plus modestes de l'intérieur du pays.

Le constructeur prévoit d'ouvrir cette année 150 nouvelles concessions. Alors que ses concurrents étendent également leur réseau, le défi consiste à former des vendeurs. Une voiture étant souvent financée par la famille, « il n'est pas rare de devoir conseiller à la fois un jeune, à la recherche de modernité, et ses parents, qui préconisent un choix classique », explique Mathieu Vennin, directeur du réseau Citroën local.

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