Les Echos, no. 20943 - International, lundi 30 mai 2011, p. 8
De passage à Pékin, le ministre français de l'Agriculture a estimé que Pékin apportait son soutien aux projets de la France, en dépit de points « techniques » à résoudre.
Bruno Lemaire veut y croire. Le ministre français de l'Agriculture estime désormais un consensus « à portée de main ». Au terme d'une visite éclair à Pékin, il a déclaré que l'objectif de mettre tous les pays du G20 d'accord sur la question agricole semblait désormais accessible. Pourtant, l'idée d'inclure le sujet dans les débats, voulue par Nicolas Sarkozy, semblait peu réaliste il y a un peu moins d'un an, compte tenu des divergences profondes dans le monde sur ce sujet « stratégique et qui dépasse largement le champ de l'économie et du social ». Mais aujourd'hui, veut croire le ministre français, se développe la prise de conscience que « le système actuel est menaçant pour des zones entières de la planète », comme en ont témoigné les répercussions d'événements climatiques récents, à l'image de la sécheresse en Russie ou des inondations en Australie.
Pékin, en tout cas, ne devrait pas faire barrage au projet de texte soumis aux ministres de l'Agriculture des 20 pays les 22 et 23 juin prochain. Si la Chine n'avait jamais émis d'objections aux projets de Paris, elle a déclaré, cette fois, « s'engager totalement » aux côtés de la France et souhaiter une « décision concrète ». Des mots que Bruno Lemaire interprète comme un franc soutien à l'empire du Milieu.
Transparence sur les productions
Certains sujets « techniques » restent toutefois à préciser, côté chinois. L'idée, voulue par la France, de renforcer la transparence sur les productions et les stocks mondiaux, inquiète une Chine encore loin de disposer de l'outil statistique nécessaire pour publier ses propres chiffres. Il faudra donc lui laisser du temps pour y parvenir. Quant au projet de limiter la capacité des pays à restreindre leurs propres exportations, il n'est pas du goût de ce pays gigantesque qui considère la question alimentaire comme « aussi stratégique que les armées », selon Bruno Lemaire, et relevant donc de sa souveraineté absolue. Là encore, il faudra des aménagements.
Mais pour le reste, qu'il s'agisse de l'idée d'investir massivement dans la production agricole au niveau mondial, de celle de créer des mécanismes d'alerte rapide et de coopération en cas de crise, ou de réguler les marchés agricoles afin de limiter la spéculation, Pékin semble adhérer aux projets français. Pas sûr, en revanche, que des pays de tradition libérale comme l'Australie ou le Royaume-Uni se laissent convaincre de mettre dans l'ordre sur ce marché, aussi stratégique soit-il...
GABRIEL GRESILLON
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