Le numéro deux du FMI, John Lipsky va assurer temporairement la direction générale du Fonds. Un conseil d'administration informel devait se tenir hier soir à Washington.
Le Fonds monétaire international (FMI) a indiqué, hier en milieu d'après-midi que John Lipsky, l'actuel directeur général adjoint de l'institution multilatérale, exercerait les fonctions de directeur général à la place de Dominique Strauss-Kahn (DSK), inculpé pour agression sexuelle et tentative de viol. William Murray, porte-parole du Fonds, a ajouté que John Lipsky présiderait un conseil d'administration informel, qui devait se tenir hier soir au siège de l'institution pour évoquer les développements de la deuxième affaire DSK. Si les faits reprochés au directeur général sont avérés, le conseil d'administration du Fonds n'aurait d'autre choix que de mettre fin à ses fonctions.
« Erreur de jugement »
Déjà, par le passé, les 24 membres du conseil avaient été saisis d'une affaire sur le comportement du tout nouveau directeur général, nommé en novembre 2007. En effet, en janvier 2008, DSK avait eu une relation avec l'économiste hongroise Piroska Nagy. L'enquête avait conclu que la relation était consentante et n'avait pas suscité de favoritisme. En octobre 2008, le conseil du Fonds avait maintenu DSK dans ses fonctions, tout en lui reprochant « une grave erreur de jugement ». L'institution impose, en effet, un code de conduite à ses fonctionnaires internationaux qui leur demande de respecter les lois, mais aussi de « suivre les normes les plus élevées de comportement éthique, conforme aux valeurs d'intégrité, d'impartialité et de discrétion ». Mais ce code prévoit le licenciement en cas de « violation grave ».
Reste que cette nouvelle affaire intervient au plus mauvais moment, alors que le FMI est une des chevilles ouvrières du redressement de l'économie mondiale pilotée par le forum du G20 et qu'il est partie prenante des plans de sauvetage européens, notamment en Grèce, Irlande, Portugal... (voir ci-contre). Dès lors, qui va diriger le Fonds si DSK est démis de ses fonctions ?
Dans l'immédiat, le FMI n'est pas obligé de prendre une décision et peut fonctionner sans son patron. Le premier directeur général adjoint, l'Américain John Lipsky, peut prendre les commandes. C'est dans ce sens que la décision d'hier soir a été prise.
Mais, d'ici à quelques mois, le tandem Strauss-Kahn-Lipsky sera définitivement remplacé. A cette occasion, il est plus que probable que l'accord tacite, depuis 1944, voulant qu'un Européen dirige le FMI et qu'un Américain soit à la tête de la Banque mondiale sera caduque. La procédure de nomination, d'ailleurs, a considérablement évolué depuis le renforcement du poids économique des grands pays émergents. La nomination d'une personnalité issu d'un de ces pays est envisagée au terme d'un « processus de sélection transparent », basé sur « le talent et la compétence » du candidat « indépendamment de sa nationalité ». Si DSK, en coulisse, ne cachait pas qu'il serait le dernier Européen à diriger le FMI avant longtemps, rien n'indique cependant qu'un Européen ne lui succédera pas. D'autant plus que le mandat de l'Américain Bob Zoellick à la tête de la Banque mondiale s'achève en juin 2012. A cet effet, les Américains joueront-ils le jeu en lâchant la Banque à une autre personnalité qu'un Américain ? Pas sûr.
Des noms circulent
Dans les coulisses du FMI, un nom revient régulièrement pour le prochain directeur général. Celui de Trevor Manuel, l'ancien ministre des Finances sud-africain de 1996 à 2009, dont le gouvernement avait poussé le nom pour prendre la présidence du Comité monétaire et financier international, l'organe de direction politique du FMI, qui a finalement échu au ministre des Finances singapourien Tharman Shanmugaratnam. Le nom de Kermal Dervis, ancien ministre des Finances de Turquie et ancien administrateur du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), est aussi évoqué. La presse indienne parle de deux hommes qui chercheraient à se placer comme candidat officiel de New Delhi : le gouverneur de la banque centrale, Duvvuri Subbarao, et le directeur adjoint du commissariat au Plan, Montek Singh Ahluwalia. La Chine ne revendiquerait pas de candidat. Reste que l'un des conseillers spéciaux du FMI, nommé par DSK en mai 2010, est chinois : c'est l'ancien vice-président de la banque centrale chinoise, Zhu Min.
RICHARD HIAULT
Les grandes dates du FMI sous DSK
1er novembre 2007. Dominique Strauss-Kahn devient directeur général du FMI pour cinq ans. 26 janvier 2008. DSK réclame à Davos une mobilisation générale contre la crise et des mesures de relance. 28 mars. Le FMI adopte une réforme destinée à accroître le poids des pays émergents ou en développement. 30 octobre. Le FMI annonce la création d'un nouvel instrument de financement à court terme pour les pays frappés par la crise financière. 24 mars 2009. Le FMI simplifie ses prêts et réduit les conditions à remplir pour aider plus efficacement les pays en difficulté. 2 avril. A Londres, le G20 décide de tripler les moyens du FMI. 29 juillet. Le FMI annule jusqu'à fin 2011 le paiement des intérêts par les pays pauvres. Une mesure inédite. 11 novembre 2010. A Séoul,la réforme du FMI est entérinée et la Chine devient son troisième actionnaire, derrière les Etats-Unis et le Japon. 22 décembre. Le FMI annonce la fin de son programme de vente d'or, entamé un an auparavant. 3 avril 2011. Le FMI publie l'esquisse d'un cadre de recommandations sur la gestion des flux de capitaux.
© 2011 Les Echos. Tous droits réservés.
1 commentaires:
john Lipsky était avant le vice-président de JP Morgan Investment ,après avoir eu des postes importantes chez Salomon Brothers et Chase Manhattan Bank. quelle sera la ligne de conduite de M. Lipsky? Certainement très différente de M. Strauss Kahn...
Enregistrer un commentaire