jeudi 18 août 2011

Un Allemand licencié pour avoir épousé une Chinoise - David Philippot

Le Figaro, no. 20852 - Le Figaro, jeudi 18 août 2011, p. 7

Épouse ou espionne ? Dans le doute, une entreprise du nord de l'Allemagne a préféré licencier son employé. Quitte à bafouer le droit du travail.

Maike Blase, 47 ans, avait été embauché en CDD comme ingénieur dans l'entreprise Autoflug en 2006. Pour les besoins de sa tâche, ce cadre est appelé à se rendre régulièrement en Asie. Au cours d'une mission en Chine, il fait la connaissance d'Aiwu, 40 ans, traductrice pour la chambre de commerce germano-chinoise. À Shanghaï, la romance se noue.

À chacun de ses déplacements en Chine, qu'ils soient professionnels ou personnels, Maike tient son entreprise informée. Quelques collègues de travail sont même invités au mariage, célébré dans le delta du Yang Tsé Kiang.

La nouvelle épouse obtient rapidement des papiers lui permettant de venir s'installer en Allemagne et l'heureux mari est définitivement embauché en mars 2009. Mais, trois mois plus tard, douche froide : il reçoit une lettre de licenciement par la poste. Le motif exposé est très général : pour des raisons tenant à la bonne marche de l'entreprise. Son supérieur finit par lui avouer la cause exacte : ses relations familiales font peser un risque de sécurité pour la PME, qui compte l'armée allemande et Airbus parmi ses clients.

Mauvaises manières

L'employé défend l'honneur de son épouse et réclame des preuves. Comme dans un polar de guerre économique, Autoflug craint en fait que l'épouse ou sa fille ne soient enlevées par les services secrets chinois et servent de moyen de pression pour faire chanter l'ingénieur.

Le différend se réglera finalement devant les tribunaux. À la surprise générale, un tribunal de première instance avait avalisé le licenciement. Le jugement vient d'être cassé en appel par le tribunal régional du travail de Schleswig-Holstein. Dans ses motifs, le juge considère la décision de l'entreprise comme « immorale, arbitraire et contraire au droit du travail et à la liberté élémentaire du droit au mariage ».

L'avocat de l'ingénieur a salué « la sanction de cette décision (de licenciement) absurde fondée sur un simple procès d'intention ». Le tribunal a même proposé au salarié sa réintégration dans l'entreprise. Mais Maike, écoeuré par les mauvaises manières de son ex-employeur, a décliné l'offre. Pour solde de tout compte, il a obtenu sept mois de salaires en dédommagement, soit 28 000 euros.

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