jeudi 4 juin 2015

EXTRAITS - "Hommes de..." - Bérengère Bonte

Journaliste à Europe 1, Bérengère Bonte publie le 11 juin un livre consacré aux maris ou compagnons des femmes politiques. On saura donc tout de ceux qui partagent la vie de Martine Aubry, Nathalie Kosciusko-Morizet, Najat Vallaud-Belkacem ou encore Rama Yade. Ont-ils les mêmes idées politiques ? Ont-ils de l'influence ? Comment supportent-ils de demeurer dans l'ombre ? Réponses dans Hommes de...(Éditions du moment, 17,95 euros).

PHOTO - Nathalie Kosciusko-Morizet et Jean-Pierre Philippe, avec Rama Yade et Joseph Zimet, le 14 juillet 2007, à l'Elysée.



(13/06/2015)

La Cité du Livre : Bérengère Bonte, auteure de... par LCP


Le palmarès des hommes de...
Le Jdd.fr - Politique, vendredi 12 juin 2015 - 11:03 (UTC +02:00)
Anne-Charlotte Dusseaulx

Qui sont les compagnons des femmes politiques? Journaliste à Europe 1, Bérengère Bonte leur donne la parole dans un livre paru jeudi. L'occasion de faire le point sur leur parcours, mais aussi sur leurs relations et différences avec leur conjointe.

Le plus "spin doctor" : Laurent Olléon

Pour l'auteur, c'est "incontestablement" Laurent Olléon, conseiller d'Etat et compagnon de Fleur Pellerin, ministre de la Culture et de la Communication. "Il tient un rôle politique qu'il assume totalement. Il est le plus passionné des deux par la politique, et est en Hollandie depuis plus de vingt ans", explique Bérengère Bonte. Fleur Pellerin, elle, "est arrivée sur le tard". "Elle entre vraiment dans la machine au moment de la campagne de François Hollande." "C'est vraiment le couple où le sujet est omniprésent", ajoute-t-elle.

«Quand les gens n'arrivent pas à joindre sa femme, ils passent par lui. Il prend les rendez-vous...»

Mais Laurent Olléon a aussi un rôle de communicant : "Quand les gens n'arrivent pas à joindre sa femme, ils passent par lui. Il prend les rendez-vous..." L'épisode Modiano en est un exemple. Alors que Fleur Pellerin songe à répondre à la polémique sur le ton de l'humour en postant sur Twitter une photo d'elle lisant un ouvrage de l'écrivain, son conjoint la conseille. "Attends que la vague soit à son maximum, sinon ta réaction va se perdre dans la vague, lui dit-il. Mais il faut montrer que tu es énervée", lui dit-il. Ce qu'elle fera quelques jours plus tard, en marge de l'inauguration de la Parisienne's week.

Le plus "gaffeur" : Jean-Pierre Philippe

Le compagnon de Nathalie Kosciusko-Morizet a un surnom : "Dans les cabinets ministériels de sa femme, ils l'appelaient 'la grenade dégoupillée'", explique Bérengère Bonte. "Jean-Pierre Philippe, qui est de gauche, tente des choses en permanence. Il a tenté la politique, ça s'est mal terminé. Il a écrit un livre..." avant de se raviser. Cet essai philosophico-politique, intitulé Où c kon va com ça, sur la frontière ténue entre droite et gauche, ne verra finalement pas le jour. La raison? Il y critiquait la réforme universitaire de Valérie Pécresse, au moment même où cette dernière lui proposait une mission au ministère de l'Enseignement supérieur... "Il appelle l'éditeur pour tout arrêter", raconte l'auteure. "Dans la série des gaffes, NKM n'est pas au courant. Elle va entièrement le relire, et ça ne passe pas du tout. Elle comprend la menace pour elle", poursuit-elle. Jean-Pierre Philippe appelle l'éditeur : "Nathalie vient de lire le livre. Il faut tout arrêter, sinon elle divorce!"

«C'est potentiellement compliqué quand on veut mener une carrière politique d'avoir à ses côtés quelqu'un comme ça»

Secrétaire d'Etat chargée de l'Ecologie, NKM est alors "sous la tutelle de Jean-Louis Borloo avec qui ça ne se passe pas très bien. Elle n'a pas du tout envie de se faire remarquer". Or, son mari est "un peu incontrôlable". "C'est potentiellement compliqué quand on veut mener une carrière politique d'avoir à ses côtés quelqu'un comme ça", juge Bérengère Bonte.

Le plus "sidérant" : Louis Aliot

En rencontrant Louis Aliot, le compagnon de Marine Le Pen, Bérengère Bonte ne s'attendait pas à un tel discours. "D'une part, sur sa modernité dans son rapport aux femmes", reconnaît-elle. "Il n'est pas marié et le défend tout à fait. Il répond que ça ne sert à rien, qu'ils ont déjà des enfants et qu'ils n'ont pas prévu d'en refaire", ajoute l'auteure, rappelant aussi qu'il avait vivement défendu Marine Le Pen en 2002 lorsqu'elle avait été critiquée par les "barons du FN" qui "ne supportaient pas de la voir arriver". Et ce, alors qu'ils n'étaient pas encore en couple.

«Pour lui, la politique est un poids. Il m'a dit que ce n'est que des emmerdes. C'est la vie dont il ne veut pas»

De l'autre, sur "son rapport à la politique". "Il n'attend qu'une chose, c'est de s'en aller!", assure l'auteure. Des propos tenus par Louis Aliot dans l'ouvrage. "Le jour où (Marine Le Pen) entre à l'Elysée, j'arrête tout...", confie le député européen en février dernier. "Il donne l'impression d'avoir mené sa carrière politique sans la contrôler (...) Pour lui, la politique est un poids. Il m'a dit que ce n'est que des emmerdes. C'est la vie dont il ne veut pas. En ce sens-là, il est sidérant", complète Bérengère Bonte. Louis Aliot retentera sans doute "une dernière fois" de conquérir la mairie de Perpignan en 2020. Quant à la suite, il s'occupera "peut-être des harkis, mais (il) ne fera plus de politique active".

Le plus "frustré" : Xavier Cantat

Xavier Cantat est le compagnon de Cécile Duflot, ministre du Logement de mai 2012 à mars 2014. "Il a très mal vécu de devoir se taire pendant toute cette période. C'est un militant depuis toujours, avant elle, et il a été victime du syndrome Schönberg (la journaliste et compagne de Jean-Louis Borloo, Ndlr)", explique Bérengère Bonte. Quand sa conjointe est entrée au gouvernement, Xavier Cantat a dû arrêter sa participation aux Grandes Gueules de RMC. "On lui a dit 'tu la boucles'. Il a été convoqué au ministère de sa femme dans les premières semaines. Honnêtement, je n'ai jamais vu ça", relate l'auteure. Et de compléter : "Il y avait deux ministres Verts au gouvernement, ils savaient qu'ils étaient attendus au tournant. Or ils avaient un personnage bouillonnant à leurs côtés, donc ils ont anticipé."

«La politique du gouvernement était encore pire que ce qu'il avait imaginé»

Mais malgré les consignes, Xavier Cantat ne se retiendra pas de tweeter. A plusieurs reprises. Le 14 juillet 2013, il se réjouit que sa place reste vide aux côtés de Cécile Duflot lors du défilé militaire. Déjà en octobre 2012 quand les CRS avaient débarqué à Notre-Dame-des-Landes, "la couture (avait) pété". "Quand la soi-disante gauche fait pire que la droite, ça me fait sortir de mes gonds", explique le militant dans l'ouvrage. "La politique du gouvernement était encore pire que ce qu'il avait imaginé", ajoute Bérengère Bonte. Finalement, suite à la polémique, Xavier Cantat cessera de parler; puis Cécile Duflot quittera le gouvernement. "Bien sûr qu'il comprenait que cela compliquait la tâche de sa femme. En même temps, il se demandait 'pourquoi il faudrait se taire'."

Le plus "différent" : Joseph Zimet

"C'est sans doute Joseph Zimet, qui est de gauche avec une femme plutôt de droite", juge Bérengère Bonte. Plutôt de droite car, explique-t-elle, Rama Yade "entre en politique non pas pour aller à droite, mais pour aller avec Sarkozy". Pourquoi sont-ils si différents? "Lui est clairement structuré à gauche politiquement. Elle, ne l'est pas. Elle a toujours beaucoup brouillé les pistes." Mais Joseph Zimet, historien qui est passé par des cabinets ministériels d'ouverture sous Sarkozy, encourage sa compagne, sa "Beyoncé". "Je l'encourage comme quelqu'un qui va passer une audition. Pour moi, elle fait ses grands débuts. C'est une cantatrice ou une instrumentiste de talent. Elle a été repérée", relate-t-il, évoquant le grand meeting de la porte de Versailles en janvier 2007 où Rama Yade avait pour la première fois pris la parole.

«Lui est clairement structuré à gauche politiquement. Elle, ne l'est pas»

Joseph Zimet, "clairement de gauche", est le directeur général de la mission du centenaire de la Première guerre mondiale. Dans son ouvrage, Bérengère Bonte raconte une anecdote. Le jour du second tour de la présidentielle de 2007, qui opposait Nicolas Sarkozy à Ségolène Royal, Joseph Zimet s'est retrouvé involontairement enfermé par Rama Yade. "C'est vraiment très anecdotique, mais c'est cocasse, car ça ressemble à un acte manqué", estime l'auteure.

Le plus "extérieur" : Jean Lebranchu

Cela ne fait pas de doute. Celui qui est le plus "extérieur" au monde politique est bel et bien Jean Lebranchu, le mari de Marylise, ministre de la Décentralisation et de la Fonction publique. "Non seulement, il est extérieur à la politique et en plus, extérieur à Paris", précise Bérengère Bonte, qui parle d'un "mode de fonctionnement totalement assumé" par le couple. "C'est leur stabilité." Pour Marylise Lebranchu, quand elle rentre le week-end à Morlaix (Bretagne), "le mieux qui puisse (lui) arriver est que tout le monde se fiche de ce qu'(elle) a fait dans la semaine", relate l'auteure. "Ils ne discutent pas de circonscriptions pendant tout le week-end", ajoute-t-elle.

«Non seulement, il est extérieur à la politique et en plus, extérieur à Paris»

"On marche des heures sans se parler. Lui devant, moi derrière. Depuis des années. Je connais par coeur les défauts de son sac à dos", confie d'ailleurs la ministre dans l'ouvrage. Mais son mari est "quelqu'un de précieux" : "Il partage beaucoup de ses convictions. Son métier de psychiatre l'a beaucoup servi quand elle était garde des Sceaux", relate Bérengère Bonte. Et Marylise Lebranchu n'hésite pas à l'appeler pour trouver "les mots justes".

© 2015 Le Jdd.fr. Tous droits réservés.


Qui sont les hommes des femmes politiques ?
Madame Figaro (site web) - Jeudi 11 juin 2015 - 18:45 UTC +02:00
Pauline Verduzier

Ils gravitent dans l'ombre de leur femme ministre, secrétaire d'État ou présidente de parti. Ils s'appellent Xavier, Jean-Pierre ou Laurent. Ils ont souvent fait de la politique sans avoir eu la même exposition que leur compagne ou exercent dans un domaine complètement différent. Soutiens inconditionnels, parfois conseillers, il leur arrive aussi, par leurs bourdes, de gêner Madame dans l'exercice de ses fonctions. Qui sont ces " hommes de ", auxquels la journaliste Bérengère Bonte vient de consacrer une enquête fouillée ? Décryptage.

C'est en aidant Rama Yade à porter des packs d'eau minérale que Joseph Zimet se fait remarquer de la future secrétaire d'État du gouvernement Fillon II. Des années de mariage plus tard, cet historien et homme de gauche parle encore d'elle comme de sa "Beyoncé", apprend-on dans Hommes de… (Éditions du Moment)(1), le livre de la journaliste Bérengère Bonte, qui est allée à la rencontre de ces époux et partenaires des femmes de pouvoir. Ceux dont la compagne est sous le feu des projecteurs alors qu'eux évoluent dans la discrétion, comme Boris Vallaud, l'époux de Najat Vallaud-Belkacem et le secrétaire général adjoint de la présidence de la République. Le couple s'est constitué sur les bancs de Sciences Po, comme celui d'Antoine et Simone Veil avant eux. D'autres duos cités dans l'enquête se sont formés dans leur cercle politique. Ainsi de Laurent Olléon et Fleur Pellerin, qui ont tous les deux travaillé sur la campagne de Ségolène Royal en 2007, la maire de Paris Anne Hidalgo et le député Jean-Marc Germain ou Marine Le Pen et Louis Aliot. Enfin, certaines alliances se sont nouées avec des " hommes venus d'ailleurs " comme Louis Boutin, informaticien, ou Jean Lebranchu, psychiatre aujourd'hui retraité qui préfère " rester extérieur à tout cela ". Le dénominateur commun à ces hommes qui avancent au bras des femmes politiques ? Un soutien indéfectible à leur moitié.

Accepter que leur femme prenne la lumière

" Ils sont tous très amoureux et très admiratifs de leur femme, nous explique Bérengère Bonte.Ce sont des couples très soudés. Il y a vraiment une idée de parité assumée, bien au-delà de ce que j'avais imaginé. C'est un rôle dont ils n'ont pas forcément envie de parler, bien qu'ils l'assument au quotidien. " Un engagement qui suppose certaines concessions, notamment lorsque les deux membres du couple sont engagés en politique et que se pose la question de leurs ambitions respectives. Ainsi, quand, en 1999, Michèle Alliot-Marie annonce à son compagnon Patrick Ollier qu'elle veut se présenter à la présidence du RPR alors que lui-même comptait la briguer, il se tait et lui dit que c'est " une merveilleuse idée ". Il sera son directeur de campagne. Plus tard, ils seront les premiers conjoints à œuvrer dans le même gouvernement. Lui devient ministre chargé des relations avec le Parlement tandis qu'elle occupe la fonction de ministre d'État, ministre des Affaires étrangères et européennes.

D'autres conjoints font des compromis pour pouvoir assurer l'intendance. "Un cas frappant est celui de Laurent Olléon qui quitte un cabinet ministériel et retourne au Conseil d'État quand Fleur Pellerin passe à la Culture. C'est un gros ministère et ce n'était plus gérable pour leur vie de famille (le couple a trois enfants, dont un ensemble, NDLR). C'est la raison de ce choix et c'est totalement assumé, note Bérengère Bonte. Dans tous les cas, ceux qui faisaient de la politique en même temps ont accepté que ce soit leur femme qui prenne la lumière." On pense aussi à Jean-Pierre Philippe, le mari de Nathalie Kosciusko-Morizet et ancien maire socialiste, pour lequel l'accession de NKM à l'Élysée est devenue " l'un des buts, si ce n'est sa raison d'être ", écrit la journaliste. C'est à lui que la dame lance en pleine réunion, à l'annonce d'un déplacement : "Tu prendras les enfants et je vous rejoindrai. " Jean-Louis Brochen, le discret second époux de Martine Aubry, avocat et ancien adjoint à la culture de Pierre Mauroy, se transforme quant à lui en " chauffeur ou en superintendant. Jamais très loin, toujours à l'affût, mais définitivement en retrait ". Le vice-président du FN, Louis Aliot, fait cette étonnante confession : " Le jour où elle (Marine Le Pen) entre à l'Élysée, j'arrête tout."

Coachs à domicile

Certains se révèlent être de véritables coachs. Joseph Zimet, même s'il se défend de tenir ce rôle, dit à Rama Yade d'aller faire pipi avant de monter sur scène lors du meeting de Versailles du 14 janvier 2007 et la conseille à chaque occasion. " Rama Yade sortait de Sciences Po et travaillait au Sénat. Tout est allé tellement vite dans son ascension que Zimet est devenu un conseiller officieux très précieux ", explique l'auteure de Hommes de... Quand Fleur Pellerin est accusée d'incompétence après n'avoir pas su citer un livre de Patrick Modiano sur un plateau télé, Laurent Olléon est là pour l'aider à traverser la tempête. Quand elle songe à tweeter une photo d'elle avec un livre du Nobel de littérature, il lui rétorque : " La fille bonne copine, bonne élève, ça va un temps. Tu peux laisser éclater ton énervement. " Certaines femmes politiques préfèrent pourtant laisser leur moitié en dehors des remous de la vie politique et médiatique. " Quand vous rentrez à la maison et que tout le monde se fout de ce que vous avez fait dans la journée, ça relativise tout ! " confie Marylise Lebranchu à Bérengère Bonte.

Certains " hommes de " sont aussi, selon elle, clairement féministes. C'est le cas de Xavier Cantat, photographe de Noir Désir, le groupe de son frère, et mari de Cécile Duflot. " C'est intéressant de parler de ce débat-là du point de vue des hommes, de voir comment ils vivent les attaques sexistes par exemple, commente la journaliste. Cantat a pris en pleine figure les sifflets visant Cécile Duflot (l'ex-ministre avait été sifflée par des députés UMP à cause d'une robe à fleurs, NDLR). C'était difficile car il essayait de protester mais ne voulait pas passer pour le mâle dominant qui chercherait à la protéger. " D'autres ont du mal avec l'idée que leur femme puisse être la cible de tentatives de séduction dans un univers encore très masculin. Patrick Ollier assume sa jalousie et Joseph Zimet avoue à Bérengère Bonte qu'il lui est arrivé de s'inquiéter pour Rama Yade quand " Sarko l'appelait tout le temps ". Il a aussi cette phrase : " Ce qui est parfois un peu curieux, c'est l'incrédulité des gens quand j'arrive au bras de Rama. (…) Je sais que je ne suis pas Denzel Washington ou Georges Clooney, mais bon… C'est moi qu'elle a choisi ! " Parfois, les clichés s'inversent complètement. Louis Aliot, compagnon de Marie Le Pen, raconte ainsi qu'il est soupçonné d'avoir bénéficié d'une " promotion canapé " au FN.

Les bourdes de Monsieur

Dans d'autres cas, la femme fait les frais des bourdes de son conjoint. Dans un chapitre intitulé " Quand Monsieur gêne Madame ", l'enquêtrice raconte comment l'anti-système Xavier Cantat est, en 2013, convoqué par la cellule de communication du cabinet de sa compagne, avant la petite tempête politique provoquée par deux de ses tweets quelque temps plus tard. Le 14 juillet, il tweete : " Fier que la chaise à mon nom reste vide au défilé de bottes sur les Champs-Élysées ". Ce qui vaut un petit mot de Geneviève de Fontenay à sa femme : " Chère Cécile (Duflot, NDLR), soyez fière de votre compagnon. Il en faudrait davantage des Xavier comme lui devant toutes ces carpettes ! " Plus tard, Cantat se fendra d'un autre tweet, anti-Valls celui-là. " Si j'ai bien compris, désormais #Valls devra obtenir l'autorisation de #Matignon avant de pouvoir tenir des propos racistes ", écrit-il, en référence aux nouvelles règles de communication imposées aux équipes ministérielles. La sortie se retourne contre celle qui est alors ministre du Logement. Nicolas Dupont-Aignan explique qu'elle doit démissionner. Audrey Pulvar lui demande si sa relation amoureuse est terminée.

À Bérengère Bonte, Cantat, qui se dit " plus libertaire que Cécile " et surnomme Hollande " Potiron ", explique sa frustration et avoue se demander souvent : " Est-ce que ça, je peux le dire ? " "C'est vécu comme quelque chose de douloureux, explique la journaliste. Xavier Cantat, c'est un militant de toujours qui supporte mal ce qui était imposé aux "femmes de", auxquelles on demandait de se taire et dont les vacances étaient pourries par la politique." Selon elle, il est " assez symptomatique qu'on ait tellement attendu au tournant le conjoint d'une ministre". L'affaire serait un révélateur du traitement différencié réservé aux femmes en politique. Elle n'a jamais entendu parler de cas où la conjointe d'un ministre aurait été convoquée. Pour l'auteure de Hommes de..., la vraie difficulté reste dans le "regard de la société" : "Quand le psychiatre Jean Lebranchu exerçait encore, ses patientes lui demandaient : "Mais qui s'occupe de vous ? Qui vous fait à manger ?" Cela le faisait beaucoup rire. " En acceptant ce rôle d'"homme de", ces fidèles compagnons seraient de véritables pionniers. "Je trouve ces hommes d'une grande modernité, conclut la journaliste. On voit à quel point ce sont des précurseurs."

(1)Hommes de…, de Bérengère Bonte, Éd. du Moment, 179 p., 17,95 €.

© 2015 Madame Figaro (site web). Tous droits réservés.

(6/6/2015)
Samedi soir, Laurent Ruquier recevait notamment BERENGERE BONTE pour le livre Hommes de... aux éditions du Moment.





L'Express, no. 3335 - Document/Pouvoir, mercredi 3 juin 2015, p. EXP84

Ils partagent la vie d'une femme politique, pas forcément ses opinions. Hommes de...(Ed. du Moment), la journaliste Bérengère Bonte raconte l'existence - parfois tumultueuse - des princes consorts de la République.

C'est une espèce en voie d'apparition : compagnons ou maris, ils sont les « hommes de... » , condamnés à être la doublure de leur moitié. C'est elle qui est sous les feux de la rampe, devenue ministre et - plus important - souvent érigée au rang de « people » . Alors que les quinquennats de François Hollande et de Nicolas Sarkozy sont marqués par la saga des Premières dames (Cécilia, Carla, Valérie, Julie), nul ne prête attention à ceux qui vivent dans l'ombre d'une femme politique. Bérengère Bonte, journaliste à Europe 1, répare l'injustice et raconte leurs destins. Manquent à l'appel quelques poids lourds : Boris Vallaud, secrétaire général adjoint de l'Elysée et mari de la ministre de l'Education nationale, mais aussi les compagnons - éventuels? - de Christiane Taubira ou Ségolène Royal. Car les obstacles n'ont pas manqué sur la route de l'auteur : « Une fois seulement, pendant cette enquête, j'ai entendu : "Je vais demander à ma femme, c'est elle qui décidera." C'était dans la bouche du mari de Marion Maréchal-Le Pen. Le psychodrame au sein de la dynastie Le Pen n'avait pas encore atteint l'épisode paroxystique d'avril-mai 2015. Mais la précautionneuse députée du Vaucluse a décidé que ce serait non. Une fois aussi, j'ai senti tout un clan - autour de NKM - en alerte générale, avec boucle d'e-mails, en raison de cette enquête sur "Monsieur". »

Croyant faire de l'esprit, Nicolas Sarkozy s'adresse un jour à « Monsieur Merkel » , alors que le conjoint de la Chancelière se nomme... Joachim Sauer. Cette indélicatesse illustre ce sort peu enviable, que les femmes subissent depuis l'Antiquité : n'exister que par l'autre... Rebelle comme Xavier Cantat ( « Monsieur Duflot » ), original comme Jean-Pierre Philippe ( « Monsieur NKM » ), ou invisible comme Jean Lebranchu ( « Monsieur... Lebranchu » !), en voici qui, en pionniers, expérimentent la brûlure froide de l'ombre portée du pouvoir.

© 2015 L'Express. Tous droits réservés.





EXTRAITS

LAURENT OLLÉON « Monsieur Pellerin » : L'ÉVINCÉ 

Sans se connaître, l'un et l'autre s'activaient comme petites plumes dans l'équipe Jospin. L'un et l'autre ont été mis K.-O. par le résultat du 21 avril 2002. L'un et l'autre ont vécu comme un drame ce que le conseiller d'Etat appelle une « obligation d'aller soutenir Jacques Chirac contre Jean-Marie Le Pen » . La différence, c'est que l'un l'a fait, l'autre pas. « Moi, je suis allé voter Chirac sans aucun état d'âme. Parce que c'est un républicain, explique Laurent. Fleur ne l'a pas fait, Fleur a refusé. Elle avait soutenu Jospin, voté pour lui dès le premier tour. Elle trouvait insupportable de devoir réparer les erreurs de ceux qui s'étaient égarés sur les votes de Mamère, Taubira, Chevènement, Besancenot. Elle se disait que Chirac n'allait pas être battu, que c'était injuste de devoir faire ce vote. » [...]

Ce mercredi 21 juin 2012, Fleur et Laurent patientent dans le bureau de Monsieur au Conseil d'Etat. Coup de fil du Premier ministre. Conversation brève. Elle raccroche et annonce : « Il me propose l'économie numérique, l'innovation et les PME. Et ministre délégué. - Super! » Tous deux imaginent qu'il y aura des secrétaires d'Etat en dessous. Finalement, ce ne sera pas le cas. « Tu es contente? se réjouit le mari galant. - Oui, oui, je suis super-contente! » répond la nouvelle ministre déléguée, toutefois bien consciente que les réjouissances vont être compliquées. Un bon resto, un bon vin, quand même. Rien de plus. « Fleur était gênée! Franchement, ça gâchait sa propre joie » , révèle son mari, qui, le lendemain, la conduit à sa passation de pouvoir et file au Conseil d'Etat rouvrir les cartons qu'il avait bouclés pour un départ hypothétique à l'Elysée. Fausse alerte. En quelques jours, « Monsieur Pellerin » est passé de l'euphorie au dépit.

PATRICK OLLIER « Monsieur Alliot-Marie » : LE SAGE

POM et MAM feront plus fort encore! Un baiser entre ministres sur les marches de l'Elysée. Ils sont les seuls à ce jour à pouvoir s'en vanter. Un baiser secret, comme un défi d'ados amoureux. Aucun photographe n'a immortalisé la scène. « Respect de l'institution, quand même » , fait mine de s'indigner Patrick Ollier, pas peu fier, toutefois, de raconter l'exploit. « On rêvait d'être ministres dans le même gouvernement pour pouvoir s'offrir ce plaisir. Et on l'a savouré! » [...]

Nicolas Sarkozy enfonce le clou. « Tu ne comprends donc pas? Je veux que tu rentres au gouvernement, comme ministre des Relations avec le Parlement! ordonne Sarko. - Mais Nicolas, il y a trente-deux heures, tu m'as dit que je ne pouvais pas être ministre parce que Michèle y était... Elle ne part pas, elle? s'inquiète le mari préparé à une énième frustration. - Non non! Elle reste! Mais j'ai vérifié avec la presse, tu es respecté, il ne se passera rien. »

JEAN-PIERRE PHILIPPE « Monsieur Kosciusko-Morizet » : LE RABROUÉ

Dans les rencontres à l'extérieur, en revanche, Nathalie devient dure, cassante. Difficile d'accepter les critiques publiques de la part de l'homme avec lequel on s'endort tous les soirs. Pour JPP, ça ne déménage jamais assez. Dans son esprit, chaque réunion est faite pour retourner la table. Jean-Pierre la tornade impose une règle tacite : une idée par quinzaine. Et jamais de relâche. En face, la phrase qu'on entend le plus souvent dans la bouche de Nathalie commence par : « T'es gentil, mais... »

Régulièrement, elle le renvoie à son rôle de conjoint. Qu'on envisage une intervention de la candidate tel jour, à tel endroit, et la voilà qui se tourne vers lui : « OK, à ce moment-là, je partirai plus tard en Normandie, tu prendras les enfants et je vous rejoindrai. » JPP reste de marbre. Autour de la table, la directrice de campagne, les conseillers politiques ou de com' coincent aussi. Tout le monde comprend rapidement que ce mélange des genres ne peut pas durer. « Désormais, ils gèrent leur couple politique de manière très professionnelle, explique un proche dans un vocabulaire qui fait un peu froid dans le dos. Le "comité exécutif" du couple se réunit parfois pour parler des grandes orientations, mais ils ne rentrent pas dans le détail. »

[...] Courant juillet [NDLR : 2008], JPP, paniqué, appelle Grinsztajn [NDLR : son éditeur]. « J'ai un problème. Valérie Pécresse veut me confier une mission au ministère. Il faut absolument qu'on sucre le passage du bouquin sur la réforme des universités » , explique l'énarque. L'éditeur, sur une plage corse, temporise et explique qu'ils verront ça à son retour. Mais, une heure plus tard, nouveau coup de fil : « Nathalie vient de lire le livre. Il faut tout arrêter, sinon elle divorce! » Dans l'ouvrage, que nous avons pu nous procurer, JPP, ex-conseiller au ministère de l'Education sous Lang, n'y va pas avec le dos de la cuillère sur la réforme de l'université. « Une réforme pour empêcher le changement, écrit-il. Avec l'université, on hésite entre la catastrophe et le non-sujet. L'été 2007 aura résonné d'une étrange façon. Le président de la République est venu "sauver" la réforme proposée par sa ministre. [...] Ce fut une réforme mais elle ne réforme rien. [...] Nous avons besoin de diplômés du supérieur et nous renvoyons des cohortes d'étudiants vers l'échec. » [...] Bien que le livre ait reçu son « bon à tirer » , le feu vert pour l'imprimerie, sa publication est stoppée. JPP appelle Philippe- Michel Thibault [NDLR : directeur de collection] et lui passe NKM : « Vous ne pouvez pas publier ce livre! prévient la secrétaire d'Etat. - Sincèrement, il n'a rien d'un pamphlet, plaide PMT. Ce n'est qu'un essai politique, vraiment pas critique contre le gouvernement, ni contre le président. - C'est déjà trop! Nicolas Sarkozy n'aime pas du tout les intellectuels et il n'a pas d'humour » , s'inquiète- t-elle.

JEAN LEBRANCHU « Monsieur... Lebranchu » : LE PSY

« Mon mari m'a rendue meilleure garde des Sceaux! » répond-elle tout de go. L'hommage est pour le moins inattendu. « Quand je suis arrivée à la justice [en 2000], j'ai progressé parce que j'avais un psychiatre à la maison. Psychiatre hospitalier en plus. Un militant. Un mec qui ne gagne pas beaucoup de sous mais qui travaille comme un fou et qui observe la société. » Dans les années 1970, au début de leur mariage, Jean l'embarque dans les groupes lacaniens. Ces groupes d'échange entre psys la passionnent. « Ça m'a permis un regard sur la société différent. Jean m'expliquait des choses que je ne voyais pas. Sur les rapports entre les gens, sur l'autorité à l'école. Quand je suis devenue garde des Sceaux, ça m'a beaucoup servi au moment de ce grand débat sur la question du mensonge chez les enfants victimes d'abus sexuels. Au moment de l'affaire d'Outreau aussi. C'est Jean qui m'a appris que les enfants pouvaient mentir. »

XAVIER CANTAT « Monsieur Duflot » : LE RÉVOLTÉ

Cantat poursuit : « Je trouve que ce type [NDLR : Hollande] est malhonnête, incompétent. Exactement ce que je pense de lui depuis trente ans, depuis sa première campagne législative, c'est-à-dire un pauvre type. J'ai pris du recul sur le militantisme, j'ai arrêté Les Grandes Gueules... et là, je bous. Donc, mon premier tweet, c'est sur Notre-Dame-des-Landes! C'était un acte de militant politique. Ce n'est peut-être pas ce qu'il y a de plus efficace. Mais c'est clair que là, il y a une couture qui pète! Quand les CRS déboulent à Notre-Dame-des-Landes, quand la soi-disant gauche fait pire que la droite, ça me fait sortir de mes gonds. » [...]

Autour de la table, outre les Duflot- Cantat, Christiane Taubira, Arnaud Montebourg, Benoît Hamon et Madame. Depuis l'élection de François Hollande, ces quatre-là se réunissent régulièrement. A vrai dire, pour Montebourg, c'est la première - au dîner précédent, figurait à sa place Kader Arif, désormais jugé trop hollandais. D'entrée de jeu, il attaque par une question très « montebourgienne » : « Et toâââ Xavier, toi aussi tu es écolôôôô? » Xavier Cantat refrène un sourire. Montebourg est tel qu'il l'avait rêvé. « Moi, d'abord, je suis de gauche. C'est pour ça que je n'ai pas voté PS depuis 1983 » , répond spontanément le compagnon de Cécile Duflot. Rires entendus de la tablée. Léger affaissement quand même du ministre du Redressement productif et de l'Industrie. Cécile, juste à côté, fait signe à Xavier : « Mollo. » « Non, c'est pas vrai...! » désamorce la ministre écolo. En plus, Cécile à raison. A la présidentielle de 2012, Xavier a fait une exception! « Bon, oui, OK, cette année j'ai voté Potiron [François Hollande], parce que je suis un gars loyal... mais franchement ça n'aurait pas été mon choix! » [...]

Même dans ce cadre, l'intérêt et la stratégie entrent en jeu. « On se parle toujours avec derrière la tête : "Est-ce que ça, je peux le dire? Est-ce qu'il vaut mieux que je le taise? Est-ce que ça va avoir des conséquences?" Evidemment, ils savent bien que je ne vais pas élaborer une stratégie pour flinguer tel ou tel. Ce que je pense, tout le monde s'en fiche. » Alors il se tait. Mais il ajoute quand même : « Humainement, c'est un monde exécrable! » [...] Deux mois avant les élections départementales de mars qui verront le FN s'envoler, Xavier Cantat ne retient pas ses coups. « Hollande fait monter l'extrême droite volontairement... parce qu'il se dit : "Face à la droite traditionnelle, je suis déjà mort. La seule chose qui peut me sauver, c'est un deuxième tour contre Marine Le Pen." Valls tient des propos d'extrême droite. Mais bon, on en revient à mon tweet sur Valls raciste... Je vais peut-être arrêter. » Quid d'un deuxième tour Valls-Le Pen? « Si je tweete à ce moment-là, je tweeterai : votez blanc! » Mais, on l'a compris, même de tweeter, désormais, Xavier Cantat s'abstient.






0 commentaires: