Danone estime que les éléments avancés par le groupe Wahaha ne sont pas cohérents avec les faits. " L'inconvénient, c'est qu'ils ont donné 100 % raison à Wahaha. C'est une décision complètement biaisée, qui ne tient pas compte du fond. Un des juges n'aurait pas signé, il est clair qu'il y a eu des pressions ", déclare, du côté français, une source proche du dossier. Par ailleurs, un tribunal à Guilin a statué lui aussi en faveur de Wahaha dans un procès que celui-ci avait intenté à Danone pour avoir nommé un de ses directeurs au conseil d'administration d'une des coentreprises.
Danone détient 51 % de la coentreprise Danone-Wahaha, qui est formée de 39 sociétés. Celles-ci sont seules habilitées en principe à utiliser la marque et à distribuer les produits Wahaha. Mais le groupe français avait découvert l'existence de " circuits parallèles ", au travers d'usines qui ne faisaient pas partie de l'accord, mais qui écoulaient tout de même des produits sous cette marque.
Danone avait proposé de " racheter " ces circuits. L'homme d'affaires chinois avait refusé l'offre et dénoncé publiquement le comportement " colonialiste " de Danone et ses visées " impérialistes ", puisque, depuis son mariage avec Wahaha, le groupe français avait multiplié les participations dans d'autres groupes agroalimentaires chinois.
Danone et son directeur général en Asie, Emmanuel Faber, avait alors choisi une approche " légaliste ", en portant le différend devant la cour d'arbitrage de Stockholm au motif que Wahaha avait violé les clauses de non-concurrence prévues dans le contrat. Parallèlement, le groupe de Franck Riboud engageait en juin une action judiciaire pour concurrence déloyale aux Etats-Unis contre des sociétés détenues par des proches de M. Zong et basées dans des paradis fiscaux - ces dix sociétés ayant vu, depuis, leurs avoirs gelés.
RECHERCHE D'UNE SORTIE HONORABLE
Quelques jours après l'action de Danone, le fondateur de Wahaha ripostait en saisissant la cour d'arbitrage de Hangzhou (compétente pour tout ce qui concerne la marque Wahaha), au motif que le transfert de marque en faveur de la coentreprise, sur lequel les deux parties s'étaient accordées en 1996, n'avait jamais été validé par les autorités chinoises compétentes. Or la capitale du Zhejiang est aussi le siège de Wahaha, et le gouvernement local est actionnaire minoritaire dans l'entreprise commune...
Cette décision intervient quelques semaines seulement après avec la visite de Nicolas Sarkozy en Chine, fin octobre. Le chef d'Etat français a fait part à son homologue chinois, Hu Jintao, de sa préoccupation au sujet du dossier Wahaha-Danone. M. Sarkozy a plaidé pour " une solution à l'amiable ". Un médiateur a été désigné pour y parvenir. La partie française chercherait désormais une sortie honorable pour Danone, qui prendrait, selon nos sources, la forme d'une baisse de sa participation dans la coentreprise, autour de 40 %. En attendant, la décision de la cour d'arbitrage d'Hangzhou et le peu de signes de conciliation dont fait montre Zong Qinghou pénalisent un peu plus les affaires de Danone en Chine.
Brice Pedroletti
PHOTO - Le patron de Wahaha, Zong Qinghou / reuters
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