mardi 13 mai 2008

Les autorités de Pékin adoptent un ton conciliant face à Tokyo - Michel de Grandi

Les Echos, no. 20169 - International, mardi, 13 mai 2008, p. 9
Pour la première fois depuis longtemps, la visite du président chinois au Japon s'est tenue dans un climat détendu. Les questions d'efficacité énergétique et de lutte contre la pollution ont été au coeur des débats. Le président chinois, Hu Jintao, s'est rendu au siège de Matsushita-Panasonic à Osaka. Il a demandé à Fumio Ohtsubo, son président, de coopérer davantage.




En faisant volontairement table rase du passé, la Chine et le Japon viennent indiscutablement d'engager leurs relations sur une nouvelle voie. La visite de cinq jours que Hu Jintao, le président chinois, vient d'effectuer au Japon n'a certes pas permis de régler les problèmes en suspens, à commencer par le différend sur le gisement gazier et pétrolier situé à la limite des eaux territoriales sino-japonaises en mer de Chine orientale. En revanche, le climat créé par cette visite change fondamentalement la donne.

La visite de Hu Jintao, bien que sous haute surveillance, n'a pas été marquée par un quelconque dérapage, comme ce fut le cas, dix ans plus tôt, lors de celle de son prédécesseur, Jiang Zemin. L'ancien président chinois avait profité de son séjour à Tokyo pour redire les contentieux historiques non résolus. Celle-ci au contraire restaure le principe de rencontres annuelles de haut niveau, après l'interruption des contacts entre 2001 et 2006. Les visites répétées de Junichiro Koizumi, l'ancien Premier ministre japonais, au temple shintoïte du Yasukuni, où est honorée, entre autres, la mémoire de criminels de guerre japonais, avaient considérablement dégradé les relations bilatérales. Cette fois, « la Chine a donné d'elle l'image d'un pays plus réceptif », explique Robert Dujarric, de Temple University à Tokyo. A deux mois des JO de Pékin et compte tenu du parcours chaotique de la flamme olympique, la Chine a mis son arrogance diplomatique entre parenthèses. Consciente que ses réactions intransigeantes peuvent la desservir, elle sait tout autant que, en s'ouvrant sur le monde, elle devient aussi plus vulnérable.

Savoir-faire japonais

En resserrant ses liens avec le Japon, la Chine poursuit un autre but, celui de profiter du savoir-faire de son voisin en matière de protection de l'environnement. Juste avant de retourner à Pékin, le président chinois s'est rendu au siège de Matsushita-Panasonic à Osaka. A Fumio Ohtsubo, son président, il a demandé de coopérer davantage. De son côté, la firme, qui est le premier fabricant mondial de produits électroniques grand public, installe à Pékin une réplique de sa maison du futur déjà visible à Tokyo. Elle utilise notamment un chauffage à pile à combustible.

Auparavant, le chef de l'Etat chinois avait visité une usine ultramoderne de recyclage d'appareils électroniques et de bouteilles usagées et a déclaré vouloir « introduire en Chine la technologie avancée du Japon pour l'environnement ».

En rencontrant des chefs de grandes entreprises japonaises, Hu Jintao a ainsi appelé à la coopération pour les technologies environnementales, un domaine où le Japon est perçu comme leader mondial. « La coopération sur l'environnement et l'économie d'énergie est pleine de promesses. J'espère que les entreprises des deux pays vont bien s'engager dans ce domaine et en faire une nouvelle priorité », a-t-il dit.

Le Japon est tout autant intéressé à aider la Chine à mieux protéger son environnement. Pour une raison économique déjà, car, en consommant moins de matières premières, le pays va contribuer à détendre les prix mondiaux. Pour une raison écologique ensuite : lorsque les vents d'ouest sont particulièrement porteurs, le Japon reçoit la pollution de son voisin. Les deux pays ont d'ailleurs signé une déclaration par laquelle ils affichent leur volonté de coopérer sur le réchauffement climatique. A deux mois du G8, le Japon affûte ses arguments qui divergent pour l'instant des visions européennes. Même s'il désigne la Chine comme l'un des plus grands pollueurs mondiaux, Tokyo a en même temps besoin de son soutien autant pour le G8 que pour l'après-Kyoto, au-delà de 2012.












MICHEL DE GRANDI
DE NOTRE CORRESPONDANT À TOKYO.

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