dimanche 9 novembre 2008

Pékin mobilise près de 600 milliards de dollars et amende sa TVA pour relancer son économie - Yann Rousseau

Les Echos, no. 20297 - International, lundi, 10 novembre 2008, p. 7

Au cours des deux prochaines années, le gouvernement chinois, qui est confronté à un rapide ralentissement de son économie, va massivement investir dans de nouvelles infrastructures et doper ses dépenses sociales pour dynamiser sa demande intérieure. Une réforme de la TVA doit permettre aux entreprises d'économiser 17,6 milliards de dollars.

Pékin n'a pas attendu la fin de la réunion du G20 à São Paulo pour dévoiler, hier, un gigantesque plan de relance de son économie. A l'issue d'une réunion exceptionnelle présidée par le Premier ministre Wen Jiabao, le gouvernement chinois a annoncé sur son site Internet qu'il allait débloquer, avant la fin 2010, au moins 4.000 milliards de yuans, soit 586 milliards de dollars, pour soutenir la croissance du pays, qui vient de tomber à son plus bas niveau des cinq dernières années (9 % au troisième semestre). « Avec l'aggravation de la crise financière globale, le gouvernement doit adopter des politiques macroéconomiques flexibles et prudentes afin de gérer une situation complexe et mouvante », expliquent les autorités dans un bref communiqué, où elles annoncent également une « politique fiscale active » et « un desserrement modeste de leur politique monétaire ».

Si la Chine n'a pas directement souffert de la crise financière occidentale, elle est frappée de plein fouet par le ralentissement des économies américaine et européenne, qui sont depuis plus de vingt ans les principaux moteurs de sa croissance. Les investissements étrangers ont perdu de leur dynamisme et les dizaines de milliers d'entreprises tournées vers l'export ont vu leurs carnets de commandes se vider depuis la mi-septembre.

Inquiétude

Jugé très fiable dans un pays où les statistiques sont souvent suspectes, le dernier indice CLSA (Credit Lyonnais Securities Asia) des directeurs d'achats dans l'industrie manufacturière, qui mesure l'activité réelle des industriels chinois, a plongé en octobre pour tomber à son plus bas niveau (45,2) depuis 2004. L'inquiétude a gagné la population. Les ventes d'immobilier sont en recul dans les grandes villes de la côte Est et les stocks de voitures invendues chez les concessionnaires ont atteint leur plus haut niveau des quatre dernières années en septembre. « Les années dorées sont terminées », résume, dans sa dernière étude, Stephen Green, l'économiste de la Standard Chartered Bank à Shanghai.

Dans leur communiqué, les autorités chinoises assurent toutefois qu'elles vont être capables de « maintenir une croissance économique rapide mais constante », en « stimulant la demande intérieure ». L'essentiel du plan de relance, qui associe des dépenses déjà enclenchées et de nouveaux investissements, sera ainsi consacré à des grands travaux d'infrastructures et à des politiques sociales, affirmait, hier soir, l'agence de presse officielle Xinhua, sans toutefois donner beaucoup de détails sur le programme ni d'explications sur son financement.

De nouvelles constructions d'autoroutes, de lignes de chemins de fer et d'aéroports devraient être rapidement décidées, explique l'agence. Plusieurs centaines de milliards de yuans vont également être débloqués pour la protection de l'environnement, la modernisation du réseau électrique, les projets éducatifs et les logements bon marché. Les campagnes, qui ont peu profité des années de croissance à 10 % mais où résident encore 800 millions de personnes, devraient recevoir une large part des nouveaux fonds débloqués par les pouvoirs publics mais également par les entreprises.

Espérant, en effet, associer les sociétés publiques et privées à son effort de relance, le gouvernement a également dévoilé, hier, une profonde réforme de son régime de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) qui devrait permettre aux entreprises d'économiser chaque année plus de 120 milliards de yuans (17,6 milliards de dollars) en exonérations d'impôts sur leurs investissements en équipements. Au total, le gigantesque plan de relance chinois pourrait, selon les tout premiers calculs des analystes, permettre de doper, l'an prochain, la croissance de près de 2 % afin de la maintenir au dessus des 7 %, jugés vitaux par le pouvoir communiste.

YANN ROUSSEAU

DE NOTRE CORRESPONDANT À PÉKIN.

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