Des proches de victimes ont regretté que les autorités gouvernementales soient épargnées par le procès.
DEUX peines de mort, une condamnation à la prison à vie, la Chine n'a pas eu la main légère hier en annonçant les premières sentences dans la tragique affaire du lait contaminé, qui a tué 6 nourrissons, rendu malades plus de 300 000 enfants, traumatisé le pays et ébréché un peu plus l'image internationale du « made in China ».
Les trois hommes condamnés à mort - dont un avec sursis, ce qui revient à un emprisonnement à vie - sont des « trafiquants » de poudre de lait, qui fournissaient les grands groupes. Après avoir écoulé 600 tonnes de poudre de lait contenant de la mélamine, Zhang Yujun a été le premier à se voir signifier la peine capitale, pour avoir « mis en danger la sécurité publique ». L'ancienne patronne du groupe Sanlu - au coeur du scandale et désormais en faillite -, Tian Wenhua, a, elle, été condamnée à la prison à perpétuité pour avoir vendu des produits « faux et de qualité inférieure ». Cette responsable locale du PC s'est vu infliger une amende de 2,3 millions d'euros.
Trois autres cadres de Sanlu étaient jugés. L'un d'entre eux comparaissait en chaise roulante après une tentative de suicide. Ils sont accusés d'avoir longtemps caché l'affaire aux autorités locales, qui ont elles-mêmes étouffé le scandale en cet été olympique 2008. Le procès, ouvert il y a un mois, comptait 21 accusés et se tenait dans la ville de Shijiazhuang (province du Hebei), fief du groupe Sanlu. Outre les sentences lourdes énoncées, les peines infligées vont de deux à quinze ans de prison.
L'enquête a montré que 22 sociétés avaient vendu du lait frelaté. Elles ont créé un fonds d'indemnisation de 160 millions de dollars, jugé insuffisant par certaines familles et leurs avocats. La semaine dernière, les parents d'un enfant décédé, à l'âge de 5 mois, ont été les premiers à accepter une somme de 22 000 euros en échange de l'abandon des poursuites contre Sanlu. Les avocats des victimes ont dénoncé à plusieurs reprises les pressions dont ils étaient l'objet. Et plus de 200 familles ont décidé de saisir la Cour suprême, la plus haute instance du pays.
Le premier ministre, Wen Jiabao, a battu sa coulpe et reconnu qu'il y avait eu de graves dysfonctionnements dans les procédures de contrôle. Hier, des proches de victimes ont fait connaître leur frustration, regrettant que les autorités gouvernementales soient épargnées par le procès. « À rebours d'une formule bien connue, commente un observateur, la Chine ne connaît que des coupables, mais pas de responsables... »
PHOTO - 1) Une mère dont le fils est décédé suite à l'empoissonnement par le lait contaminé crie son désespoir devant le tribunal de Shijiazhuang (Hebei) avec un panneau où sont écrits : "Rendez-moi mon enfant !". REUTERS PICTURES
2) Zhang Yujun (2e à droite) and Zhang Yanzhang lors de leur procès dans la ville de Shijiazhuang, le 26 décembre 2008 / REUTERS
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