lundi 16 février 2009

Pavillon vert pour le fret maritime de matières premières industrielles

Les Echos, no. 20362 - Marchés, jeudi, 12 février 2009, p. 36

Le restockage chinois en minerai de fer et en charbon à coke et une pénurie passagère de navires de grande dimension font rebondir les taux de fret maritime. Mais la demande finale de produits sidérurgiques va rester faible en 2009.

L'indice Capesize avait touché son plus bas niveau historique le 3 décembre, à 830 points.

Plusieurs économistes considèrent l'évolution du taux de fret des matières premières sèches à usage industriel comme un indicateur avancé de la conjoncture industrielle mondiale. Les achats et le stockage de matériaux bruts étant, en effet, les préalables indispensables de toute augmentation de la production manufacturière. Aujourd'hui, alors que tous les clignotants industriels virent au rouge vif, c'est des océans que semble venir la seule note d'espoir. L'indice Baltic Capesize, l'indicateur de prix du fret maritime de matières sèches pour les bâtiments au déplacement généralement supérieur aux 150.000 tonnes, a quitté les fonds marins de son plus bas historique du 3 décembre (830 points) et a repris le large.

Longue pause du nouvel an

L'indice se retrouve aujourd'hui à un niveau 4,5 fois supérieur à celui de ce plancher, dans la zone des 3.600-3.700 points. Depuis le début de l'année, le taux de fret des Capesize a bondi de 318 %, à 37.600 dollars par jour. La reprise des activités en Chine après la longue pause du nouvel an est pour beaucoup dans cette remontée. Après avoir déstocké massivement, les sidérurgistes chinois reviennent en force sur les marchés du minerai de fer et du charbon à coke. Ces deux produits comptent chacun pour environ le quart du transport maritime transocéanique de produits bruts secs. Les taux de fret sur les routes Brésil/Chine et Australie/Chine ont rebondi respectivement de 170 % et 245 % depuis leurs derniers plus bas. Des engorgements passagers des infrastructures portuaires chinoises réapparaissent ici et là, comme au bon vieux temps de l'envolée des prix des ressources naturelles.

Le phénomène a toutes les chances de se reproduire à courte échéance, car les stocks de minerai de fer dans les entrepôts proches des ports chinois restent en retrait de 22 % par rapport à leur sommet de 76 millions de tonnes de septembre 2008. D'autres segments de la demande de minerai de fer manifestent quelques signes de redressement. Les prix au comptant sur le marché chinois se sont appréciés de 33 % depuis octobre 2008, à près de 85 dollars la tonne.

Période de désarmement

Autre raison du changement de cap des taux de fret, les bâtiments de la catégorie Capesize font ponctuellement défaut. Une portion non négligeable de la flotte mondiale de navires marchands sort d'une période de désarmement et une autre partie est immobilisée dans l'attente de la renégociation des contrats d'affrètement.

En dépit de ces différents éléments positifs, l'embellie actuelle pourrait être éphémère. « Certains signes sont encourageants, mais il est trop tôt pour parler d'un vrai rebond des taux de fret », alerte Nicolai Hansteen de Lorentzen & Stemoco, un important affréteur norvégien. L'expert préfère qualifier le mouvement de rallye classique dans un marché qui reste baissier. Les clients des producteurs de minerai de fer acquiescent. En présentant hier les résultats de son groupe, Lakshmi Mittal, le patron d'Arcelor-Mittal, a anticipé une baisse « substantielle » des prix annuels du minerai de fer pour 2009 actuellement en discussion. Et ce en raison de la « faible demande globale d'acier cette année ». Les spécialistes tablent sur un recul de l'ordre de 25 à 30 %. « Le restockage chinois actuel ne correspond pas nécessairement à une hausse des achats de produits sidérurgiques », confirme un analyste. Il ne faut pas oublier, enchaîne Yingxi Yu de Barclays Capital, que « la demande pour les matières premières industrielles s'est dégradée dans des proportions significatives au dernier trimestre 2008 ». Dès lors, la prudence reste le maître mot.

MASSIMO PRANDI

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