vendredi 6 mars 2009

Les provinces chinoises tentées par le protectionnisme - Yann Rousseau

Les Echos, no. 20377 - International, jeudi, 5 mars 2009, p. 8

Pour doper leur performance régionale, plusieurs gouvernements locaux ont déjà contraint leurs entreprises à s'approvisionner en matériaux dans leur ville ou leur province et à bouder les produits des régions voisines.

Les autorités centrales chinoises ne vont pas manquer de profiter de la réunion de leur Parlement pour affirmer une énième fois leur attachement aux règles du commerce international et mettre en garde leurs partenaires étrangers contre toute tentation protectionniste. Très remontées contre les campagnes pour le « Buy american » associées au plan de relance du président Obama, Pékin, qui a construit, ces dernières années, près du tiers de la croissance de son PIB sur ses exportations, a promis de bannir toute mesure protectionniste de ses propres plans de relance. Pour témoigner de sa bonne foi, le gouvernement a également envoyé, la semaine dernière, son ministre du Commerce signer pour plus de 10 milliards d'euros de contrats avec des sociétés européennes.

Avec ces démonstrations, la Chine espérait s'être protégée contre toute accusation de protectionnisme. « La menace est tout de même toujours présente », rétorque Joerg Wuttke, le président de la Chambre européenne de commerce en Chine qui pointe la récente poussée des politiques préférentielles dans les provinces chinoises.

Subventions

A la mi-février, la province de l'Anhui a ainsi publié une politique d'encouragement aux achats régionaux. Les responsables de grands travaux, qui sont souvent des entreprises publiques, sont incités à utiliser de l'acier, du ciment et du matériel électrique en provenance de la région et souvent auprès de groupes eux aussi contrôlés par les pouvoirs locaux. A Changchun, dans la province du Jilin, la municipalité a réduit certaines taxes sur les seuls véhicules du producteur local FAW. Les fabricants de machines à laver de Hangzhou ont vu, eux, leurs ventes bondir lorsque le gouvernement de la ville a commencé à subventionner, il y a quelques jours, l'achat de marques « locales ».

Multiples barrières

Apparu avec la décentralisation des années 1980, ce protectionnisme a été encouragé par l'accroissement des responsabilités financières des provinces. Pour réduire leur dépendance aux importations des autres provinces et doper leur propre croissance, les gouvernements locaux ont tous encouragé l'industrialisation de leur propre territoire et ont mis en place toute sorte de barrière (droits de douane intérieurs, marchés publics fermés, rétention de marchandises) pour limiter la pénétration des produits de concurrents issus d'autres zones géographiques. Si Pékin avait réussi, depuis le début des années 2000 à freiner en partie ces excès, il semble impuissant face à la nouvelle poussée de fièvre protectionniste. Pointant l'impact économique déplorable de ces restrictions, Joerg Wuttke appelle Pékin à durcir le ton. « La Chine a tout simplement besoin d'une OMC domestique », tranche-t-il.

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