mardi 14 avril 2009

Pékin édicte son plan pour les droits de l'homme - Arnaud de La Grange

Le Figaro, no. 20126 - Le Figaro, mardi, 14 avril 2009, p. 8

Les autorités chinoises promettent une meilleure protection légale et une liberté d'expression accrue.

PÉKIN a annoncé hier son premier « plan d'action » pour les droits de l'homme alors même que s'ouvre demain la période des anniversaires liés aux événements de Tiananmen. La mort du dirigeant réformateur Hu Yaobang, le 15 avril 1989, avait en effet été le déclencheur des manifestations prodémocratiques qui s'étaient terminées par le bain de sang du 4 juin.

La Chine a donc rendu public un plan d'action sur deux ans, le premier du genre, comme l'a souligné la presse. En préambule, il reconnaît que le pays « a une longue route devant lui pour améliorer la situation des droits de l'homme ». Le texte de 52 pages promet une meilleure protection légale ainsi qu'une liberté d'expression accrue. « L'État garantira les droits des citoyens à critiquer, donner leur avis, se plaindre et accuser les organes d'État et les fonctionnaires », est-il écrit.

Le plan insiste aussi sur le droit de la population à « la subsistance et au développement ». La Chine revendique une définition des droits de l'homme différente de celle des Occidentaux. Elle y inclut des droits de base comme l'alimentation, la santé, l'éducation. Nombre de voix estiment que ces impératifs servent souvent à justifier une absence d'avancées sur les libertés politiques. Tout récemment, ce n'est pas un dissident, mais le directeur adjoint d'un think-tank gouvernemental, Yu Keping, qui a averti que la Chine commettrait une grave erreur si elle freinait les progrès démocratiques en se réfugiant derrière des impératifs de réforme économique et d'amélioration des conditions de vie de la population.

Des écrivains en prison

Pour répondre aux critiques tant extérieures qu'intérieures, la stratégie du gouvernement semble donc mettre l'accent sur des libertés de « proximité », notamment l'amélioration des conditions de détention après des scandales en série sur des détenus morts en prison, le dernier datant d'hier. De fait, une amélioration de la justice et de la liberté d'expression est au coeur des revendications des Chinois, plus que l'exigence d'élections générales dont la nécessité apparaît souvent moins urgente.

« Un plan, intégrant davantage les avis de la société civile, est une avancée face à un rapport classique, confiait hier un observateur, mais l'on voit les limites avec le harcèlement des signataires de la charte 08 dont les demandes démocratiques sont pourtant modérées. » L'écrivain Liu Xiaobo est toujours détenu sans jugement depuis décembre. Et, récemment, l'écrivain Jiang Qisheng a été arrêté et interrogé quelques heures après avoir écrit un article sur Tiananmen. La semaine dernière, un professeur de 75 ans, Sun Wenguang, a été sévèrement battu par des inconnus alors qu'il voulait honorer la mémoire de Zhao Ziyang, le patron du PC évincé en 1989.

Les limites ont aussi été fixées le mois dernier par le président du Parlement chinois, Wu Bangguo, qui a fermement rappelé que la Chine ne « copiera jamais le modèle occidental » et qu'il n'était pas question de marcher vers un système de « séparation des pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire ».

PHOTO - Un manifestant tibétain devant l'ambassade de Chine à Bruxelles, le 6 août 2008 / REUTERS

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