Acer joue désormais dans la cour des grands et tient à le faire savoir. Le fabricant taïwanais d'ordinateurs, passé en l'espace de deux ans de la cinquième à la troisième place mondiale derrière les américains Hewlett-Packard (HP) et Dell, s'est offert début avril un " press tour " - mardi 7 avril à New York, mercredi 8 à Pékin et jeudi 9 à Amsterdam -, assorti d'une campagne publicitaire massive dans la presse.
L'occasion pour son président, l'Italien Gianfranco Lanci, de présenter une flopée de nouvelles machines et de clamer une ambition qui détonne en cette période de crise : faire bondir ses ventes de PC portables de 30 % à 40 % en 2009 par rapport à 2008 et devenir numéro un mondial sur ce segment d'ici deux ans.
Simple assembleur pour le compte des grandes marques occidentales au début des années 2000, Acer a réussi à se faire un nom grâce à une politique de prix agressive rendue possible par des frais de structure très légers : le groupe ne possède ni usine ni réseau de distribution en propre et sous-traite tout l'assemblage de ses machines, principalement en Chine.
Il a également conquis une belle part du marché en réussissant à prendre le contrôle, coup sur coup en 2007, de deux sociétés américaines à forte notoriété : Gateway, particulièrement appréciée des professionnels aux Etats-Unis, et Packard Bell, bien implantée en Europe auprès du grand public.
Ces derniers mois, Acer a encore réduit l'écart avec HP et Dell grâce au succès foudroyant des " mini-PC portables ", des ordinateurs de moins de 500 dollars aux performances techniques modestes, dotés d'un minimum d'applications, surtout destinés à surfer sur Internet. Une politique judicieuse : selon le cabinet d'études anglo-saxon Gartner, en 2009, seul ce segment du marché sera en croissance dans le secteur informatique.
Ce n'est pas Acer, mais un autre taïwanais, Asustek, qui a le premier lancé une gamme de mini-PC portables, les Eee PC, fin 2007. Acer lui a emboîté le pas dès le début 2008. Les dirigeants de HP et de Dell se sont en revanche laissé surprendre par le succès foudroyant de ces petites machines, et leurs produits concurrents n'ont commencé à arriver sur le marché que six mois plus tard.
" Nous ne croyions alors pas vraiment aux PC avec des écrans de 7 ou 8 pouces et un système d'exploitation Linux - logiciels libres - pas assez confortables d'utilisation pour que les ventes décollent. Nous avons attendu d'avoir des PC avec une taille d'écran d'au moins 10 pouces et un système d'exploitation Microsoft, plus simple d'utilisation pour le grand public, pour nous lancer ", explique Olivier Gillet, directeur marketing chez HP France.
Grâce aux mini-PC portables, Acer est devenu numéro un en Europe au troisième trimestre 2008 des ventes de PC portables, le segment de marché que regardent le plus aujourd'hui les professionnels, car celui des PC de bureau est en perte de vitesse. C'est le lancement par Intel, premier fabricant mondial de semi-conducteurs, du processeur " Atom ", particulièrement compact et peu consommateur en énergie, qui a permis la commercialisation des mini-PC portables.
Grâce aux offres couplées avec des abonnements téléphoniques des opérateurs de télécommunication, ces machines ont eu un énorme succès en Europe. Il s'en est vendu 6 millions d'unités, la moitié des ventes mondiales selon Gartner. Les opérateurs proposent une machine subventionnée dotée d'une clé " 3G ", qui une fois branchée sur l'ordinateur permet d'accéder à Internet sans fil via les réseaux de téléphonie mobile.
" Ils sont parfaits en second équipement, notamment pour les professionnels qui se déplacent beaucoup. Ils arrivent aussi à un moment où les consommateurs font beaucoup plus attention à leurs dépenses, explique Bruno Lakehal, analyste chez Gartner. Malgré leur prix, les mini-PC portables ne marchent en revanche pas encore dans les pays en développement, où les réseaux de téléphonie ne sont pas encore suffisamment développés pour assurer une bonne connexion à Internet. "
Mais le succès des mini-PC portables a ses effets pervers. Leur faible prix a fait baisser la marge financière, déjà faible, des constructeurs. Du coup, aujourd'hui, Acer et ses concurrents tentent d'augmenter à nouveau leurs marges en " segmentant " leurs gammes de produits, c'est-à-dire en multipliant les séries limitées, les collaborations avec des designers, les ajouts techniques, afin de pouvoir les vendre plus cher.
Lors de son " press tour ", Acer a ainsi présenté un PC très fin baptisé " Timeline ", dans la lignée du Macbook Air d'Apple, pour 800 euros. Dans le même esprit, HP a lancé un " mininote " dessiné par la styliste new-yorkaise Vivian Tam et un PC portable de 12 pouces permettant d'utiliser des applications informatiques plus lourdes qu'une simple suite bureautique.
Cécile Ducourtieux
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