mardi 14 avril 2009

Pékin se dessine déjà un monde sans dollar - Julie Desné

Le Figaro, no. 20126 - Le Figaro Économie, mardi, 14 avril 2009, p. 18

Le yuan commence à être utilisé comme monnaie de règlement commercial, entre régions chinoises, ainsi qu'avec quelques pays.

LA CHINE tente de se construire un monde sans dollar. Le Conseil d'État, équivalent du gouvernement, a annoncé la semaine dernière son intention d'autoriser cinq grandes villes de Chine à effectuer des transactions transfrontalières en yuan avec Hong-kong et Macao. Le pouvoir central a choisi des régions très exportatrices. Sont concernées Shanghaï et son bassin, ainsi que quatre villes de la très manufacturière province du Guangdong : Canton, Shenzhen, Dongguan et Zhuhai.

La décision de Pékin marque les efforts du gouvernement chinois pour donner au yuan, monnaie encore non convertible, une place dans le commerce international. Hongkong est en effet souvent perçue comme une antichambre des réformes monétaires et financières. Les dispositions prises pour faciliter les règlements de transaction avec l'ancienne colonie britannique pourraient à terme s'élargir à la région, puis au monde.

Accords bilatéraux d'échange

La Chine a par ailleurs signé depuis décembre une série d'accords bilatéraux d'échange (swap) de devises. Signés entre banques centrales, ces accords permettent des échanges de monnaie locale entre les deux pays qui n'ont plus besoin de passer par le dollar pour régler leurs achats. Jusqu'à présent, l'Argentine, la Malaisie, l'Indonésie, la Biélorussie et la Corée du Sud ont emboîté le pas. Mais « certains pays de l'Asea sont en discussion avec nous pour des accords similaires », a assuré Hu Zhengyue, secrétaire du ministre des Affaires étrangères. Séduit par l'idée, le président Lula a de son côté appelé à la mise en place d'un accord similaire pour le commerce bilatéral sino-brésilien.

Les accords de « swap » de monnaie sont un moyen de réduire l'influence du billet vert sur les transactions internationales. Quelques jours avant le G20 de Londres, le gouverneur de la banque centrale chinoise, Zhou Xiaochuan, avait questionné la place du dollar comme monnaie de référence. Limitée par la non-convertibilité de sa propre devise, la Chine est bien consciente que le yuan ne peut prendre le relais, mais souhaite faire progresser son influence dans le système financier mondial et surtout limiter son exposition aux fluctuations du dollar. Ces fluctuations ont déjà coûté cher à Pékin, premier créancier de la dette américaine, et dont les 2 000 milliards de dollars de réserves de change ont connu un net ralentissement ces six derniers mois.

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