Une possible rencontre entre les Prix Nobel de la paix 1989 et 2009 alourdit le contentieux avec Pékin.
Toutes les chancelleries auront les yeux fixés sur Washington, le 16 février prochain, à l'arrivée du petit homme aux yeux rieurs drapé dans sa célèbre toge orange qui incarne la cause tibétaine. Le dalaï-lama rencontrera-t-il Barack Obama, lors du périple de dix jours qu'il entame à travers l'Amérique, comme l'a annoncé Hillary Clinton vendredi dernier ? La Maison-Blanche n'a toujours pas confirmé la date de la rencontre entre les Prix Nobel de la paix 1989 et 2009, se contentant de dire que le président américain verrait le chef de la cause tibétaine « au moment opportun ». Mais on voit mal comment Obama, tout juste couronné de la célèbre distinction du jury d'Oslo, pourrait se dérober à l'exercice qu'il avait déjà annulé cet automne, à la grande déception des Tibétains et des organisations des droits de l'homme.
Alors que le ciel se couvre à grande vitesse sur une relation sino-américaine qu'Obama avait tenté de mettre sur les rails de la coopération économique, en mettant délibérément en arrière-plan la question des libertés politiques en Chine, les États-Unis peuvent difficilement se permettre de céder aux objurgations exaspérées de Pékin. Un responsable chinois a rappelé sèchement hier que son pays était « opposé » à la rencontre et annoncé qu'elle « minerait sérieusement les fondations des relations bilatérales entre la Chine et les États-Unis ».
Muscler la relation
Mais toute nouvelle reculade apparaîtrait comme un aveu de faiblesse dangereux pour Obama, alors que la superpuissance américaine et la puissance montante chinoise se retrouvent en phase de tension, jaugeant leurs forces respectives dans un face-à-face en passe de devenir l'une des clés de l'équilibre mondial.
La rencontre paraît d'autant plus probable que l'approche coopérative décidée par Obama n'a pas engrangé les résultats escomptés, expliquent maints experts. Loin d'avoir amadoué le partenaire chinois, l'Amérique a essuyé plusieurs rebuffades dérangeantes. Obama a dû se plier aux limitations drastiques imposées par le régime au cours de sa visite d'État en Chine cet automne, se voyant forcé par exemple de convoquer une conférence de presse sans questions des journalistes. Il n'aurait pas goûté le blocage de Pékin sur le dossier du climat, lors de la conférence de Copenhague, de même que l'obstruction chinoise sur la question des sanctions à l'encontre de l'Iran.
Du coup, la Maison-Blanche s'est décidée à réintroduire du muscle dans la relation, annonçant vendredi sa décision sur les ventes d'armes à Taïwan et mettant en garde Pékin sur le dossier du nucléaire iranien. Cette vente d'armes est « une ingérence grossière » dans les affaires intérieures de la Chine, ont riposté les Chinois, suspendant les échanges militaires avec les Américains et annonçant des sanctions contre les entreprises concernées par le contrat taïwanais... Pékin a par ailleurs averti hier que ces ventes auraient des répercussions sur les « grandes questions internationales et régionales », manière d'avertir que la Chine pourrait bloquer toute avancée sur les dossiers nucléaires nord-coréen ou iranien.
Reste à savoir jusqu'où peut aller l'escalade. Insistant sur l'interdépendance étroite des économies chinoise et américaine, certains diplomates jugent peu probable une confrontation majeure. « Il y a beaucoup de posture », estime l'un d'eux. Mais un nouvel ordre mondial est en train de naîtreà travers ces frictions. En ce sens, le voyage du dalaï-lama et le dossier iranien seront autant un test des intentions chinoises que de la diplomatie américaine. Le camouflet que vient d'infliger Obama à ses partenaires européens en annulant sa participation au sommet annuel USA-UE n'en est que plus incompréhensible. Face au géant asiatique, l'Amérique va plus que jamais avoir besoin de ses alliés transatlantiques.
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1 commentaires:
Clin d'oeil humoristico-burlesque sur le sujet :
http://douillon.canalblog.com/
Bons Sourires
JEAN PATRICK
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