Il y a 50 ans dans le Monde
Invité en France au titre de chef du gouvernement d'un grand peuple hier allié et toujours ami, M. Khrouchtchev n'a pas laissé ignorer qu'il était avant tout un communiste, persuadé de la valeur universelle et de la victoire finale de son système. Hier matin, il s'est jeté dans les bras de MM. Maurice Thorez et Jacques Duclos à la Maison de Lénine. C'est par une profession de foi dans cette idéologie qu'il a achevé son intervention devant la presse.
On saura gré au maître de l'URSS de sa franchise. Elle peut aider à dissiper les illusions entretenues, ici ou là, sur les rapports du régime actuel et de la Russie éternelle. Certes ce régime évolue vers moins de rigidité : la présence en France de M. " K " en est à elle seule une preuve; il n'est pas douteux non plus que le tonus révolutionnaire soit en nette perte de vitesse et que la voiture et la datcha commencent à prendre la place, dans les rêves de la classe dirigeante, de la parousie bolchevique. Enfin il est bien évident que pour un homme dans la position de M. Khrouchtchev le souci quotidien de l'Etat national passe le plus souvent avant le prosélytisme.
M. " K " n'admet-il pas lui-même qu'il peut exister des limites infranchissables à l'expansion de sa foi ? Dès hier, il a reconnu qu'il n'existait pas d'espoir de convertir le général de Gaulle. Croit-il avoir plus de chances avec la majorité des Français ? Ceux-ci admirent certes les grandioses réalisations techniques de l'URSS et de la Chine. Ils n'ignorent pas le prix payé et ne pensent pas, en dépit du retard que leur a aimablement prêté M. Khrouchtchev, qu'un pays comme le nôtre ait besoin de recourir à ces thérapeutiques de choc.
(27-28 mars 1960.)
© 2010 SA Le Monde. Tous droits réservés.
0 commentaires:
Enregistrer un commentaire