Au Salon de Pékin, l'automobile est en fête. Et cela se voit sur les stands des constructeurs. Telle star locale du cinéma ou de la chanson provoque un attroupement. Plus loin, on assiste à une chorégraphie de danseuses ou à un défilé de mannequins. Quand ce n'est pas à un concert de tambours traditionnels ou à la prestation d'un DJ à la mode. Quel contraste avec la morosité européenne!
Il faut dire que les marques présentes ici ont de quoi se sentir pousser des ailes. Après être devenu le premier marché du monde l'an passé, avec 13,6 millions de véhicules, le marché devrait encore croître de 20 % cette année, selon les professionnels. Stimulées par des aides gouvernementales - dont l'effet devrait s'estomper sur la deuxième partie de l'année -, les immatriculations ont bondi de 72 % sur le premier trimestre. « Je m'attends à une longue période de croissance sur le marché chinois. Il n'y a aucune raison pour que le taux d'équipement en automobiles ne rejoigne pas les niveaux européens! », s'enthousiasme Carlos Ghosn, le PDG de Renault et du japonais Nissan, troisième constructeur du pays.
On comptait en Chine 34 voitures pour 1 000 habitants en 2008, contre 600 pour 1 000 en France. Les analystes de Nomura anticipent une croissance annuelle de plus de 10 % sur ces prochaines années, avec un marché dépassant les 25 millions de véhicules au total à cet horizon. À l'inverse, le marché européen devrait chuter d'environ 10 % cette année.
Alléchés par ce formidable potentiel, tous les constructeurs veulent faire bonne figure à Pékin. Dans l'immense hall des expositions de 200 000 m2, 1 000 modèles sont exposés depuis vendredi, avec un lancement mondial pour 89 d'entre eux. C'est à celui qui annoncera les prévisions les plus optimistes.
Boom des marques chinoises
L'américain General Motors, le leader du marché - tous véhicules confondus -, compte désormais dépasser les 2 millions de ventes cette année et les 3 millions de véhicules en 2015, soit dix ans avant ses prévisions initiales. L'allemand VW, premier sur les voitures pour particuliers, va quant à lui investir 4,4 milliards d'euros en Chine d'ici à 2012. Dans de nouveaux produits, mais aussi de nouvelles usines. De son côté, Nissan veut passer à moyen terme de 6,7 à 10 % de part de marché, « ce qui signifierait 2 millions de ventes, explique Carlos Ghosn, et nous obligerait à plus que doubler notre capacité de production ».
Les groupes occidentaux devront toutefois faire face à la concurrence accrue des marques locales. La part de marché des constructeurs chinois, passée de 27 % en 2006 à 32 % en 2009, pourrait s'établir à 37 % en 2015, selon une étude du cabinet Alix Partners. Même s'ils ont encore du retard en termes de qualité et de style, « les constructeurs chinois ont fait de gros progrès en un temps record. Nous les surveillons avec attention », reconnaît Tim Lee, président des opérations internationales de GM. Pour l'heure, la centaine de constructeurs chinois s'est surtout spécialisée sur les petites voitures à bas coût. Sous la pression du gouvernement chinois, qui pousse à la concentration du secteur, « il devrait rester à terme une dizaine de constructeurs, dont deux à cinq avec une dimension internationale », estime Christian Kingler, vice-président de VW en charge des ventes et du marketing.
Certains sont déjà sous les feux des projecteurs. Tout un symbole, Geely a racheté le suédois Volvo le mois dernier. À Pékin, le premier constructeur privé du pays s'est offert le plus grand stand chinois. Il veut multiplier par six ses ventes d'ici à 2015 pour les porter à 2 millions. De son côté, BYD, détenu à hauteur de 10 % par le milliardaire américain Warren Buffett, prévoit de commercialiser une voiture électrique aux États-Unis d'ici à la fin de l'année. Enfin, Chery vient d'annoncer qu'il venait de recruter le footballeur argentin Lionel Messi, considéré comme le meilleur joueur de la planète, comme « ambassadeur » de sa marque. Il ne faut toutefois pas s'attendre à un débarquement des voitures chinoises en Europe dans l'immédiat. Outre les barrières représentées par les normes de pollution et de sécurité, « ces marques ont déjà fort à faire pour s'imposer sur le marché le plus dynamique du monde! », explique Laurent Petizon, directeur associé chez Alix Partners. Mais nul doute que les Chinois voudront réussir hors de leur frontière pour entrer dans la cour des grands.
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