Il aura fallu la crise de la dette grecque pour que le métal jaune libellé en euros se hisse au-dessus de son précédent record absolu.
Un nouveau sommet à proximité immédiate des 864 euros l'once d'or a été gravi hier en séance, alors même que l'once s'échange encore, en dollars, à un prix inférieur de 6 % environ à celui de son dernier plus haut en séance, (1.226,56 dollars, le 3 décembre 2009). Depuis le début de l'année, le métal jaune en euros s'est apprécié de plus de 12 % alors que le même précieux avec le billet vert pour unité de compte n'a avancé que de moins de 5 %. L'or est très dépendant de l'évolution des parités monétaires. Il est donc logique que le cours du métal jaune en euros remonte à mesure du raffermissement du dollar face à la monnaie unique. Cette dernière a concédé environ 7,5 % à la devise américaine depuis la fin 2009. Un pourcentage presque égal au différentiel de hausse des prix de l'or en dollars et en euros constaté sur la même période.
Pourtant, au dire de James Steel, chez HSBC, le jeu croisé des monnaies ne suffit pas à expliquer la trajectoire des cours de ce précieux inscrite ces derniers temps. Loin s'en faut. Tout d'abord, et en toute logique, l'or en dollars aurait dû s'affaiblir face à la généralisation du redressement économique couplée à une parité plus ferme de sa devise de référence et à une inflation qui demeure relativement modérée, en dépit de l'envolée des prix des matières premières industrielles. L'appréciation du dollar se solde traditionnellement par une perte de vigueur de l'or. Il n'en est rien aujourd'hui. Le métal jaune libellé en dollars se maintient à des niveaux de cours historiquement élevés.
Résistance étonnante
Autre anomalie, les crises de dette souveraine de l'après-guerre n'ont pas déclenché d'augmentations significatives des prix de l'or. Ce fut encore le cas lors de la crise de la dette argentine, en décembre 2001. Il en va autrement aujourd'hui. La crise grecque, qui érode la parité de la monnaie unique et propulse le billet vert, n'a pas terni l'éclat du plus populaire des précieux. Pourtant, le risque de défaut de la dette souveraine athénienne est beaucoup plus grand pour le système financier international que celui associé à la dette argentine d'il y a neuf ans. La Grèce est un Etat membre de l'OCDE et, surtout, elle fait partie de la zone euro. Le défaut de ce pays pourrait freiner, voire handicaper la reprise conjoncturelle globale. Et cela est d'autant plus vrai qu'Athènes n'est pas la seule capitale du monde développé à être placée sous cette menace. Sous cet angle, ce n'est pas tant l'envol de l'or en euros qui est étonnant, mais sa résistance en dollars « face à l'escalade du risque souverain grec », résume James Steel. Les analystes techniques de Credit Suisse lui prédisent un objectif rapproché de 1.227 dollars l'once, son record de décembre, suivi par une remontée, d'abord vers les 1.250 dollars, puis vers les 1.264 dollars.
Le métal jaune bénéficie aussi d'un certain soutien du côté de la demande physique asiatique, notamment en Chine et en Inde, pays où les pressions inflationnistes regagnent en intensité. « Il est certain que la peur de l'inflation en Chine a été un facteur majeur de la demande asiatique d'or cette année », confirme Edel Tully, chez UBS.
MASSIMO PRANDI
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