lundi 10 mai 2010

Les ravages du néocapitalisme - Philippe Cohen

Marianne, no. 681 - Événement, samedi, 8 mai 2010, p. 18

Le vampirisme des financiers a eu raison de la Grèce. Désormais, c'est l'Europe tout entière qui se trouve en ligne de mire. En vertu de la logique néolibérale sans aucune cohérence ni limite morale...

"La Grèce est sauvée, enfin ! " (le Journal du dimanche). " Un plan d'aide historique ! " (les Echos). " Un moment fondateur pour l'Europe ", s'est même écrié Daniel Cohen, économiste (et, accessoirement, conseiller de Martine Aubry), fort lyrique, pour saluer, dès le dimanche 2 mai, avant même qu'il ne soit finalisé, le plan d'aide à la Grèce signé avec les pays de l'Union européenne et le FMI.

D'Eric Woerth, le ministre du Travail, au socialiste François Hollande en passant par Dominique Strauss-Kahn, tous les oiseaux du paradis européen ont roucoulé sur l'adoption du plan d'austérité grec et l'acceptation simultanée de 110 milliards d'euros de prêts bilatéraux, un plan voté en bloc et sans barguigner par les députés PS, quarante-huit heures avant la grève générale en Grèce. Au PS, comme à droite, on veut même croire que le sauvetage de la Grèce augure d'un nouveau bond en avant de l'Union européenne. L'Europe, se plaisent à rappeler ses partisans les plus fervents, n'avance-t-elle pas toujours à l'occasion des nouvelles crises ? On aimerait les croire. Hélas...

Premier mensonge : " L'Europe a sauvé la Grèce ! "

Tout est bien qui finit bien ? Sauf pour les Grecs, bien sûr, obligés d'avaler une potion amère (lire le reportage à Athènes de Martine Gozlan, p. 24)... Oui, mais ils n'ont pas le choix, répliquent, la bouche en cul de poule, la plupart des économistes, des éditorialistes et des hommes politiques, les plus décomplexés ajoutant même que la punition pendait au nez des cigales hellènes.

Voilà le premier mensonge. Ce ne sont pas les Grecs qu'ont sauvés l'Union européenne et le FMI, mais d'abord ses créanciers, c'est-à-dire les banques, les hedge funds et les SPV (special purpose vehicule), ces fonds spécialisés dans les investissements à risques au profit des banques. Quant aux Grecs eux-mêmes, sont-ils les fainéants désignés comme tels par la presse allemande et à demi-mot par certains journalistes français ? Selon Jacques Sapir, professeur d'économie à l'Ecole pratique des hautes études, c'est un autre mensonge : " Calculée en parité de pouvoir d'achat, la productivité de la Grèce est égale à 85 % de la productivité allemande, ce qui n'est pas mal pour des "cueilleurs d'olives". " Mieux : les statistiques montrent que la productivité du travail augmente davantage en Grèce (2,4 % sur la période 1998-2005) qu'en... Allemagne (1,2 %). Notons cependant que le pays est aussi durement pénalisé par une fonction publique réputée inefficace.

Mais si ses créanciers soupirent d'aise, la Grèce, elle, est loin d'être sauvée. D'abord, parce que ce plan d'austérité ne fait pas l'unanimité dans le pays. Mais admettons même que le mouvement social grec ne parvienne point à arracher des concessions au gouvernement Papandréou. Pour que la Grèce soit sauvée, il faudrait aussi que ce plan soit raisonnable. Or, les masses financières dégagées sont en dessous des besoins réels du pays : selon Sapir, les intérêts de la dette que doit acquitter la Grèce d'ici au 31 décembre 2012 s'élèveront à 93 milliards d'euros, auxquels s'ajouteront les déficits des trois années, soit au total un besoin de 180 à 200 milliards d'euros ! Moins pessimiste, Erik Nielsen, de Goldman Sachs, parle, lui, de 150 milliards. Mais, surtout, nos experts oublient que le déficit public n'est pas un chiffre en valeur absolue mais une fraction : il se calcule en pourcentage du PIB. Il ne suffit donc pas de diminuer le numérateur - les dépenses - pour redresser les comptes, il faut aussi que le dénominateur - les recettes - ne s'effondre pas. Or, un plan d'austérité, même réussi, commence toujours par engendrer une baisse d'activité. La simple annonce du plan européen a déjà fait baisser de 1 % à - 4 % la croissance grecque. Ce qui fait mécaniquement monter le déficit public, puisque cela signifie une baisse des recettes de l'Etat. A moins que le gouvernement Papandréou ne parvienne à " blanchir " l'économie grise, qui représente 30 % du PIB de la Grèce. N'y croyons pas trop : pour faire rentrer l'argent dans les caisses, il faudrait plus d'agents du fisc alors qu'on ne va pas remplacer les fonctionnaires (c'est ce qu'on appelle la quadrature du cercle...) ; et puis, dans une société rétive à l'impôt, l'augmentation de la TVA se traduit par un surcroît de ventes au black.

Deuxième mensonge : " Les marchés s'inquiètent pour l'endettement des Etats ! "

Une fois verrouillé le plan d'aide à la Grèce, notre ministre des Finances, Christine Lagarde, a exclu toute contagion à d'autres nations simplement parce que le plan démontrerait que l'Union européenne ne laisse pas tomber un pays attaqué par les spéculateurs. Une thèse qui a mis en rage certains conseillers de l'Elysée et fait sourire les économistes les plus lucides : croire que les traders sont impressionnés par la vertu économique des pays, c'est un peu prendre une maquerelle pour une bonne soeur. Agatha Christie nous a maintes fois démontré que la question " A qui profite le crime ? " ne suffisait pas forcément à trouver le coupable. Mais, sur les marchés financiers, cette question aide à comprendre ce qui se passe.

Reprenons donc la séquence initiée au début de cette crise grecque, le 23 avril dernier. Ce jour-là, le ministre des Finances grec demande à l'Union européenne d'activer le plan d'aide, soit 30 milliards de prêts européens et 15 du FMI. La missive grecque et les réticences allemandes qui l'accompagnent déclenchent des alertes d'analystes financiers et d'agences de notation. Dès le 26 avril, les taux de prêts consentis à la Grèce grimpent à 13 % pour le court terme et 9 % pour le long terme. Voici donc le premier coupable : ces mêmes établissements financiers auxquels les banques centrales prêtent à un taux de 1 % réalisent des plus-values indécentes (de 800 à 1 000 %) sur ces opérations !

Mais ce n'est pas tout. Derrière les banques se profilent les hedge funds (les fonds spéculatifs) et les fameux SPV. En réalité, ce n'est pas la vertu mais la cupidité qui les anime, comme l'a écrit l'économiste Jean-Paul Fitoussi dans le Monde. Tels des vautours, ils observent et, le moment venu, fondent sur l'entreprise ou l'Etat qui leur paraît le maillon faible. Catastrophe locale, la dette grecque est une formidable occasion de profits pour les spéculateurs qui parient sur une faillite de l'Etat. Ils gagnent en pariant sur la chute de la Grèce, mais ils gagnent aussi si elle s'en sort puisque, dans les deux cas, c'est sur une hausse des taux d'intérêts que la plupart des " joueurs ", c'est-à-dire, in fine, les banquiers, parient !

En réalité, les marchés ne sont pas des roseaux pensants sensibles à la bonne santé des Etats. Les marchés n'existent pas : les vrais acteurs sont ces investisseurs purement financiers cherchant à tout moment à gagner le plus d'argent possible en prenant le moins de risques possible. Voilà pourquoi ce qui est arrivé à la Grèce était parfaitement prévisible. Et d'ailleurs parfaitement prévu, notamment par le journaliste Jean-Michel Quatrepoint, qui avait annoncé une spéculation sur la dette des Etats dès l'automne 2009 dans son livre la Dernière Bulle (Mille et Une Nuits). A l'époque, Marianne avait même publié les extraits de cet ouvrage. Son raisonnement ? En investissant des dizaines de milliards dans des plans de relance, les gouvernements ont transféré dans les caisses de l'Etat la dette privée qui avait provoqué la crise financière de 2008. Une occasion pour les vautours d'inventer de nouveaux produits. Vous rappelez-vous comment les fonds mélangeaient des crédits de gens solvables avec ceux accordés à d'autres, quasi ruinés, et comment ces fonds " titrisés " avaient abouti à déclencher la crise ? Le même processus toxique s'organise autour de l'énorme marché des dettes publiques : 17 300 milliards de dollars aux Etats-Unis, 10 000 milliards d'euros au sein de l'Union. Pour nos vautours, il y a de quoi faire !

Troisième mensonge : " Le plan d'aide à la Grèce met l'Europe à l'abri des spéculateurs "

Le 3 mai, Christine Lagarde a affirmé " ne même pas vouloir penser " à une attaque contre les autres maillons faibles de l'Union. Vingt-quatre heures à peine après ses rodomontades, les marchés se déchaînaient contre l'Espagne provoquant, sur la foi d'une rumeur vite démentie, un minikrach boursier dans toute l'Europe. Un effet dominos s'expliquant, entre autres, par le fait que les banques espagnoles détiennent 60 % de la dette portugaise (lire l'article de Périco Légasse sur Marianne2) !

L'attaque contre l'Espagne et le Portugal montre l'énorme erreur de Christine Lagarde et des ministres de l'Economie et des Finances de l'UE : le soutien à la Grèce, loin de protéger les autres pays de l'Union, les expose davantage. Pour une raison très facile à comprendre : on ne change pas une équipe qui gagne. Si l'action des spéculateurs a fonctionné avec la Grèce, pourquoi ne marcherait-elle pas avec d'autres pays ? Pourquoi ne pas " spieler " (" jouer ", dans le jargon des marchés) à la baisse sur l'Espagne, 9e économie mondiale, avec un PIB de 1 438 milliards, soit cinq fois celui de la Grèce ? Et pourquoi pas, demain, l'Italie, l'Irlande ? Le risque est d'autant moins grand que les pays de l'Union européenne seraient alors bien à la peine : ce ne seraient pas 100 mais 1 000 milliards que l'Europe devrait sortir pour faire face à de nouvelles attaques contre ces pays !

Quatrième mensonge : " La France est aussi menacée de faillite "

La France peut-elle se retrouver un jour dans la situation de la Grèce ? En théorie, c'est tout à fait possible. Comme les Etats-Unis, notre pays cumule depuis des années un double déficit, commercial et public. Bref, pour les orthodoxes, elle " vit aussi au-dessus de ses moyens " puisqu'elle vend moins que ce qu'elle gagne et qu'elle puise dans son patrimoine pour équilibrer ses comptes. Il est vrai que la gestion des finances françaises s'est dégradée dans des conditions inquiétantes depuis 2006 : le déficit public est passé de 63 à 85 % du PIB ! Mais, si une part de cette augmentation provient de la dégradation de notre compétitivité, une autre - le déficit public - résulte de la crise. Il y a déficit et déficit, et celui de tous les pays a augmenté après 2009, jusqu'à 9 % en moyenne dans les pays développés (contre 6 % en France) ! Mais, à écouter nos chers éditorialistes Jean-Michel Aphatie et Jean-Pierre Elkabbach interroger, de bon matin et la voix étranglée, nos ministres, on a bien l'impression que la faillite nous pend au nez. Avec, comme aux plus beaux jours de la crise de 2008, une valse des chiffres pour effrayer le populo. La dette française, qui ne représente que 85 % du PIB (contre 120 % pour la Grèce), pourrait ainsi dépasser les 100 % dès 2012 en cas de scénario pessimiste. Entre parenthèses, personne ne s'étonne que la dette japonaise (200 % du PIB) ne suscite aucune inquiétude. C'est dommage parce que le pourquoi est instructif : ce sont les Japonais qui la détiennent et non nos " amis " les traders.

Si on veut se faire peur, écoutons la petite musique souvent fredonnée sur nos radios... et au gouvernement : lors de la réunion de crise autour de Sarkozy le 2 mai, plusieurs ministres, parmi les plus sensibles à la rhétorique des inspecteurs des finances, affirmaient qu'il fallait profiter de la crise pour faire passer des réformes sur les retraites ou les titres-restaurants. " Regardez les Grecs !, susurrent nos orthodoxes, ils vont devoir accepter une baisse de 20 à 30 % de leur pouvoir d'achat. Chez nous, ça ne sera que 10 %. Mais il faudra bien en passer par là. " D'ailleurs, Christine Lagarde l'a dit : " Il n'y a pas d'alternative ! " Ça ne vous rappelle rien, vraiment ? Mais si, Mme Thatcher au début des années 80 : " Tina ", " There is no alternative ! " On en revient toujours là.

Cinquième mensonge : " L'Allemagne est un modèle de vertu en économie "

Le deuxième profiteur de la crise grecque est l'Allemagne. Angela Merkel s'est montrée inflexible sur la Grèce pour conforter, avant le scrutin du 9 mai, un électorat qui considère les Pigs (Portugal, Italie, Grèce et Espagne) comme le bouc émissaire de ses difficultés. Or, à quoi aboutissent ces gesticulations ? A faire baisser l'euro. Et qui profite de la baisse de l'euro ? Les entreprises exportatrices allemandes. En haussant le ton contre la Grèce, Merkel a été deux fois gagnante : politiquement et économiquement.

Depuis dix ans, la politique économique allemande a été en fait organisée au détriment de ses voisins. Voilà plusieurs années que l'Allemagne est le seul grand pays de l'Union européenne à voir son commerce extérieur nettement excédentaire, ce qui n'était pas le cas auparavant. Est-ce donc à dire que ce ne sont pas seulement les Grecs qui sont des fainéants, mais aussi les Espagnols, les Italiens, les Belges ? Seul Jean-Claude Trichet, le président de la Banque centrale européenne (BCE), peut penser comme ça, et encore, ce serait le sous-estimer. D'où vient donc ce fameux " succès " allemand ? De sa vertu économique ? Sa croissance et ses investissements sont-ils moins soutenus que ceux de la France ! D'un endettement plus faible ? Même pas : si l'on prend en compte la dette totale du pays, c'est-à-dire celle de l'Etat, des entreprises et des ménages, la France est légèrement moins endettée que l'Allemagne, 198,5 % du PIB contre 199,7 %. En fait, depuis dix ans, l'Allemagne a réussi à faire baisser le coût du travail en fiscalisant les charges sociales de ses salariés : à Paris, on a parlé de la TVA sociale, à Francfort, on l'a faite. Tout le problème est que ce gain de compétitivité s'est effectué principalement aux dépens de ses voisins européens. " Par sa politique fiscale, constate Jacques Sapir, l'Allemagne a réalisé l'équivalent d'une dévaluation de 10 % au sein de la zone euro. "

Sixième mensonge : " Depuis la crise, les Etats régulent les marchés "

Tout se passe comme si Angela Merkel et les élites allemandes avaient voulu satisfaire les pires prévisions des économistes eurosceptiques. N'est-ce pas Jean-Jacques Rosa et Christian Saint-Etienne, qui, dans les années 90, expliquaient que l'euro serait une construction hasardeuse si elle concernait trop de pays aux intérêts économiques divergents ? N'avaient-ils pas annoncé cet éclatement de l'euro que craint même, à présent, Joseph Stiglitz, le plus européiste des économistes américains ? Hormis l'Allemagne et les Pays-Bas, les pays de l'Eurogroupe ont aujourd'hui besoin d'une dévaluation monétaire pour gagner en compétitivité. La Grèce, pour rendre son tourisme plus attractif et vendre ses produits agroalimentaires. La France et l'Italie, pour booster leurs exportations. Pourquoi la Grande-Bretagne a-t-elle peu de chances d'être attaquée, malgré un déficit public et une dette colossale ? Même les correspondants du Monde, journal " européaniste " s'il en est, l'ont compris : elle dispose encore de sa monnaie, dévaluée de 20 % depuis la crise, pour maintenir sa compétitivité ! Si l'on voulait faire une véritable union européenne, il faudrait mener une politique économique et monétaire vraiment commune, qui serve tout autant les intérêts allemands que ceux de ses voisins. Ce qui impliquait, comme Marianne l'a toujours défendu, une Europe plus petite et plus homogène, pour être plus fédérale.

Ainsi, alors que les Etats-Unis, la Chine et l'Angleterre peuvent à la fois jouer de l'ajustement monétaire et du déficit budgétaire pour retrouver de la croissance, les pays européens doivent se contenter de faire du déficit public. D'où, d'ailleurs, l'explosion des budgets des pays de l'Union. Pour des raisons qui tiennent à sa psychologie et à son histoire personnelle, mais aussi à la conversion du patronat allemand au néolibéralisme le plus abrupt, Angela Merkel a fait le choix inverse. Nous vivons dans une Europe allemande et l'euro lui-même est en réalité l'héritier du mark et non de l'ECU tel que l'avait conçu Jacques Delors.

Au-delà du cas très préoccupant de l'Union européenne, c'est tout le système d'inspiration néolibérale que remet en cause la crise grecque. Mais il faut pour cela un tout petit peu de mémoire. Quels étaient, dans les années 90 et 2000, les modèles que l'on nous proposait à longueur de reportage et d'éditorial lénifiant ? L'Espagne, l'Irlande, le Portugal, ces " dragons " qui alignaient de merveilleux taux de croissance ! Sauf que ces nations ont abandonné leur industrie et ont placé leur destin entre les mains des financiers, des traders et des promoteurs immobiliers. En Espagne, l'immobilier - 30 % de l'activité - a chuté de 96 %. D'où un chômage de près de 5 millions de personnes. Lorsque les marchés attaqueront de nouveau l'Espagne, que fera Angela Merkel ? Voudra-t-elle imposer un nouveau tour de vis budgétaire, aux Espagnols cette fois ? On voit bien l'absurdité, l'injustice et l'irrationalité d'un tel processus ! Est-ce aux salariés et aux chômeurs espagnols - les immigrés du BTP, eux, ont déjà été virés - de payer pour l'incurie d'une élite qui a fait mine de croire que les taux de croissance et les buildings montaient jusqu'au ciel ? Et d'ailleurs, est-ce aux salariés grecs de payer pour la corruption et l'incompétence de leurs dirigeants ? Pourquoi, comme l'a justement fait remarquer le député socialiste Jérôme Cahuzac, la marine marchande grecque, importante dans les échanges maritimes, est-elle épargnée de toute taxe ?

En fait, les exemples grecs espagnols, portugais et irlandais nous rappellent une vieille loi de l'économie oubliée par nos dirigeants, français comme étrangers : la santé économique d'un pays dépend d'abord de son industrie, non pas de la finance et de l'immobilier, terrains de jeu des spéculateurs. " Le déficit commercial et le déficit public sont étroitement liés, y compris aux Etats-Unis, explique Jean-Michel Quatrepoint. Si on ne produit rien, on ne vend rien et cela crée du déficit. " En France, la baisse de l'industrie dans l'activité et dans la main-d'oeuvre (- 13 % alors que la population active a augmenté de 6 %) entre 2000 et 2008 s'est accompagnée d'un déficit commercial dont la permanence devient inquiétante.

Enfin, il nous faut tirer la dernière leçon provisoire - mais pas la moins importante - de cette tourmente. La crise financière avait donné la main aux gouvernements pour remettre d'aplomb - et, si possible, dans le droit chemin - un système financier ébranlé par ses propres folies. On a dénoncé les banksters ; on a chanté la " régulation " sur tous les balcons ; on a menacé les hedge funds, les paradis fiscaux et les agences de notation de réformes cruelles et sans pitié ; on a réuni des G20 de crise, publié des communiqués triomphalistes, proclamé le retour de la morale de l'effort. Et puis... plus rien. Bernique. Nada. La montagne n'a même pas accouché d'une souris. Dès lors, tous ceux qui ont eu peur, les banquiers, les traders, les agences de notation, bref, les marchés, comme on dit à la télé, se sont dit que le pire, pour eux, était passé. Ils se sont donc ressaisis. Les banquiers ont récupéré leurs bonus, les banques, leurs profits, les agences de notation, leurs analyses criminelles pour les peuples. C'est de nouveau le Bal des vampires qui se joue dans l'économie européenne. Comme si les marchés se vengeaient d'une correction que les Etats n'ont pas été capables de leur infliger vraiment.

PHOTO - Le 5 mai, la Bourse de Madrid. Les marchés se déchaînent contre l'Espagne, provoquant un minikrach boursier.

© 2010 Marianne. Tous droits réservés.

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