Il aura fallu deux jours de débats à l'assemblée législative de Hongkong, le Legco, pour faire passer, dans une ambiance survoltée, quelques mesures présentées par le gouvernement comme un " package de réformes " ayant pour but d'accélérer la démocratisation des institutions locales lors des élections de 2012. Les reformes ont été adoptées à 46 voix pour et 13 contre, jeudi après-midi.
Depuis la rétrocession de Hongkong à la Chine, en 1997, les habitants de l'ancienne colonie britannique espèrent voir la mise en place de la démocratie promise par la " Basic Law ", texte tenant lieu de mini-Constitution. Mais les progrès sont des plus poussifs, surtout depuis que Pékin a pris l'habitude d'intervenir dans le débat.
Sur les deux principales questions que sont l'élection du chef de l'exécutif et celle des députés, les progrès proposés par le gouvernement hongkongais, avec l'aval de Pékin, sont dérisoires. Le chef de l'exécutif qui est actuellement élu par 800 personnes triées sur le volet le sera, une fois ces réformes adoptées, par 1 200 personnes en 2012. " A ce rythme-là, il va nous falloir 2 500 ans avant que les 3,5 millions d'électeurs puissent élire leur chef ", ironise Ka Long, un étudiant en design industriel, dont le tee-shirt noir est couvert d'autocollants avec l'inscription " Tout faux " dessus, venu exprimer son " écoeurement " devant les pierres blanches du bâtiment colonial pendant les délibérations.
Pour ce qui est des députés, le Legco est actuellement composé de 30 sièges de députés élus au suffrage universel, plus 30 sièges " corporatistes ", représentant des secteurs professionnels, élus par des collèges électoraux parfois aberrants. Par exemple, le siège représentant le secteur financier (qui emploie plus de 6 % de la population active) n'est désigné que par 132 votes. Ce sont ces sièges-là, essentiellement occupés par l'élite hongkongaise, acquise à Pékin et au gouvernement, qui sont jugés antidémocratiques, et que la population, dans sa large majorité, aimerait voir disparaître.
Pékin, au contraire, estime que ces sièges garantissent " l'équilibre de la représentativité ". Or les réformes proposées par le gouvernement ajoutent dix sièges au Legco dont cinq nouveaux " corporatistes ". Autrement dit, le gouvernement maintiendra sa quasi " garantie de majorité ", avec 35 sièges corporatistes sur 70.
Une pure mascarade
Selon un compromis conclu moins de 48 heures avant le vote avec le parti démocratique (pour garantir au gouvernement le soutien des deux tiers du Legco à sa proposition), ces cinq nouveaux sièges corporatistes pourraient être attribués au suffrage universel direct. Mais comme les candidats auront été préalablement sélectionnés, l'exercice est, selon ses critiques, une pure mascarade. Ce compromis a divisé le camp démocrate. Plusieurs députés ont indiqué leur intention de démissionner.
A l'issue d'un débat télévisé qui a eu lieu jeudi 17 juin, entre le chef de l'exécutif, Donald Tsang, censé promouvoir son projet de réformes, et l'une des figures de proue de l'opposition, l'avocate Audrey Eu, fervente opposante à ces réformes, seulement 14 % des auditeurs ont jugé le chef de l'exécutif convaincant. Mais cela n'a pas empêché le projet d'être adopté par les deux tiers de l'assemblée.
Florence de Changy
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