Après un Ph. D au MIT de Boston et une première carrière dans des hôpitaux américains, le docteur En Li, spécialiste en cancérologie, est revenu dans sa ville de naissance pour diriger le centre de recherche de Novartis.
Vous avez pris la direction d'un centre de recherche à Shanghai. Quel sera son rôle ?
Il est destiné à devenir le troisième centre de recherche du groupe Novartis, à égalité avec ceux de Boston aux Etats-Unis et de Bâle en Suisse. La plupart des centres implantés par nos concurrents dans le parc high-tech de Shanghai sont de petite taille et ont des ambitions limitées. Le nôtre est positionné stratégiquement pour devenir un centre à part entière de niveau mondial. Dans sa version finale, qui sera terminée dans quelques années, il emploiera un millier de chercheurs dans un complexe qui sera une véritable ville scientifique.
Notre objectif est de tisser des liens avec la recherche académique chinoise et surtout d'être plus proche des patients chinois afin de comprendre les maladies telles qu'elles se présentent ici.
Pour quelles raisons les multinationales de la pharmacie s'installent-elles dans la région de Shanghai ?
D'abord parce qu'il y a maintenant un important réservoir de talents scientifiques à Shanghai. En 2008, la Chine a décerné environ 44.000 diplômes de Ph. D, toutes disciplines confondues : c'est plus qu'aux Etats-Unis_ Parmi ces chercheurs, une forte proportion sont des biologistes ou des chimistes -et c'est une autre raison qui attire les firmes occidentales. Récemment, le gouvernement a également lancé le programme des 1.000 talents pour repérer les plus prometteurs. La situation a totalement changé au cours des dix dernières années, avec le retour des expatriés. Cela se traduit par une augmentation spectaculaire du nombre des publications dans les revues scientifiques et de brevets. Enfin, la ville de Shanghai a fait de la recherche biomédicale une de ses priorités.
Quels sont les objectifs que vous visez sur le plan médical ?
Nous allons nous concentrer sur les maladies pour lesquelles nous n'avons pas de traitements. Certaines de ces maladies sont très courantes en Chine alors qu'elles sont plus rares en Occident. C'est le cas des hépatites B et C, très fréquentes pour des raisons génétiques et environnementales. Nous cherchons notamment à savoir comment une infection virale peut entraîner la naissance et la progression de certains cancers. Il y a donc un défi à la fois scientifique et médical. La recherche sur les maladies hépatiques est un autre sujet de recherche qui correspond aux priorités du gouvernement. Nous disposons ici de grandes quantités de patients sur lesquels nous pouvons conduire des essais cliniques et qui pourront bénéficier de ces progrès grâce à la médecine translationnelle [qui vise à faire passer le plus vite possible l'innovation thérapeutique du laboratoire au patient, NDLR]. Nous allons mettre en place une approche originale pour étudier les cancers du foie et gastriques en constituant une bibliothèque de tumeurs spécifiques à ces pathologies. Pour cela, nous allons coopérer avec plusieurs instituts locaux, dont l'hôpital de Shanghai. Ces travaux nous permettront de constituer des modèles qui auront une certaine valeur prédictive pour le développement de nouvelles molécules. Nous allons également nous intéresser aux causes épigénétiques des maladies. Il s'agit en effet de découvrir les facteurs environnementaux qui régulent ou déclenchent ces maladies en agissant sur les gènes. C'est tout à fait différent des maladies qui sont la cause des séquences écrites dans les gènes.
ALAIN PEREZ
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